Si la genèse des diamants est désormais plutôt bien comprise, les processus permettant la remontée de ces cristaux formés à grande profondeur dans le manteau font encore débat. Une nouvelle étude montre cependant qu’ils seraient arrivés en surface via de puissantes éruptions alimentées par d’immenses colonnes de chaleur s’enracinant à la surface du noyau terrestre.


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    Si les diamantsdiamants sont si précieux, ce n'est pas seulement pour leur éclat, mais surtout pour leur rareté. Les diamants se forment en effet dans des conditions bien particulières, dans les entrailles de la Terre. Pour les trouver il faut ainsi traquer des roches volcaniques bien spécifiques : les kimberlites. Ces roches ultrabasiquesultrabasiques (à faible teneur en silice) sont exceptionnellement riches en éléments volatils (H20 et CO2). Aucune éruption de kimberlite n'a été observée par l'Homme mais cette composition chimique suggère que leur mise en place est brutale et associée à une activité volcanique très explosive, avec une remontée excessivement rapide de magma.

    Kimberlite. © Woudloper, Wikimedia Commons, CC by-sa 1.0
    Kimberlite. © Woudloper, Wikimedia Commons, CC by-sa 1.0

    Des roches que l’on ne retrouve pas partout

    Actuellement, les kimberlites sont retrouvées sous la forme de grands dykes ou « pipes », sortes de cheminéescheminées verticales ayant alimenté en magmamagma d'anciennes éruptions volcaniqueséruptions volcaniques. Les diamants y sont retrouvés en inclusion. Des centaines de sites de ce genre ont été identifiées, la plupart au Canada, en Afrique du Sud, en Angola et au Brésil, des régions où la croûte continentalecroûte continentale est très ancienne. Cette répartition géographique a longtemps intrigué les scientifiques et laisse supposer un lien avec l'origine des magmas en profondeur. Cependant, les processus à l'origine des kimberlites sont encore très mal compris.

    Schéma d'un dyke volcanique donnant naissance aux gisements de kimberlite contenant des diamants. © Asbestos, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0
    Schéma d'un dyke volcanique donnant naissance aux gisements de kimberlite contenant des diamants. © Asbestos, Wikimedia Commons, CC by-sa 3.0

    Depuis plusieurs décennies, il est proposé que les kimberlites soient associées à une remontée rapide de matériel chaud à travers le manteau et que ces panaches prendraient leur origine dans les entrailles de la Terre, à la limite noyau-manteau, soit vers 2 900 kilomètres de profondeur. Mais pas n'importe où cependant. En 2010, des chercheurs proposaient que ces grands panaches soient enracinés sur le pourtour de deux superstructures tapies au fond du manteau, l’une sous l’Afrique et l’autre sous le Pacifique et nommées LLSVP (Large Low-Shear-Velocity Province). Si l'origine et la nature de ces « blobsblobs » sont encore débattues, ils semblent être la source des grands volcans de points chauds qui parsèment notamment l’océan Indien. Il est ainsi suggéré que cette activité profonde ait été également la source du volcanismevolcanisme kimberlitique. Restait à comprendre comment la chaleurchaleur était transportée de ces grandes profondeurs jusqu'en surface, sur près de 2 900 kilomètres.

    D’immenses colonnes de chaleur remontant depuis la base du manteau

    Une nouvelle étude publiée dans la revue Nature Geoscience apporte des éléments de réponse à cette question, grâce à l'utilisation de supercalculateurssupercalculateurs ayant permis de produire des modèles géodynamiques complexes et en trois dimensions du manteau terrestremanteau terrestre. Ces modèles prennent en compte la dynamique du manteau, mais également le mouvementmouvement des continents au cours du dernier milliard d'années.

    Les résultats montrent que les kimberlites sont produites par la remontée d'immenses colonnes de chaleur s'enracinant à la base du manteau et permettant la génération de magma entre 450 et 150 kilomètres de profondeur. C'est dans la partie centrale de ces colonnes de chaleur que le matériel mantellique remonterait le plus rapidement, transportant les éléments les plus denses vers la surface. Ce mécanisme expliquerait ainsi la composition chimique si particulière des kimberlites.

    Schéma de la colonne de chaleur s'enracinant à la base du manteau et s'élevant vers la surface pour alimenter la production de magma à l'origine des kimberlite. © Ömer F. Bodur
    Schéma de la colonne de chaleur s'enracinant à la base du manteau et s'élevant vers la surface pour alimenter la production de magma à l'origine des kimberlite. © Ömer F. Bodur

    Il faut noter que les diamants que l'on retrouve dans les pipes de kimberlite ne se sont pas formés en même temps que le magma à l'origine de ces éruptions. Ces cristaux sont bien plus anciens. Leur genèse est liée à un processus métasomatique (réactions impliquant des fluides) à une profondeur habituellement de 150 à 250 kilomètres, même si certains spécimens proviennent de zones bien plus profondes du manteau. Leur arrivée en surface est cependant directement associée à des épisodes volcaniques, la remontée rapide des magmas entraînant les diamants avec eux et les scellant dans les kimberlites lors du refroidissement et de la cristallisation de la roche.

    Le modèle permet d'expliquer quasiment toutes les éruptions de ce type survenues au cours des 200 derniers millions d'années et observées à travers le globe. Il suggère également la présence de gisementsgisements encore non découverts en AntarctiqueAntarctique et dans l'ouest de l'Australie.