Après deux tentatives infructueuses pour entrer en contact avec la sonde InSight à la surface de Mars, la Nasa avait annoncé la fin de la mission le


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    Les missions martiennesmissions martiennes ne font pas qu'étudier la surface de la Planète rouge, elles sondent aussi son intérieur comme l'a démontré l'atterrisseur Mars InSight de la Nasa, qui a fonctionné pendant quatre ans avant de manquer d'énergie en décembre 2022. Il avait notamment permis de déposer l'instrument français Seis (Seismic Experiment for Interior Structures), un véritable sismomètresismomètre permettant, comme ses cousins sur Terre, de déduire des caractéristiques des ondes sismiquesondes sismiques qu'il pouvait détecter bien des choses sur l'intérieur de Mars. Ce n'est pas la première fois que la noosphère avait déposé un sismomètre sur Mars. Les missions Viking l'avaient fait dès les années 1970 mais il s'agissait d'instrument bien moins performant que Seis.

    InSight était aussi équipé de l'instrument appelé Rise et on apprend aujourd'hui via un article publié dans le célèbre journal Nature que l'analyse des données de Rise a permis de faire d'une pierre deux coups. Il y a d'abord le fait que l'on sait maintenant, après avoir examiné les données des 900 premiers jours martiens d'InSight, que la rotation de la planète s'accélère d'environ 4 millisecondes d'arc par an, ce qui correspond à un raccourcissement de la durée du jour martien d'une fraction de milliseconde par an.


    Une présentation de début 2018, avant son lancement, de la mission InSight (acronyme de l'anglais Interior Exploration using Seismic Investigations, Geodesy and Heat Transport ; en français : Exploration interne par les sondages sismiques, la géodésie et les flux thermiques). La vidéo explique pourquoi les planétologues veulent comprendre l'intérieur de Mars et pourquoi elle ne possède plus de champ magnétique. © Cnes

    Les données de Rise permettent également de poser des contraintes sur la taille du noyau de Mars, taille qui est tout à fait comparable à celle déduite de l'analyse des données de Seis, et mieux connaître la nutation de l'axe de rotation de Mars. On pense que les modifications de la nutation sont en rapport avec le fait que le noyau interne de la Planète rouge, très vraisemblablement complètement liquide (contrairement à la Terre) et composé d'un alliagealliage de ferfer et de nickelnickel, effectue des mouvementsmouvements de ballotement. Rappelons que ce terme désigne, en son sens rigoureux, les petits mouvements d'un liquideliquide contenu dans un réservoir soumis à un mouvement accéléré et présentant une surface libre.

    Les chercheurs ont aussi quelques idées concernant l'origine de l'accélération de la rotation de Mars. Quelques considérations préliminaires sont nécessaires pour mieux comprendre de quoi il est en retourne sur les dernières explications de la Nasa à propos des découvertes d'InSight.

    Gravité, champ magnétique et sismologie, les sondes des géophysiciens internes

    On peut déjà préciser comment Seis avait déjà permis de conclure que Mars possédait un noyau ferreux liquide dont le rayon est compris entre 1 790 kilomètres et 1 870 kilomètres et contenant des éléments légers tout comme dans le cas du noyau de la Terre. (Mais, comme il n'existe rien d'autre qu'un champ magnétique crustal fossile sur Mars, ce noyau liquide ne contient pas l’équivalent de la géodynamo terrestre de nos jours.)

    On aboutit à ces conclusions en cherchant notamment à faire coller des observations avec des milliers de modèles numériquesmodèles numériques du manteaumanteau et du noyau martiens dépendant de plusieurs paramètres ajustables, un peu comme si l'on cherchait les caractéristiques exactes d'un instrument de musique en comparant le son produit par toute une famille d'instruments supposés similaires à celui que l'on entend sans le voir. C'est ce que l'on appelle la résolutionrésolution d'un problème inverse dans le jargon des physiciensphysiciens mathématiciensmathématiciens.

    On peut obtenir des informations plus fines et plus solidessolides en transposant à l'étude de Mars les techniques rodées dans le cas de la Terre. Ainsi les planétologues ont pu s'appuyer au départ sur l'étude du champ de gravitation de ces planètes et de leurs mouvements de rotation, et cela continue aujourd'hui en combinaison avec l'étude des ondes sismiques.

