On le sait, le sable est la deuxième ressource la plus consommée au monde après l’eau. Problème, il n’est pas inépuisable. Et lorsqu’il s’agit de fabriquer des matériaux destinés à la construction comme le mortier, la céramique, le verre, le béton, le sable est indispensable. Mais sera-t-il secondé par d’autres ressources dans le futur ? Peut-être, en tout cas, la révolution est en marche…


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    Que faire face aux ressources qui s'amenuisent, là où d'autres s'accumulent ? « C'est une question qui anime les jeunes designers. Aujourd'hui, ils ont tous une réflexion sur la fabrication : imaginer un meuble évolutif, élaborer un nouveau matériaumatériau pour faire un meuble ou trouver celui qui permettra, à l'inverse, d'en créer », explique Lauranne Baudin, designer en architecture d'intérieur. Sensible au respect de l'environnement et donc particulièrement intéressée par les néo-matériaux, elle axe son travail sur la décoration écoresponsable. Et elle s'y connaît !

    Qu’entend-on par « néo-matériaux » ? Réponse d’une experte

    Les néo-matériaux sont des nouvelles solutions conçues pour pallier l'urgence des Hommes à s'approvisionner en matièresmatières pour construire, rénoverrénover ou décorer leur habitat. Lauranne Baudin le souligne, « pour l'instant, ces néo-matériaux ont été étudiés pour réaliser du second œuvre et de la petite déco en raison des contraintes à respecter comme l'usure dans le temps, les rayures, la tenue à la chimiechimie, le poinçonnement ou la norme feufeu. Nous en sommes encore au balbutiement ».

    Certes, mais ces innovations peuvent-elles finir par remplacer les ressources épuisables dans un avenir moyen ? « C'est possible. Après, pour les matériaux de constructionconstruction, on va penser "recyclagerecyclage", c'est pertinent de réutiliser les matières déjà employées. Le béton en fait partie, la laine et le tissu aussi pour l'isolation des habitations et la terre de remblais est réutilisée pour créer des blocs de terre permettant de monter des murs. Le liège recyclé peut être utilisé pour créer des sols. »

    Quels néo-matériaux pour quelle utilisation ?

    Les innovations en la matière sont notamment employées pour la fabrication de revêtements muraux ou de mobilier. « Pour l'instant, le sol n'est pas encore trop concerné par ces néo-matériaux car il faut les tester en s'appuyant sur les fameuses normes "feu", "tenue à la chimie", etc., c'est contraignant et cher. Comme ils sont nouveaux, ils ne sont pas encore trop disponibles pour le grand public et leur prix reste élevé pour le moment. Par exemple, on est à 150 € HTHT/m2 pour un panneau créé à partir de plastique recyclé », nous précise Lauranne Baudin.

    Lauranne est passionnée et entreprend de citer une ribambelle de néo-matériaux dont certains se trouvent dans son bureau.

    Ainsi, on apprend que Ospher a créé Granispher, un matériau issu du recyclage de cuirs de sellerie et de maroquinerie qui entre alors dans la composition de panneaux séparatifs et acoustiques.

    Les coquilles de moules, d'huîtres, de Saint-Jacques sont valorisées par Ostrea Design pour créer des tables, des crédences, des plans de travail... L'ajout de pigments naturels permet une personnalisation du matériau Ostrea.

    Le matériau créé par Ostrea est constitué à 65 % de coquillages recyclés liés à une matrice minérale. © Ostrea Design
    Le matériau créé par Ostrea est constitué à 65 % de coquillages recyclés liés à une matrice minérale. © Ostrea Design

    L'entreprise Foresso s'est, elle, engagée dans la revalorisation de tout comme les copeaux de boisbois provenant d'arbresarbres abattus en Grande-Bretagne et associés à un mélange minéralminéral constitué de déchetsdéchets de cimentciment et de plâtre. Quant au plastiqueplastique recyclé par Pasticiet, il devient un mur ou un meuble très design.

    Et puis... On retrouve le Drop® Cake, des panneaux rigides constitués à 60 % de chutes de production de Drop® Paper - papier léger, résistant et destiné notamment à la confection d'éléments de décoration d'intérieure - et à 40 % de déchets de polyéthylènepolyéthylène. Les flocons de papier et de polyéthylène sont pressés à chaud sans ajout de produit chimique et sont recyclables à l'infini ! 

    Après avoir été pressées à chaud, les plaques de Drop® Cake mesurent 1,25 x 2,40 m et 10 mm d'épaisseur. © Procédés Chénel
    Après avoir été pressées à chaud, les plaques de Drop® Cake mesurent 1,25 x 2,40 m et 10 mm d'épaisseur. © Procédés Chénel

    Lauranne Baudin évoque également un matériau incroyable : « Les cuirs végétaux comme le cuir de pomme et celui d'ananasananas - les plus solidessolides créés à base de fruits ou légumes - sont une alternative au cuir. D'ailleurs, si Tesla a choisi celui de pomme pour revêtir les sièges de ses voituresvoitures, c'est qu'il a fait ses preuves ! On peut aussi employer les cuirs végétaux pour faire des têtes de lit ou du mobilier. »

    En tout cas, selon l'experte en décoration écoresponsable, « les néo-matériaux permettent d'avancer, c'est certain ! Mais pour l'instant, choisir des matériaux faciles à recycler - comme la laine ou les textiles - est toujours plus intéressant que d'avoir recours à des revêtements 100 % neufs. C'est aussi très bien d'organiser correctement le démontage des chantiers pour pouvoir réemployer les matériaux par ailleurs. »

    À noter

    Pour Lauranne Baudin, le problème du recyclage n'est pas à proprement parler la matière, mais la colle utilisée pour la fixer qui n'est pas recyclable car constituée de composants pétrochimiques.