En ce mois de janvier 2018, le volcan Mayon menace toujours les populations des Philippines. Le risque est élevé, avec des possibilités de coulées pyroclastiques. Pourtant, la Terre connaît parfois bien pire : les superéruptions volcaniques, qui rejettent des milliards de tonnes de cendres dans l’air et peuvent menacer notre civilisation. L'an dernier, une étude indiquait que l'intervalle moyen de temps entre deux superéruptions serait plus court que ce que l'on pensait.

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    Article paru le 30 novembre 2017

    Les superéruptions volcaniques sont susceptibles de se produire plus fréquemment qu'on ne le pensait, affirme une étude basée sur des données statistiques. Une équipe de l'université d'Oxford (Royaume-Uni) a en effet calculé que le laps de temps estimé entre deux superéruptions serait en moyenne d'environ 17.000 ans. « C'est substantiellement plus court que les estimations précédentes », souligne cette étude parue mercredi dans la revue Earth and Planetary Science Letters.

    Cela « indique que les volcans représentent pour notre civilisation humaine un risque plus grand qu'on ne le pensait », ajoute le texte. Les précédentes estimations de fréquence de ces cataclysmes, réalisées en 2004, considéraient que les superéruptions se produisaient en moyenne tous les 45.000 à 714.000 ans, indique Jonathan Rougier, professeur de sciences statistiques à l'université d'Oxford et principal auteur de l'étude.

    « Nous avons réévalué cet intervalle que nous situons désormais entre 5.000 et 48.000 ans, la fréquence la plus probable étant de 17.000 ans », ajoute-t-il. Les superéruptions sont donc « beaucoup plus fréquentes qu'on ne le pensait précédemment tout en restant très rares », déclare ce chercheur à l'AFP.

    Le saviez-vous ?

    Les volcanologues qualifient de superéruptions les gigantesques éruptions explosives capables de rejeter au moins 1.000 gigatonnes (mille milliards de tonnes) de matière volcanique dans l'atmosphère. Soit assez pour recouvrir de cendres un continent, assombrir le ciel durablement et refroidir le climat de la planète pour des décennies.

    La dernière superéruption recensée sur la planète est celle du Taupo, en Nouvelle-Zélande, il y a environ 25.000 ans. Il y a eu également celle de Aira, au Japon, il y a quelque 27.000 ans. Chacune avait éjecté environ 1.000 gigatonnes de débris et de cendres dans l'airair. « D'une certaine façon, nous avons eu de la chance de ne pas avoir connu de superéruption depuis », relève Jonathan Rougier. « Mais cela ne veut pas dire pour autant que la prochaine superéruption est en retard. La nature n'est pas si régulière », tient-il à souligner.

    Le mont Agung en éruption à Bali, en Indonésie, le 28 novembre 2017. © SONNY TUMBELAKA, AFP

    Le mont Agung en éruption à Bali, en Indonésie, le 28 novembre 2017. © SONNY TUMBELAKA, AFP

    La plupart de ces supervolcans sont éteints

    Les scientifiques ont travaillé à partir d'une base de donnéesbase de données géologiques portant sur les derniers 100.000 ans. Au cours de cette période, l'éruption la plus importante a été celle du Toba, en Indonésie, il y a environ 75.000 ans. Le volcan, en explosant, a éjecté 10.000 gigatonnes de matièrematière. Cela a provoqué un hiver volcanique suivi d'un refroidissement global de la planète extrêmement long.

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    La plupart des supervolcans de la planète sont éteints. Mais ce n'est pas le cas du Yellowstone, aux États-Unis, qui a connu plusieurs superéruptions, dont la dernière date d'il y a 630.000 ans. Le mont Agung, à Bali, qui vient d'entrer en éruption, est un volcan de type explosif, mais il n'est pas considéré comme un supervolcan. Il a connu deux grandes explosions, en 1843 et 1963, rejetant environ une gigatonne de matière (un milliard de tonnes). Son éruption, il y a cinquante-quatre ans, avait fait 1.600 morts et provoqué une baisse des températures de 0,2 à 0,3 °C pendant environ un an. « Le mont Agung possède une chambre magmatique qui est trop petite pour produire une superéruption », relève David Rothery, professeur de géosciences à l'Open University (Royaume-Uni).

    La nature, y compris pour les éruptions volcaniques, ne fonctionne pas forcément comme une horloge.

    Dans un commentaire sur l'étude, il se dit « d'accord » avec le fait que les superéruptions soient « plus fréquentes qu'on ne le pensait ». Marc Reichow, de l'université de Leicester (Royaume-Uni), souligne que l'article est signé par des scientifiques respectés.

    Leur approche est « robuste » et « va certainement nous aider à comprendre et à prédire de futures éruptions. Toutefois, la nature, y compris pour les éruptions volcaniqueséruptions volcaniques, ne fonctionne pas forcément comme une horloge ».

    David Pyle, professeur de sciences de la TerreTerre à l'université d'Oxford, tient à souligner qu'après cette étude, « Yellowstone n'est pas plus proche d'entrer en éruption aujourd'hui qu'il ne l'était hier. Le plus probable, c'est qu'il n'y aura pas d'autre superéruption sur Terre avant des milliers d'années ».