    En tournant sur elle-même comme une toupie, la planète Mars force son axe de rotation à décrire un cercle autour d'une position arbitraire. C'est le phénomène de précession. Ce cercle est lui-même soumis à des petites oscillations appelées nutation. © IPGP, David Ducros
    En tournant sur elle-même comme une toupie, la planète Mars force son axe de rotation à décrire un cercle autour d'une position arbitraire. C'est le phénomène de précession. Ce cercle est lui-même soumis à des petites oscillations appelées nutation. © IPGP, David Ducros

    Des changements de rotation induits par des changements de répartition des masses

    Les distributions de matièrematière à l'intérieur des planètes étant différentes en densité, le champ de gravitégravité l'est forcément localement juste à l'extérieur des planètes, de sorte que des mesures de gravimétriegravimétrie en surface, et surtout des mouvements précis de sondes en orbiteorbite parcourant les vallées et les bosses des surfaces équipotentielles du champ gravitationnel générées par ces astresastres, permettaient déjà de se faire des idées sur ce que dissimulaient les surfaces de la Terre et de Mars.

    On peut également prendre en compte ce que l'on appelle le tenseurtenseur du moment d'inertieinertie d'une planète, lequel dépend aussi des distributions de matière et de la figure d'une planète. Injecté dans les fameuses équationséquations d'Euler d'un corps solide en rotation, il va déterminer comment l'axe de rotation d'une planète soumise à des forces gravitationnellesforces gravitationnelles externes, ou des modifications des distributions de matière à l'occasion par exemple de séismesséismes, va changer au cours du temps. Ainsi, l'étude des mouvements de l'axe de rotation de la Terre, qui se manifestent par exemple sous la forme d'une dérive de ses pôles géographiques, s'était, elle aussi, révélée précieuse pour avoir des contraintes sur la structure interne de notre Planète bleue.

    Dans le cas de la mission InSightmission InSight, c'est la nutation et la précessionprécession de l'axe de rotation de Mars - qui ont été utilisées grâce à l'instrument Rise (Rotation and Interior Structure Experiment) - qui ont fourni des contraintes sur le noyau de la planète. Les chercheurs pensent que les modifications de la rotation et de la nutation sont aussi dues au fait que des fontesfontes de glaciersglaciers modifient la répartition des massesmasses, déjà en fondant, et indirectement en entraînant une remontée de blocs de la croûtecroûte de Mars tout à fait analogue à celle que l'on appelle le rebond isostatique sur Terre suite à la fin de la dernière glaciationglaciation. Comme dans le cas de la Terre, la croûte est moins dense que le manteau et flotte donc comme un bateau que l'on peut charger et décharger.

    Au final, tous ces mouvements de masses modifient le tenseur d'inertie de Mars, ce qui provoque un ajustement sous la forme des changements de l'état de rotation de la Planète. La Terre faisant de même au cours des péripéties de son histoire.


    Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa

    Les planétologues avaient déjà utilisé également l'effet Dopplereffet Doppler pour les ondes radio émises par une sonde en orbite autour de Mars et captées sur Terre par les antennes du Deep Space NetworkDeep Space Network (DSN) de la Nasa pour en déduire la vitessevitesse de cette sonde et indirectement des renseignements sur le champ de gravité de Mars, champ déterminé par la distribution précise des masses constituant Mars. C'est ce qu'explique la Nasa ci-dessus.

    Mais dans l'article de Nature, il est aussi expliqué que les chercheurs ont mis à contribution l'effet Doppler dans les ondes radio transmis par le DSN et renvoyé sur Terre par les antennes de la Rotation and Interior Structure Experiment, c'est-à-dire précisément Rise. Ce sont ces mesures d'effet Doppler qui ont permis de mesurer en continu ou presque la rotation de Mars sur elle-même pendant 900 jours et d'en déduire qu'elle s'accélérait.

    En fait, cette technique avait déjà été utilisée par les atterrisseurs des missions VikingViking dans les années 1970 mais les progrès de la technologie nous permettent maintenant de gagner en précision d'un facteur 5 environ !