La COP28 se déroulera à Dubaï, aux Émirats arabes unis, du 30 novembre au 12 décembre prochain. Une 28e COP, après 27 autres conférences qui n'ont pas encore permis d'arrêter le réchauffement climatique, ni même de ralentir son rythme. Peut-on encore croire à l'intérêt de la conférence internationale de l'Organisation des Nations unies sur le changement climatique ? Nous avons décidé d'interroger les plus éminents climatologues sur le sujet dans une série d'articles.
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Le premier scientifique qui nous a confié ses espoirs et attentes est Davide Faranda, climatologueclimatologue et chercheur au CNRS pour le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE). Cet Italien, qui travaille en France, dirige également Climameter, un organisme qui étudie le rôle que peut avoir le réchauffement climatique dans le déclenchement ou l'aggravation des grandes catastrophes météo.
Prévoyez-vous de vous rendre à la COP28 et estimez-vous que c'est un déplacement indispensable pour tout climatologue ?
Davide Faranda : Non, je ne me déplace pas à la COP cette fois-ci, même si ça aurait été utile pour moi d'y aller. La raison, c'est que nous sommes en train de réduire notre budget carbonecarbone, et j'estime que c'est plus important de se déplacer pour des actions de formation. Je suis, par exemple, allé en Afrique le mois dernier pour des congrès et des écoles d'été pour rencontrer des étudiants africains.
Quels sont vos sentiments à l'approche de cette COP28 ? Êtes-vous impatient, intéressé, ou démotivé par cette 28e COP alors que le réchauffement et la destruction de l'environnement s'accélèrent ?
Davide Faranda : Je suis curieux de voir ce qui va se passer, car il y a plein de défis qui sont nouveaux concernant le changement climatique. Les actions pour réduire les émissionsémissions de gaz à effet de serre sont toujours insuffisantes, nous sommes au bord de dépasser les seuils limites fixés par l'Accord de Paris. On se dirige vers un monde plus chaud, donc il y a d'autres défis à prendre en compte, comme l'adaptation. La COP sera intéressante pour réfléchir sur ce volet adaptation qui devient de plus en plus nécessaire. Notre plateforme Climameter montre qu'il y a déjà des effets du changement climatique et qu'il y a des conséquences qu'on pourrait éviter et qu'on n'évite pas.
Quelles sont les 3 grandes mesures que vous attendez à l'issue de cette COP28 ?
Davide Faranda : Les trois grandes mesures que je prendrais sont :
- La création d'un fonds mondial pour l'adaptation, surtout pour les pays du sud. Ce fond doit être alimenté par les pays les plus riches. Il faut financer des projets pour assurer l'approvisionnement en eau et pour protéger les villes des variations du cycle de l'eau.
- Un accord mondial pour la migration climatique qui va avoir lieu. Il faut replacer ces gens qui vont être nomades, et leur assurer un futur dans d'autres pays. Je pense surtout à des îles qui vont disparaître, comme celles de la Polynésie et des Maldives.
- Des actions concrètes pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre : cela doit passer par des modèles de développement des énergies renouvelables, qui sont plus intéressantes que les énergies fossilesénergies fossiles pour l'économie.
Qu'est-ce qui, selon vous, a fait défaut lors des précédentes COP et que vous souhaitez voir changer pour la COP28 ?
Davide Faranda : Les engagements fixés sont trop lointains, avec des échéances à 20 ou 30 ans. Les politiques en charge ont besoin d'engagements à très courte échéance pour agir, d'ici 2026 ou 2030.
Peut-on encore croire aux décisions prises lors de la COP28 ? Si oui, qu'est-ce qui vous donne de l'espoir sur l'intérêt d'une nouvelle COP ?
Davide Faranda : Même si certains engagements n'ont pas été tenus, d'autres ont quand même été pris. On se dirige malgré tout vers une réduction des gaz à effet de serre dans beaucoup de pays. Cela nous permet actuellement de ne pas être sur la pire trajectoire de réchauffement, mais une trajectoire intermédiaire. Je pense qu'il faudrait axer les négociations sur les voies technologiques qui permettent de réduire les gaz à effet de serre, d'améliorer la qualité de vie des gens, mais aussi d'améliorer le portefeuille de ceux qui investissent dedans.
Le fait que cette COP ait lieu à Dubaï, aux Émirats arabes unis, un État qui tire une partie de son économie par le pétrole, ne va-t-il pas fausser les décisions selon vous ?
Davide Faranda : C'est plutôt une opportunité. Cette COP aura au moins le mérite de sensibiliser ces pays producteurs de pétrolepétrole au changement climatique. Cela peut aussi permettre de sensibiliser la population et de les inciter à s'engager.