Une étude néerlandaise s’est penchée sur les conséquences d’un dépistage du cancer du sein entre 70 et 75 ans. Beaucoup de tumeurs précoces qui n’impactent pas forcément l’espérance de vie des femmes sont détectées.

au sommaire


    Après 70 ans, le dépistage systématique du cancer du sein donnerait lieu à de nombreux surdiagnostics. © NIH, Wikimedia Commons, DP

    Après 70 ans, le dépistage systématique du cancer du sein donnerait lieu à de nombreux surdiagnostics. © NIH, Wikimedia Commons, DP

    De tous, le cancer du sein est le premier diagnostiqué chez la femme. Étant donné l'allongement de l'espérance de vie, la proportion de femmes âgées avec un cancer du sein est amenée à augmenter. En France, le dépistage organisé du cancer du sein convie les personnes de sexe féminin âgées de 50 à 74 ans à une mammographie tous les deux ans. Celles ayant des antécédents familiaux sont généralement invitées à le faire plus tôt.

    En 1998, les Pays-Bas ont décidé d'étendre le dépistage systématique aux femmes jusqu'à 75 ans, au lieu de 69 précédemment. C'est pourquoi des chercheurs de l'université de Leyde ont voulu comparer les diagnostics avant et après 1998, pour savoir si le relèvement de l'âge avait eu des effets positifs. Leurs résultats paraissent dans BMJ. Ils portent sur 25.500 femmes diagnostiquées avec un cancer du sein entre 70 et 80 ans, entre 1995 et 2011.

    Résultats : l'incidenceincidence de tumeurs précoces a augmenté de manière significative lors de l'allongement du dépistage, passant de 248,7 cas pour 100.000 femmes à 362,9. Mais l'incidence des stades avancés n'a pas diminué dans les mêmes proportions : il est passé de 58,6 cas pour 100.000 femmes à 51,8. Conclusion des auteurs : le fait de relever la limite d'âge à 75 ans pour le dépistage n'a permis qu'une faible diminution de l'incidence des cancers de stade avancé, alors que le nombre de tumeurstumeurs précoces a fortement augmenté.

    Évolution des tumeurs au stade précoce (en bleu) ou avancé (en rouge) diagnostiquées chez les 70-75 ans. © de Glas et 2014, BMJ

    Évolution des tumeurs au stade précoce (en bleu) ou avancé (en rouge) diagnostiquées chez les 70-75 ans. © de Glas et 2014, BMJ

    Les femmes âgées supportent moins bien les traitements anti-cancer

    D'après les chercheurs, le fait de tester régulièrement les femmes entre 69 et 74 ans conduit à détecter de nombreuses petites tumeurs sans effet sur l'espérance de vie. Pour Gerrit Jan-Liefers, un des auteurs de l'article, « Les risques dépassent le bénéfice de détecter un cancer ». Il ne serait donc pas indispensable de poursuivre le dépistage après 70 ans : « Vous allez faire du mal à plus de femmes que vous ne ferez du bien. Vous finissez par diagnostiquer des femmes âgées avec un cancer du sein qui ne va pas du tout affecter leur espérance de vie ».

    Le traitement de ces petites tumeurs implique des chirurgieschirurgies, chimiothérapieschimiothérapies et radiothérapiesradiothérapies. C'est pourquoi ce dépistage après 70 ans favoriserait un surtraitement. Or, les femmes âgées sont plus vulnérables aux effets secondaires des traitements anti-cancers : douleurdouleur, fatigue, perte de mobilité... Elles mettraient près de 18 mois pour se rétablir complètement. L'annonce d'un cancer du sein cause aussi de l'anxiété, surtout chez celles qui ont déjà des problèmes de santé. Le surdiagnostic et le surtraitement ont donc un impact important sur la qualité de vie des femmes.

    Enfin, les traitements de tumeurs surdiagnostiquées augmentent les coûts de santé sans bénéfices avérés. Les auteurs soulignent aussi qu'il n'existe pas de preuves des bénéfices d'un dépistage pour les femmes âgées, car les essais cliniquesessais cliniques concernent rarement des femmes de plus de 60 ans.