Les nanoparticules peuvent être très utiles mais aussi dangereuses pour la santé humaine. Or, elles sont très difficiles à repérer dans l'environnement. Un laboratoire américain vient de mettre au point un prototype fonctionnel et qui semble très efficace.

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    Réalisés en verre, les microrésonateurs mesurent entre 20 et 30 microns de diamètre et sont gravés à l'aide des techniques usuelles de microlithographie sur un substrat de silicium. © Jiangang Zhu et Jiangyang Gan/WUSTL

    Réalisés en verre, les microrésonateurs mesurent entre 20 et 30 microns de diamètre et sont gravés à l'aide des techniques usuelles de microlithographie sur un substrat de silicium. © Jiangang Zhu et Jiangyang Gan/WUSTL

    Comment détecter des nanoparticules dans l'airair ambiant ? La technique est difficile car elles sont plus grosses que des moléculesmolécules mais plus petites que n'importe quel grain de poussière. Les dispositifs d'analyse chimique les repèrent très mal et les filtres ne les arrêtent guère. Or, avec l'avènement inévitable des nanotechnologies dans de multiples domaines et jusqu'à notre environnement quotidien, la question de leur détection se pose crûment. En effet, ces minuscules particules peuvent avoir des effets néfastes sur la santé humaine et animale, comme plusieurs travaux l'ont amplement démontré, par exemple dans les crèmes solaires ou pour les nanotubes, présents dans une large gamme de produits actuels, et surtout à venir.

    A la Washington University of St.Louis (WUSTL), une équipe menée par Lan Yang travaille sur le principe d'un détecteur qui serait à la fois efficace et d'une réalisation suffisamment simple. Leurs résultats, très prometteurs, viennent d'être décrits dans la dernière livraison de la revue Nature Photonics.

    Ses inventeurs ont appelé leur prototype ultrahigh-Q microresonator et il serait, expliquent-ils, une amélioration du résonateur en mode galerie des chuchotements... Cette curieuse expression a un sens dans le monde de la physiquephysique et dans celui de l'architecture. Le modèle emblématique est celui d'un couloir circulaire de la cathédrale Saint-Paul, à Londres, où une parole chuchotée contre le murmur s'entend distinctement même au point diamétralement opposé (à 34 mètres). L'explication est une propagation continue de l'onde sonoreonde sonore sur la surface courbe.

    En physique, on parle de résonateur en mode galerie ou, en anglais, de whispering-gallery mode resonator. L'équipe en a réalisé une version miniature, prenant la forme d'un tore de verre de 20 à 30 microns (micromètresmicromètres). L'onde est ici lumineuse, issue d'un laserlaser, et le tube circulaire fonctionne comme un guide d'onde, alimenté en lumièrelumière par une fibre optique qui longe une série de tores similaires.

    La lumière laser est apportée par la fibre optique qui longe les résonateurs en forme de tores. Deux nanoparticules, ici représentées par des points blancs, sont venues se poser sur le premier d'entre eux et perturbent la lumière tournant dans chaque anneau. La collerette colorée au bas de chaque tore montre les nœuds et les anti-nœuds de l'onde prisonnière de l'anneau. Cette répartition est modifiée quand une nanoparticule touche l'anneau.<br />© Jiangang Zhu et Jiangyang Gan/WUSTL

    La lumière laser est apportée par la fibre optique qui longe les résonateurs en forme de tores. Deux nanoparticules, ici représentées par des points blancs, sont venues se poser sur le premier d'entre eux et perturbent la lumière tournant dans chaque anneau. La collerette colorée au bas de chaque tore montre les nœuds et les anti-nœuds de l'onde prisonnière de l'anneau. Cette répartition est modifiée quand une nanoparticule touche l'anneau.
    © Jiangang Zhu et Jiangyang Gan/WUSTL

    Mesure de la taille des nanoparticules

    Quand la lumière tourne dans chacun de ces anneaux, elle est rapidement absorbée sauf si le diamètre du tore correspond exactement à la longueur d'ondelongueur d'onde de la lumière, ou plus précisément à un multiple entier de cette longueur. Il s'agit d'une fréquence de résonancerésonance et l'anneau fonctionne donc comme un résonateur. Quand une particule de matièrematière vient se coller sur lui, cette minuscule perturbation modifie cette fréquence de résonance et la lumière de longueur d'onde correspondante est du coup absorbée, ce qui peut être mesuré. On peut donc détecter ainsi cette particule. On doit même pouvoir en estimer la grosseur puisque cet effet de la nanoparticule est proportionnel à sa taille.

    Ce principe est connu... mais fonctionne mal. Il faut en effet une qualité de fabrication excellente pour parvenir à détecter valablement une particule. De plus, la perturbation n'est pas la même selon l'endroit où atterrit le grain de matière. Il est alors possible de détecter sa présence mais pas sa taille.

    L'équipe a d'abord réalisé un microrésonateur de très haute qualité - le facteur Q, primordial dans l'expérience - et a ensuite utilisé une autre méthode de détection. Dans l'anneau, la lumière tourne en fait dans les deux sens (les physiciensphysiciens parlent de modes), avec une fréquence identique. La présence d'une particule a pour effet, expliquent les chercheurs, de coupler les énergiesénergies des deux sens de propagation. Les ondes se réarrangent (de sorte que la particule de matière se situe à un nœudnœud d'un des sens et à l'anti-nœud de l'autre). Le résultat est que l'un des sens est plus perturbé que l'autre, ce qui peut se détecter. Cette fois, l'endroit où se pose la particule de matière n'intervient plus et l'ampleur de l'effet permet d'en déterminer la taille.

    Ces tores sont taillés sur une galette de siliciumsilicium avec les techniques courantes de la microélectronique, donc à un coût raisonnable. Les tests ont prouvé le bon fonctionnement et, surtout, la possibilité de déterminer la taille des particules, une caractéristique déterminante pour leur effet biologique. Voilà donc de quoi mesurer la vraie quantité de ces poussières insaisissables dans l'environnement...