Une étude étonnante a montré que l’aversion profonde pour les mathématiques pouvait faire souffrir presque physiquement. En effet, lorsque certaines personnes savent qu’elles vont devoir se confronter à un exercice, les régions du cerveau associées à la douleur et au danger s’activent. Les maths, une phobie comme les autres ?

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    À l'école, les mathématiques peuvent être source de souffrance psychique et, cette étude  le montre, à la limite du physique. Ce n'est pas un hasard si la plupart des personnes anxieuses à l'idée de résoudre une équation évitent cette situation et ne font pas carrière dans les sciences dures. © Genlady, StockFreeImages.com

    À l'école, les mathématiques peuvent être source de souffrance psychique et, cette étude  le montre, à la limite du physique. Ce n'est pas un hasard si la plupart des personnes anxieuses à l'idée de résoudre une équation évitent cette situation et ne font pas carrière dans les sciences dures. © Genlady, StockFreeImages.com

    Et si c'était ça, la vraie bosse des maths ? Chez certains, l'arithmétique est si peu familière qu'ils endurent presque des douleurs physiquesphysiques en pensant avoir à résoudre des exercices. Et si au lieu de donner des devoirs supplémentaires à ces étudiants déjà stressés, on leur préconisait plutôt une thérapie pour se débarrasser de leur phobie ?

    Le contexte : la logique des uns, l’incompréhension des autres

    L'Homme ne naît pas libre et égal en mathématiques. Si certains ont l'esprit logique, d'autres en revanche pataugent complètement lorsqu'on leur propose une équationéquation. Mais on donne la part belle à cette science des nombres dans notre société et les difficultés en algèbre sont parfois mal vécues par les écoliers ou les étudiants.

    La souffrance peut même devenir pathologiquepathologique. Certains développent une anxiété maladive à l'idée de se confronter aux mathématiques. Des chercheurs de l'University of Chicago viennent de montrer que l'anticipation d'un exercice active les régions du cerveau associées à la menace physique et à la douleur. Exactement de la même façon que certains stress psychologiques, comme ceux causés par l'exclusion sociale ou la rupture sentimentale !

    L’étude : l’anticipation des maths provoque la douleur

    Cette recherche publiée dans Plos One se fonde sur un petit effectif. Ils étaient 14 volontaires, tous souffrant d'une hantise des mathématiques. Leur problème a été diagnostiqué à la façon dont ils ont répondu à certaines questions qui leur étaient posées. D'autres analyses ont montré qu'ils ne présentaient pas un niveau d'anxiété élevé en général. Un second groupe doté d'autant d'individus, peu inquiets à l'idée de pratiquer des mathématiques, faisait office de contrôle.

    L'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) permet de voir de manière indirecte les régions du cerveau actives instantanément, en se basant sur les variations du flux sanguin. En orange apparaissent le gyrus angulaire (MCC) et l'insula postérieure (<em>INSp</em>), cette dernière étant sollicitée chez les sujets ayant peur des mathématiques quand on leur annonce qu'ils vont être soumis à un exercice. © Lyons et Beilock, <em>Plos One</em>, cc by 2.5

    L'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) permet de voir de manière indirecte les régions du cerveau actives instantanément, en se basant sur les variations du flux sanguin. En orange apparaissent le gyrus angulaire (MCC) et l'insula postérieure (INSp), cette dernière étant sollicitée chez les sujets ayant peur des mathématiques quand on leur annonce qu'ils vont être soumis à un exercice. © Lyons et Beilock, Plos One, cc by 2.5

    Les sujets passaient sous IRMf de façon à mesurer l'activité du cerveau avant, pendant et après l'exécution de différentes tâches. Celles-ci étaient de deux genres. Soit elles consistaient en de petites questions mathématiques, du genre « vérifier si l'égalité (12 × 4) - 19 = 29 est vraie », soit il s'agissait de jeux de lettres : observer si les lettres présentées formaient un mot en les lisant à l'envers, par exemple. Les participants étaient prévenus à l'avance de ce qui les attendait.

    De façon surprenante, les stressés des mathématiques voyaient la zone postérieure du cortex insulairecortex insulaire s'activer uniquement en anticipation de l'exercice arithmétique, alors qu'elle disparaissait une fois qu'ils avaient l'équation sous les yeuxyeux. Cette région, située au niveau des oreilles et assez profondément ancrée à l'intérieur du cerveau, est associée à la sensation de menace physique et de douleur.

    L'intensité de l'activation dépendait directement du niveau d'anxiété généré par les mathématiques : plus un individu en a peur, plus le cortex insulaire postérieur est sollicité. L'anticipation d'un événement déplaisant se traduit par une sensation de danger.

    L’œil extérieur : les mathématiques, une souffrance psychique

    Cette étude appuie sur un point essentiel : les maths peuvent devenir une souffrance pour l'étudiant à qui on les impose. Face à cette crainte, un élève éprouve évidemment des difficultés à résoudre les exercices et se retrouve parfois obligé de résoudre des équations en plus, pour rattraper son retard. Or, si cette science est perçue comme une phobie, la prise en charge doit en être adaptée.

    Les auteurs supposent que cette anxiété peut se faire ressentir bien longtemps avant que l'événement stressant ne se produise. Si on encadre ces personnes de manière à les désensibiliser à leur peur, d'une part elles le vivront bien mieux, et d'autre part elles auront toutes les chances d'obtenir de meilleurs résultats. CQFD !