Par une étude menée pendant plus de 20 ans, des chercheurs français ont à nouveau révélé l’importance des insectes pollinisateurs pour les terres agricoles françaises. Ils ont constaté que l’intensification de l’agriculture, en affectant les pollinisateurs, était de moins en moins efficace pour améliorer la productivité des cultures. Ils appellent les paysans à modifier leurs techniques à la fois pour leur rendement et pour le bien de la biodiversité.

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    La pollinisation est un élément clé de la reproduction sexuée des végétaux supérieurs. Elle est le mode de fécondation privilégié utilisé par les plantes angiospermes (plantes à fleurs produisant des fruits), et gymnospermes (plantes à graines). L'intensification des techniques agricoles impacte ce processus essentiel. © Autan, Flickr, cc by nc nd 2.0

    La pollinisation est un élément clé de la reproduction sexuée des végétaux supérieurs. Elle est le mode de fécondation privilégié utilisé par les plantes angiospermes (plantes à fleurs produisant des fruits), et gymnospermes (plantes à graines). L'intensification des techniques agricoles impacte ce processus essentiel. © Autan, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Depuis les années 1960, les pratiques agricoles se sont intensifiées et ont permis d'augmenter les rendements des cultures. En contrepartie, cela a eu des retombées négatives sur la biodiversité, et en particulier sur les insectes pollinisateurs. Or, certaines cultures comme les pommes, les prunes et les courgettes dépendent énormément de ces précieux pollinisateurs. Il est d'ailleurs estimé que 35 % de la production agricole mondiale est directement liée à l'activité de ces animaux.

    Quel est l'effet de l'intensification des pratiques agricoles sur la pollinisation et le rendement des cultures ? Pour répondre à cette question, une équipe du CNRS a analysé les données de productions annuelles pour 54 cultures, réparties dans les 22 régions de France métropolitaine, de 1989 à 2010. Les scientifiques ont alors pu calculer le rendement moyen et sa variabilité temporelle pour chaque culture et région. L'intensité de l'agriculture a ensuite été estimée au niveau régional en tenant compte du système de rotation des cultures, des quantités d'intrantsintrants utilisées (irrigationirrigation, engrais, pesticides) et de la présence d'habitats semi-naturels dans le paysage (par exemple haieshaies ou forêts). Ils ont finalement comparé toutes ces informations au cours des années afin d'examiner l'efficacité des méthodes d'intensification de l'agricultureagriculture. Leurs résultats sont publiés dans la revue Frontiers in Ecology and the Environment.

    Le niveau de dépendance des cultures aux pollinisateurs repose sur le pourcentage de diminution du rendement dû à une absence de pollinisateurs : 0 % (0 % de diminution de rendement), 5 % (moins de 10 % de diminution de rendement), 25 % (10 à 39 % de diminution de rendement), 65 % (40 à 90 % de diminution de rendement), et 95 % (plus de 90 % de diminution de rendement). © CNRS

    Le niveau de dépendance des cultures aux pollinisateurs repose sur le pourcentage de diminution du rendement dû à une absence de pollinisateurs : 0 % (0 % de diminution de rendement), 5 % (moins de 10 % de diminution de rendement), 25 % (10 à 39 % de diminution de rendement), 65 % (40 à 90 % de diminution de rendement), et 95 % (plus de 90 % de diminution de rendement). © CNRS

    L’intensification agricole pas toujours rentable

    Comme attendu, les chercheurs ont montré que le rendement moyen des cultures peu ou non rattachées à la pollinisation augmentait avec l'intensité de l'agriculture, et que la variabilité de leur rendement diminuait. En revanche, ces gains s'amenuisent pour les cultures plus liées à la pollinisation. Pour les cultures très dépendantes des pollinisateurs (de 65 % à 95 %), le rendement moyen n'augmente pas avec l'intensification des pratiques agricoles et une plus forte variabilité du rendement moyen est observée.

    L'ensemble de ces résultats révèle l'impact négatif de l'intensification sur l'activité des pollinisateurs, ce qui limite la productivité des systèmes agricoles. L'enjeu est désormais de développer de nouvelles approches permettant de maximiser les rendements en se reposant sur les services fournis par la nature, tels que la pollinisation ou le contrôle des ravageurs des cultures.