Le cancer pourrait devenir dans quelques dizaines d'années la principale cause de décès dans le monde, dépassant les maladies cardiovasculaires qui occupaient selon l'OMS la première marche de ce désolant podium depuis plus de quinze ans. Ce basculement s'opère d'ores et déjà dans les pays à revenu élevé en 2017, d'après deux études.


au sommaire


    Les maladies cardiovasculaires demeurent la principale cause de mortalité dans le monde chez les adultes d'âge moyen, mais le cancer devient la principale cause de décès dans les pays riches, selon deux enquêtes. Il est même « probable que le cancer deviendra la cause la plus courante de décès dans le monde dans quelques décennies », selon les chercheurs.

    Une nouvelle transition épidémiologique

    Sur les quelque 55 millions de décès enregistrés dans le monde en 2017, les maladies cardiaques représentent plus de 40 % des décès, soit environ 17,7 millions de personnes. Les auteurs, dont les travaux sont présentés au Congrès de la Société Européenne de Cardiologie (ESC) à Paris, pointent le lourd tribut payé par les pays pauvres à ces pathologies. Le cancer, deuxième cause de décès la plus fréquente dans le monde en 2017, représente un peu plus du quart (26 %) de tous les décès. Mais dans les pays riches, le cancer tue maintenant 2,5 fois plus de gens que les maladies cardiaques, d'après ces recherches, limitées à 21 pays, parues dans la revue médicale The Lancet. À titre de comparaison, les maladies cardiovasculaires étaient responsables de trois fois plus de décès que le cancer dans les pays à faible revenu.

    Avec 17,7 millions de décès qui leur sont imputables en 2017, les maladies cardiovasculaires demeurent la principale cause de décès dans le monde. Mais dans les pays à revenu élevé (<em>High-income countries</em>), la tendance a changé : le cancer (en bleu) prend la tête du classement en faisant 2,5 fois plus de victimes que les maladies cardiovasculaires (en rouge). © <em>The Lancet</em>
    Avec 17,7 millions de décès qui leur sont imputables en 2017, les maladies cardiovasculaires demeurent la principale cause de décès dans le monde. Mais dans les pays à revenu élevé (High-income countries), la tendance a changé : le cancer (en bleu) prend la tête du classement en faisant 2,5 fois plus de victimes que les maladies cardiovasculaires (en rouge). © The Lancet

    Les maladies cardiovasculaires restent les plus meurtrières à l'échelle globale

    « Le monde assiste à une nouvelle transition épidémiologique (...), les maladies cardiovasculaires n'étant plus la principale cause de décès dans les pays à revenu élevé », selon Gilles Deganais, professeur émérite à l'université Laval, au Québec et co-auteur des deux publications. Mais à mesure que les taux de maladies cardiaques diminuent à l'échelle mondiale, le cancer pourrait devenir la principale cause de décès dans le monde « d'ici quelques décennies seulement », avance-t-il.

    70 % des cas de maladies cardiovasculaires sont dus à des « facteurs de risque modifiables »

    L'étude porteporte sur plus de 160.000 adultes âgés de 35 à 70 ans et suivis sur une décennie (entre 2005 et 2016), dans des pays à revenu élevé, moyen et faible. D'après ce travail, les gens des pays pauvres sont en moyenne 2,5 fois plus susceptibles de mourir d'une maladie cardiaque que ceux des pays riches. Selon le deuxième volet de l'étude, sur les mêmes 21 pays, 70 % des cas de maladies cardiovasculaires sont dus à des « facteurs de risque modifiables ».

    Voir aussi

    Le cancer devrait tuer 1,4 million de personnes en Europe en 2019

    Les facteurs de risque métaboliques - cholestérol élevé, obésitéobésité ou diabètediabète - sont en cause dans plus de 40 % des maladies cardiaques et sont le principal déterminant des maladies dans les pays riches. Dans les pays en développement, les chercheurs relèvent aussi le rôle de la pollution de l'air intérieur, de l'alimentation et du faible niveau d'éducation.

    « Un changement de cap s'impose pour atténuer l'impact disproportionné des maladies cardiovasculaires dans les pays à revenu faible et moyen, souligne Salim Yusuf, professeur de médecine à l'université McMaster. Ces pays doivent investir une plus grande part de leur produit intérieur brutproduit intérieur brut dans la préventionprévention et la gestion des maladies non transmissibles, y compris les maladies cardiovasculaires, plutôt que de se concentrer sur les maladies infectieuses », ajoute-t-il.

    Faisaient partie de l'étude douze pays à revenus intermédiaire selon une classification de 2006 (Argentine, Brésil, Chili, Chine, Colombie, Iran, Malaisie, Palestine, Philippines, Pologne, Turquie et Afrique du Sud) et cinq pays à faible revenu (Bangladesh, Inde, Pakistan, Tanzanie et Zimbabwe). Les quatre pays à revenu élevé pris en compte sont le Canada, l'Arabie saoudite, la Suède et les Émirats Arabes Unis.