Chaque année, entre 250.000 et 500.000 enfants perdent la vue à cause d'une carence en vitamine A. La moitié d'entre eux en mourront. Pourtant, une solution existe : le riz doré, un riz OGM contenant assez de vitamine A pour les sauver. Mais des obstacles ont été mis sur la route de son développement.


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    Deux cent cinquante millions... Tel est le nombre d'enfants âgés entre 6 mois et 5 ans qui souffrent d'une carence chronique en vitamine A, d'après l'OMS. Loin d'être anodine, elle peut conduire à la cécité et à la mort, notamment en rendant ces enfants extrêmement vulnérables à la rougeole et aux diarrhées. Chaque année, ce sont 250.000 à 500.000 chérubins qui deviennent aveugles pour cause de carence en vitamine A. La moitié d'entre eux mourront en moins de 12 mois.

    Quelle serait l'utilité du riz doré ?

    Glaçant. Mais quel peut bien être le rapport avec le riz doré et les OGM ? Le riz doré est un organisme génétiquement modifiéorganisme génétiquement modifié (OGM) pour produire et accumuler du β-carotène dans la partie comestible de son grain. Une fois consommé, le β-carotène est stocké dans les tissus adipeuxtissus adipeux du corps ou transformé en vitamine A. En effet, l'être humain synthétise la vitamine A à partir des caroténoïdescaroténoïdes qu'il ingère, à l'instar du β-carotène naturellement présent dans les carottescarottes, les légumes verts, et certains fruits. Or, les 250 millions d'enfançons subissant cette carence l'ont développée par malnutrition : leur alimentation ne contient pas assez de légumes. Ils font partie des 3 milliards de personnes dont le riz représente 80 % des apports énergétiques.

    L'énigme est facilement résolue. S'ils mangent principalement du riz et pas assez de légumes, deux solutions sautent aux yeuxyeux. La première est de les aider à diversifier leur alimentation. Or, cela signifie de les sortir de la pauvreté. Aussi louable et cruciale soit-elle, cette idée relève du long terme. Et en attendant, ces enfants continuent de perdre la vue et d'embrasser la mort. Inacceptable ! Deux chercheurs ont alors découvert une seconde solution : augmenter la teneur en vitamine A du riz. En 1999, Ingo Potrykus, professeur à l'Institut des sciences agronomiques de l'Institut Fédéral de Technologie suisse, et Peter Beyer, professeur de biologie cellulairebiologie cellulaire au Centre des Biosciences appliquées de l'université de Fribourg en Allemagne, ont permis la création du riz doré.

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    Histoire et controverses du riz doré

    Aujourd'hui, le riz doré est la propriété du Golden Rice Humanitarian Board (Conseil humanitaire du riz doré), un partenariat public-privé. Et depuis 2005, la technologie et la variété de semences sont utilisables. Pourtant, aucun des enfants en ayant besoin n'a pu en bénéficier.

    « <em>Au Bangladesh, en Chine, en Inde et ailleurs en Asie, de nombreux enfants survivent uniquement par le biais de quelques bols de riz par jour</em> », explique Ed Rugis. © Brent Hofacker, Adobe Stock
    « Au Bangladesh, en Chine, en Inde et ailleurs en Asie, de nombreux enfants survivent uniquement par le biais de quelques bols de riz par jour », explique Ed Rugis. © Brent Hofacker, Adobe Stock

    Une solution inaccessible à cause... d'une réglementation obsolète

    D'après l'écrivain scientifique Ed Regis, la cause se trouve dans la réglementation. Et plus précisément dans le ProtocoleProtocole de Cartagena sur la préventionprévention des risques biotechnologiques. Traité international entré en vigueur en 2003, il stipule que les OGM sont dangereux et que leur mise sur le marché (à titre lucratif ou humanitaire) nécessite de prouver leur innocuité. Présomption de culpabilité !

    Pourtant, une méta-analyse de 2013 sur 1.800 études portant sur les OGM conclut à un consensus scientifique : ils ne présentent pas de risques spécifiques comparés aux non OGM. Et leur consommation est sans danger pour l'humain. En 2017, une autre méta-analyse enfonce le clou en concluant que seulement 5 % des publications montrent des effets néfastes de la nourriture OGM. Autrement dit, pour 95 % des études scientifiques, l'alimentation OGM ne présente pas de risques spécifiques comparée à une alimentation non OGM.

    Dans son livre Golden Rice : The Imperiled Birth of a GMO Superfood, Ed Regis s'épouvante du Protocole de Cartagena, rapporte Trust my Science : « De telles réglementations existent en raison des craintes irrationnelles des OGM [...]. Au Bangladesh, en Chine, en Inde et ailleurs en Asie, de nombreux enfants survivent uniquement par le biais de quelques bols de riz par jour [...]. Un approvisionnement quotidien en riz doré pourrait permettre de conserver le cadeau de la vie qu'est la vue. »

    D'autant que le riz doré est d'ores et déjà approuvé par les États-Unis, le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Quand bien même il ne serait pas une solution miracle puisqu'il ne fait que pallier le problème de la pauvreté, le riz doré aurait l'indéniable avantage de ne pas laisser mourir des enfants alors qu'une solution immédiate existe.