Le chef du gouvernement a choisi un prix très bas pour la taxe sur les émissions de CO2. A 14 euros la tonne, le tarif veut être un compromis... mais semble finalement mécontenter tout le monde.

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    La campagne est belle... mais les commerces sont loin. © Baasch / Flickr - Licence Creative Common (by-nc-sa 2.0)

    La campagne est belle... mais les commerces sont loin. © Baasch / Flickr - Licence Creative Common (by-nc-sa 2.0)

    Le rapport de la commission dirigée par Michel Rocard préconisait un tarif initial de 32 euros la tonne pour la « Contribution climat-énergie », alias taxe carbone, touchant tous les produits dont l'utilisation relâche dans l'atmosphère du gazgaz carbonique, ou dioxyde de carbone. Applicable la première année (2010 en principe), ce taux serait ensuite augmenté de 5% par an jusqu'à atteindre 100 euros la tonne en 2030. Cette taxe touchera principalement les carburants, pour le chauffage et pour le transport.

    Présente dans la charte de la Fondation Hulot, prévue dans le Grenelle de l'environnement, cette imposition est censée orienter les pratiques des ménages et des industriels, mais aussi l'offre commerciale, vers des produits et des comportements émettant moins de carbone.

    Dès la publication du rapport, des membres du gouvernement avaient pris la parole pour assurer que cet impôt supplémentaire ne viendrait pas alourdir la fiscalité globale et que des remboursements seraient envisagés pour compenser l'injustice faite à de nombreux ménages. Pour la moitié d'entre eux, selon une estimation réalisée, la mesure, en effet, devrait coûter 300 euros par an, essentiellement à cause d'une augmentation de 7,7 centimes pour le litre d'essence, de 8,5 centimes pour le gazole et de 15% pour la facture de gaz.

    L'injustice vient de ce qu'il n'est pas toujours possible de se passer de son véhicule, notamment en milieu rural. Prendre son vélo pour aller faire ses courses au centre commercial situé à quinze kilomètres reste utopique...

    « Injustice » : l'accusation la plus fréquente

    Il était déjà question d'un tarif inférieur aux 32 euros et d'exempter de taxe l'électricité. Finalement, le Premier Ministre, dans une interview au Figaro Magazine, vient d'annoncer la note : 14 euros et 0 pour l'électricité. La charge pour les ménages sera donc allégée, l'augmentation du prix de l'essence à la pompe se réduisant à 2 ou 3 centimes. Mais le principe de cet impôt écologique est conservé. Le compromis semble très politiquement calculé pour donner un gage aux défenseurs de l'environnement, qui ont pesé lourd aux dernières élections européennes, aux industriels et aux agriculteurs, qui ne voient pas la taxe d'un bon œilœil, et aux consommateurs en général, qui la perçoivent comme un impôt de plus.

    Les écologistes, eux, sont mécontents. Au micro d'Europe 1, Nicolas HulotNicolas Hulot parle d'une autre injustice, qui se ferait jour « si l'on ne fait rien ». « Si on livre à la crise énergétique et à la crise climatique les plus exposés, c'est eux qui seront frappés en premier. » Au PSPS, on critique également cette taxe « inefficace et injuste », qui exclut « les groupes industriels les plus pollueurs ». Mais Ségolène Royal a semé le trouble en s'opposant au principe même de la taxe, qu'elle avait pourtant fait sien durant sa campagne électorale des élections présidentielles.

    A 14 euros, l'addition sera moins lourde mais les comportements changeront-ils ? Un tarif trop faible rend la taxe inefficace, laquelle, alors, devient effectivement un simple impôt supplémentaire...

    L'histoire n'est pas terminée puisque la décision finale revient au Président de la République, qui a invité immédiatement Cécile Duflot, secrétaire nationale des Verts, « pour diviser l'union entre PS et Verts » dit-on à gauche. Bref, la décision reste apparemment très politicienne. Nicolas Hulot, lui, émet l'idée d'inscrire ce projet dans une modification de la loi de finances, ce qui, explique-t-il, permettrait « de gagner deux mois » et de lancer un débat productif au sein de la classe politique.