Un poisson imite une pieuvre mimétique. Cette association peu probable, filmée en Indonésie, démontre à quel point l’art du mimétisme peut être poussé à l’extrême par certains animaux.  

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    Le poisson Stalix histrio (montré par les flèches rouges) pratiquerait le mimétisme par opportunisme puisqu'il a la même couleur que la pieuvre. Cette association n'est possible que lorsque les aires de répartition des deux espèces se chevauchent. © Ross et al., 2011

    Le poisson Stalix histrio (montré par les flèches rouges) pratiquerait le mimétisme par opportunisme puisqu'il a la même couleur que la pieuvre. Cette association n'est possible que lorsque les aires de répartition des deux espèces se chevauchent. © Ross et al., 2011

    Le mimétisme et le camouflage sont couramment employés par des organismes vivants pour assurer leur survie. Certains insectes ou reptiles ressemblent à des végétaux pour se rendre invisibles aux yeuxyeux de leurs prédateurs. Beaucoup se camouflent, comme le phasme vert ou les caméléons du genre Brookesia. D'autres imitent l'apparence d'organismes toxiques. C'est le mimétisme dit batésien, pratiqué par exemple par tous les papillons mimant leurs congénères du genre Heliconiiae. L'utilisation de ces stratégies adaptatives donne parfois naissance à des situations cocasses.

    La pieuvre mimétique (Thaumoctopus mimicus) vit dans les eaux indonésiennes. Elle est capable d'imiter des poissons toxiques (dont le poisson lion) ou un serpent de mer. Elle y parvient en modulant la forme de son corps avec ses bras et en adaptant son comportement, notamment sa manière d'onduler. Sa coloration blanche et brune accentue les similitudes. Ce comportement lui permet de se déplacer sans risque majeur.

    Les eaux convoitées par la pieuvre abritent également un petit poisson timide et peureux appartenant à l'espèce Stalix histrio (ou black-marble jawfish, en anglais). Il vit sur les fonds sableux constamment à l'affût du moindre prédateur. En cas de danger, il recule brusquement dans un abri dont il ne s'éloigne jamais.

    Un exemple de mimétisme opportuniste

    Mais quel lien peut bien unir ces deux individus ? Grâce à ses couleurscouleurs, le black-marble jawfish est capable de reproduire visuellement l'apparence d'un bras de la pieuvre et de la suivre dans ses moindres déplacements. Il devient ainsi invisible aux yeux des prédateurs et peut donc s'éloigner de son abri sans danger. L'octopode ne semble pas prêter attention à ce profiteur. Dans cette situation, donc, un poisson imite une pieuvre qui elle-même imite un poisson ! 


    Un poisson de l'espèce Stalix histrio suit une pieuvre imitatrice (Thaumoctopus mimicus). Il n'est plus visible pour ses prédateurs et peut donc s'éloigner de son abri. © Godehard Kropp, Youtube

    Cette association étonnante a été filmée par Godehard Kopp de l'université de Gottigen. Rich RossRoss et Luiz Rocha de l'académie des Sciences de Californie ont confirmé l'identité des espèces en présence. Face à cette nouveauté, ces trois scientifiques ont publié un article dans la revue Coral reefs.

    Il s'agirait d'un mimétisme opportuniste. Le black-marble jawfish profiterait de la présence d'une pieuvre ayant les mêmes couleurs que lui pour se comporter de la sorte. Ce type de relation n'avait jamais été décrit auparavant au sein des récifs coralliens.