L'OMS, l'Organisation mondiale de la santé, ferait-elle la promotion des médecines alternatives ? Ces dernières, décriées en raison de leur inefficacité, voire de leur dangerosité, font l'objet d'un regain d'intérêt de la part de l'institution. Le but ? Élargir l'accès de la population mondiale aux soins... même si ceux-ci n'ont aucune base scientifique.
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La très sérieuse Organisation Mondiale de la SantéOrganisation Mondiale de la Santé ferait-elle la promotion de pseudo-sciences pour faire gonfler ses chiffres ? Il semblerait que oui. Preuve à l'appui : un document daté de 2023, dénoncé par the Office for Science and Society dans un article traduit par l’Association Française pour l’Information Scientifique et intitulé « Critères de référence de l’OMS pour la formation en médecine anthroposophique ». La médecine anthroposophique ? Une forme de médecine alternative qui trouve ses origines dans la philosophie de l'anthroposophie développée par Rudolf Steiner au début du 20e siècle, et qui considère - entre autres - les maladies comme des déséquilibres entre les différentes dimensions de l'être humain, et cherchent à rétablir l'harmonie en utilisant diverses thérapies non-validées scientifiquement.
Un glossaire de termes pseudo-scientifiques qui ne passe pas
Le document en tant que tel se veut dans la continuité de la politique de l'organisation, qui entend légitimer la médecine traditionnelle comme pratique complémentaire à la médecine conventionnelle dont l'efficacité est scientifiquement prouvée. À l'intérieur, on y trouve notamment un glossaire, proposant la définition de divers termes. Par exemple, on peut y lire que « l'âme, dans la conception anthroposophique, est étroitement liée à l'organisation astrale et en découle », mais aussi que « Selon la conception anthroposophique, la vie peut être différenciée en sept processus : respirer, réchauffer, nourrir, sécréter, entretenir, croître et se reproduire », ou même que « dans la conception anthroposophique, la perception sensorielle est classée en douze modalités principales : le toucher, la vie, le mouvementmouvement, l'équilibre, l'odorat, le goût, la vue, la température et la chaleurchaleur, l'ouïe, la parole et le langage, la pensée et le sens de l'individualité intérieure ("je")) de l'autre être humain.»
Le bruit blanc a-t-il des bénéfices pour la santé ou est-il un simple placebo ? La réponse avec Emma Hollen dans cet épisode documentaire d'INFRA. © Futura
De quoi faire bondir le scientifique et vulgarisateur Jonathan Jarry, auteur de l'article sur le site de l'AFIS, qui s'indigne de la présence d'un tel document dans les ressources de la référence mondiale absolue en matièrematière de santé. Si on peut effectivement s'en étonner, l'explication est pourtant simple : un des objectifs l'OMS est de généraliser l'accès aux soins et à la santé pour l'ensemble de la population humaine. Un objectif extrêmement ambitieux et inatteignable actuellement, puisque cela impliquerait la présence de médecins formés dans les régions les plus isolées du monde, que ce soit à cause de leur position géographique, de leur situation géopolitique ou d'un manque de moyens et de technologies.
« Comment peut-on réglementer de la magie ? »
« L'OMS souhaite voir ces pratiques préscientifiques de guérison intégrées dans les systèmes de santé nationaux afin de contribuer à la couverture sanitaire universelle qu'elle promeut », explique Jonathan Jarry dans son article. Or, ces pratiques sont, pour beaucoup, décriées car leur inefficacité a été démontrées - c'est par exemple le cas de l’homéopathie - voire parce qu'elles peuvent présenter un danger pour la santé - notamment lorsque des patients atteints de maladies graves et en situation de fragilité se tournent vers ces pseudo-médecines au détriment de traitements qui pourraient leur sauver la vie.
À cela, l'OMS répond que « l'objectif de cette série de points de référence pour divers systèmes et interventions de la médecine traditionnelle, complémentaire et intégrative est de fournir un point de référence pour l'évaluation de la pratique et des praticiens. » En bref : un guide permettant de distinguer le « vrai » praticien du charlatan. « On pourrait faire valoir que l'OMS cherche à améliorer les standards de qualité de ces pratiques pseudo-scientifiques en exigeant un minimum de réglementation et de standardisation. Mais comment peut-on réglementer la magie ? », s'interroge fort à propos Jonathan Jarry. Une nécessaire mise en lumièrelumière d'une politique risquée par une institution de première importance mondiale, qui rappelle les dangers de promouvoir le respect de traditions ancestrales au mépris de la sécurité sanitaire et dénonce les manœuvres des praticiens de médecines alternatives dans leur volonté d'acquérir une légitimité scientifique a priori impossible à obtenir.