En Afrique sahélienne, la transmission du paludisme est très saisonnière. Pendant une courte période de quelques mois, au cours de la saison des pluies, la mortalité et la morbidité dues au paludisme sont très élevées chez les enfants de moins de 5 ans.

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    Vue d'un village sahélien pendant la saison sèche,zone d'étude de Niakhar, Sénégal©IRD/Jean-François Trape

    Vue d'un village sahélien pendant la saison sèche,zone d'étude de Niakhar, Sénégal©IRD/Jean-François Trape

    Au Sénégal, une équipe de l'IRDIRD vient de tester avec succès l'efficacité d'une nouvelle approche pour prévenir le pic annuel de morbidité et de mortalité dues au paludisme : le traitement antipaludique préventif intermittent saisonnier. L'association artésunate et sulfadoxine-pyriméthamine a été administrée une fois par mois, pendant trois mois, à 1203 enfants âgés de moins de 5 ans, sans test préalable d'infection paludique, à des dates choisies de façon à couvrir l'ensemble de la période habituelle de survenue de la maladie. Les enfants ont été divisés en deux groupes detaille égale, un traité et un témoin recevant un placeboplacebo. Seulement 39 épisodes de paludisme ont été dénombrés dans le groupe traité, contre 222 dans le groupe témoin, soit une efficacité protectrice de 86 %. Cette nouvelle approche procure des résultats particulièrement intéressants pour la diminution de la première cause de mortalité de l'enfant en Afrique sahélienne.

    Selon l'Organisation Mondiale de la SantéOrganisation Mondiale de la Santé, 90 % des morts du paludisme sont observés en Afrique tropicale et concernent principalement des enfants de moins de 5 ans. De un à trois millions de morts surviennent chaque année et la situation ne cesse de se dégrader du fait du développement de résistancesrésistances aux médicaments.

    La perte d'efficacité des antipaludiques a mis en avant non seulement le besoin de nouveaux traitements antipaludiques, mais aussi la nécessité de développer de nouvelles approches pour prévenir l'infection, particulièrement chez les jeunes enfants. Une voie explorée actuellement par l'OMS et l'UNICEF consiste à administrer de façon standardisée, aux femmes enceintes et aux nourrissons, une dose thérapeutique d'antipaludiques lors des visites prénatales et des séances de vaccinations. Il s'agit du traitement préventif intermittent (TPI), qui a donné de bons résultats chez les femmes enceintes, mais qui n'avait pas encore été testé chez les enfants résidant en zone de paludisme saisonnier, pour lesquels le risque de mourir du paludisme reste très élevé jusqu'à l'âge de cinq ans.

    Une équipe de chercheurs de l'IRD, associée à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar et à la London School of Hygiene and Tropical Medicine, a réalisé une étude évaluant l'efficacité d'une nouvelle approche pour prévenir le pic annuel en zone sahélienne. Grâce à un traitement préventif intermittent, une association, à base de dérivés de l'artémisinine, a été administrée en trois prises annuellesannuelles à l'ensemble des enfants de moins de cinq ans, en fonction du calendrier des pluies, et non pas de celui des vaccinations. Financée par la fondation Bill et Melinda Gates, cette étude a été effectuée chez des enfants résidant en zone de transmission saisonnière courte du paludisme, à Niakhar, région rurale située à 150 kilomètres de Dakar.

    Pour évaluer l'effet du traitement préventif intermittent sur la morbidité due au paludisme, les chercheurs ont réalisé une étude "randomisée en double aveugle contre placebo" dans trois centres de santé. 1136 enfants âgés de 2 à 59 mois ont reçu soit de l'artesunate associé à de la sulfadoxine-pyrimethamine, soit un placebo, une fois par mois, pendant trois mois de septembre à novembre, au moment du pic annuel de morbidité et de mortalité palustres dans cette région du Sénégal. La mesure de l'efficacité de traitement a été basée sur la comparaison entre les deux groupes par le recensement des cas de paludisme.

    Au cours des 13 semaines de suivi, 39 accès palustres ont été rapportés chez les enfants traités contre 222 chez les témoins, soit une réduction de 86 % du nombre d'accès palustres chez les enfants ayant bénéficié du traitement préventif. L'intervention a été bien tolérée, avec seulement quelques cas de vomissements chez les enfants lors du traitement.

    Les résultats de cet essai montrent que ce traitement confère une remarquable protection contre le paludisme chez les jeunes enfants, ceci dans un environnement de transmission saisonnière où des niveaux très élevés de mortalité palustre sont régulièrement observés chaque année pendant quelques mois au cours de la saisonsaison des pluies.

    Ce traitement préventif intermittent est en grande partie assimilable à une chimioprophylaxie espacée, à dose thérapeutique et de courte duréedurée. Du fait du petit nombre de prises d'antipaludiques sur lequel repose cette nouvelle approche pour prévenir le paludisme, son coût est modeste et sa mise en oeuvre facilitée. Combinant deux antipaludiques différents les souches chimio-résistantes du parasiteparasite ne devraient pas apparaître trop rapidement.