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Le cancer touche 350.000 personnes par an en France et il est la première cause de mortalité. Malgré les multiples visages de cette maladie, les travaux de recherche des trente dernières années ont permis de définir des points communs aux cancers.
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Le cancer touche 350.000 personnes par an en France et il est la première cause de mortalité. Malgré les multiples visages de cette maladie, les travaux de recherche des trente dernières années ont permis de définir des points communs aux cancers.
Notre organisme possède un nombre de cellules finement régulé ce qui contribue à l'équilibre des tissus. Les cellules cancéreuses quant à elles se multiplient en permanence, leur prolifération est incontrôlée : c'est une caractéristique universelle et majeure des cancers.
Dans l'organisme, les cellules ne prolifèrent que si des signaux extérieurs de prolifération le permettent. Ces signaux proviennent de communications avec d'autres cellules ce qui permet une entente entre les cellules et participe à l'équilibre des tissus. La capacité principale des cellules cancéreuses est de proliférer fortement et de manière autonome, sans dépendre des communications qui régulent normalement la prolifération cellulaire. Elles ne respectent plus l'équilibre du tissu dont elles font partie. Cette prolifération incontrôlée et surstimulée fait émerger un nouveau tissu de structure anarchique : le tissu tumoral. Nous allons nous intéresser au mécanisme de la prolifération cellulaire en détail afin de situer les points de contrôle que la cellule cancéreuse détourne à son profit.
Une cellule normale ne prolifère que si elle reçoit les signaux de prolifération adéquats.
Une cellule peut recevoir différents types de signaux en provenance d'autres cellules qui activent sa prolifération. Ces signaux sont portés par les facteurs de croissance, comme le facteur de croissance épithélial EGF (Epithelial Growth Factor) qui active la prolifération des cellules épithéliales (Figure 8).
L'EGF est une protéine extracellulaire qui représente un signal de prolifération. Elle se lie à son récepteur présent à la surface des cellules épithéliales, l'EGFR (récepteur de l'EGF). Cette liaison active l'EGFR qui déclenche dans la cellule une cascade d'activations en chaîne de plusieurs protéines signalisatrices. Ces protéines s'organisent en une voie de signalisation de la prolifération appelée voie mitogène. La signalisation parvient jusqu'au noyau de la cellule où se trouve le génome. La voie mitogène active alors l'expression des gènes de la prolifération cellulaire. Les protéines qui orchestrent la prolifération cellulaire sont synthétisées : la cellule se multiplie en réponse au signal de prolifération porté par l'EGF.
La prolifération est contrôlée au niveau du cycle cellulaire qui représente l'ensemble des étapes que doit effectuer une cellule pour générer deux cellules filles.
Le contrôle de la prolifération s'effectue au cours du cycle cellulaire (Figure 9). Le cycle cellulaire regroupe les différentes phases qui permettent à une cellule de générer deux cellules filles :
Ces cellules peuvent chacune recommencer un cycle cellulaire si les signaux de prolifération le permettent. Le déroulement du cycle cellulaire est vérifié au niveau de points de contrôle placés pendant les phases du cycle cellulaire. Ils déterminent si le cycle cellulaire peut progresser au sein d'une phase ou s'il peut passer à la phase suivante.
Le premier point de contrôle du cycle cellulaire, le point de restriction, se situe en phase G1 et décide si un nouveau cycle cellulaire doit être lancé par la cellule (Figure 9). La protéine gardienne du point de restriction est la protéine Rb. Elle détecte si les signaux de prolifération reçus par la cellule justifient par leur intensité l'initiation d'un cycle cellulaire. Si les signaux de prolifération sont suffisamment intenses, ils inactivent Rb, ce qui permet l'expression des gènes de la prolifération et par conséquent l'entrée de la cellule dans un nouveau cycle cellulaire.
Après l'inactivation de Rb, la cellule entre en phase S qui correspond à la phase de duplication de l'ADN. Pendant cette phase, le génome est dupliqué c'est-à-dire qu'il est copié par le système de réplication de l'ADN pour qu'il y ait deux copies du génome dans la cellule mère. La cellule mère pourra ainsi donner naissance à deux cellules filles qui posséderont chacune une copie du génome. Le point de contrôle de la phase S est activé lorsque des dommages de l'ADN sont détectés ou lorsque le système de réplication de l'ADN est bloqué. L'activation du point de contrôle arrête temporairement le cycle cellulaire. Il n'est désactivé que lorsque les anomalies détectées sont résolues, ce qui autorise la reprise du cycle.
En phase G2, la cellule finalise la duplication du génome et répare les derniers dommages éventuellement présents sur l'ADN, ce qui est vérifié par le point de contrôle de la transition entre la phase G2 et la phase M (point de contrôle G2/M). Une fois la duplication et la réparation de l'ADN terminées, le point de contrôle G2/M est inactivé et la cellule entre en phase M. Les deux copies du génome de la cellule mère sont séparées pour former le noyau de chaque cellule fille. Enfin, la cellule mère se scinde progressivement en son centre pour finalement donner naissance à deux cellules filles qui reviennent chacune en phase G1.