Pourquoi la Terre s'est-elle tant refroidie il y a environ 450 millions d'années, à la fin de l'Ordovicien ? Parce que les plantes ont colonisé les continents et fortement contribué à réduire la quantité de dioxyde de carbone atmosphérique, diminuant donc l'effet de serre.

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    Il faisait bien chaud sur Terre au début de l'Ordovicien, il y a environ 488 millions d'années. Et sous l'eau aussi, où la température avoisinait les 45 °C. Mais 44 millions d'années plus tard, à la fin de cette ère, la Terre a subi une période de glaciation. Qu'est-ce qui a pu rafraîchir notre planète ? Très probablement les plantes terrestres, dont les premiers spécimens, qui s'accrochaient aux rochers, sont apparus à cette époque.

    Si la Terre était si chaude, c'est parce que la teneur en CO2 y était très élevée. Au début de l'Ordovicien, elle était 14 à 22 fois plus élevée qu'actuellement. Or, estiment les scientifiques, dans les conditions de l'époque, une glaciationglaciation ne pouvait se produire que si la teneur en CO2 était inférieure de 8 fois à celle de l'atmosphère présente.

    Ordovicien : l'altération des roches par les plantes terrestres

    Plusieurs facteurs ont mené à la baisse de cette concentration, selon les travaux des scientifiques des universités d’Oxford et East Anglia publiés dans Nature Geoscience. Tout d'abord, l'altération des roches siliceuses a été accélérée par l'arrivée des plantes terrestres. À cette époque, elles ne possédaient pas de système racinaire. Mais les chercheurs supposent qu'elles étaient capables d'extraire les différents éléments contenus au sein des roches.

    Les chercheurs ont testé l'altération des roches par une mousse sur du granite. À gauche la mousse s'est développée (à droite : témoin) en altérant la roche (temps de l'expérience : 130 jours). © Lenton <em>et al. </em>2012, <em>Nature Geoscience</em>

    Les chercheurs ont testé l'altération des roches par une mousse sur du granite. À gauche la mousse s'est développée (à droite : témoin) en altérant la roche (temps de l'expérience : 130 jours). © Lenton et al. 2012, Nature Geoscience

    Les plantes auraient ainsi puisé le calciumcalcium et le magnésiummagnésium des roches siliceuses, comme le granite, issus de l'altération des roches siliceuses. En effet, le dioxyde de carbone réagit avec l'eau et la roche pour former du bicarbonatebicarbonate de calcium. Ce phénomène d'altération de la roche consomme donc du CO2. Et comme il s'agit d'un gaz à effet de serre, la diminution de sa quantité dans l'atmosphère a contribué au refroidissement global.

    L'altération des roches par l'atmosphère (qu'on appelle aussi météorisation) aurait également été à l'origine de l'extraction de nutrimentsnutriments comme le phosphorephosphore ou le ferfer, utiles à la croissance des végétaux. Des expériences montrent que la présence de moussemousse (organisme assez similaire aux plantes de l'époque) accélère fortement cette dégradation des roches, d'un facteur 60 pour le phosphore !

    Fertilisation de l'océan et piégeage du carbone

    À la mort des plantes, le phosphore et le fer sont entraînés vers l'océan, ce qui accélère la croissance des alguesalgues et du phytoplanctonphytoplancton. Du carbone - initialement contenu dans l'airair - est également indispensable au planctonplancton afin de se développer. Ainsi, plus les plantes terrestres parviennent à extraire de fer et de phosphore, plus la quantité de dioxyde de carbone emprisonnée sur le fond des océans augmente. Ceci réduit in fine la concentration atmosphérique de dioxyde de carbone.

    Selon les chercheurs, c'est l'ensemble de ces processus qui aurait mené à une réduction de la température atmosphérique de plus de 5 °C, puis à la période de glaciation de la fin de l'Ordovicien. Le développement massif du plancton aurait également privé les autres organismes marins d'oxygène, provoquant une extinction massive à la fin de l'Ordovicien.

    Pourquoi la Terre s'est-elle ensuite réchauffée ? Voilà un autre mystère. Il semblerait que des phénomènes géologiques - le mouvementmouvement des plaques notamment - soient cette fois en jeu. Mais comme cela vient d'être démontré, ce sont parfois les phénomènes biologiques qui permettent d'élucider les énigmes du passé.