La loi Création et Internet, dite Hadopi, du nom de la structure qu'elle met en place, va entrer dans les mœurs sous peu. Un décret a précisé cette semaine l'exploitation des données personnelles sur les téléchargeurs repérés. Nom, prénom, adresse, fichiers détectés, protocole P2P, etc., seront fournis par le FAI à la Hadopi, qui pourra les utiliser pendant 2 à 36 mois, selon la procédure engagée. Au même moment, une étude de l'Université Rennes 1, révélée par Les Echos, affirme que le nombre de pirates a augmenté et que la nouvelle loi aurait un effet plutôt négatif...

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    La récente loi Hadopi contre le téléchargement illégal n'aurait pas d'effet sur cette pratique, selon une étude réalisée au laboratoire Marsouin, par Sylvain Dejean, Thierry Pénard et Raphaël Suire, des chercheurs du CREM (Centre de recherche en économie et management), associé à l'Université RennesRennes 1, à celle de Caen et au CNRS. A l'inverse, le piratage aurait augmenté depuis la promulgation du texte. En cause, les nouvelles pratiques de piratage qui échappent à la loi, comme le streaming, qui permet de consulter du contenu audio ou vidéo sans avoir à le télécharger sur son ordinateur.

    Conduite auprès de 2.000 personnes dans la région Bretagne entre novembre et décembre 2009 (soit environ trois mois après la promulgation de la loi), cette étude révèle que le nombre de pirates sur Internet en France a augmenté de 3% sur cette période, alors que la plupart des internautes interrogés avaient connaissance de l'existence de cette loi et de ces principales dispositions.

    La mode est au streaming

    Les réseaux peer-to-peer, cible principale de la loi Hadopi, ont vu leur fréquentation baisser : 15% des utilisateurs de ces réseaux ont définitivement cessé de le faire avec l'adoption de la loi. En revanche, seulement un tiers de ces ex-pirates ont renoncé à toute forme de piratage sur Internet. Les deux tiers restants se sont tournés vers des systèmes de téléchargement alternatifs qui échappent au périmètre de cette loi, comme le streaming illégal ou le téléchargement sur des sites d'hébergements de fichiers (Rapidshare, Megaupload, etc.).

    « La réduction du nombre d'internautes qui utilisent les réseaux peer-to-peer s'est donc accompagnée d'une hausse des autres formes de piratage non prises en compte par la loi Hadopi (+27%). Cet accroissement fait plus que compenser la diminution du nombre d'utilisateurs des réseaux peer-to-peer » explique le rapport de l'étude.

    L'enquête révèle par ailleurs que les pirates du numériquenumérique ne sont pas forcément de mauvais acheteurs de contenus légaux en ligne (ce qui avait déjà été rapporté de longue date). La moitié d'entre eux (dont 27% sont des utilisateurs des réseaux peer-to-peer) sont en effet des acheteurs du numérique, de musique ou de vidéo sur les plates-formes légales. En conclusion, les chercheurs de Rennes 1 estiment que la loi Hadopi, en coupant la connexion Internet des pirates peer-to-peer, pourrait réduire la taille du marché légal des contenus culturels numériques.

    Adoptée en septembre dernier par les parlementaires, la loi Hadopi a instauré une autorité indépendante (la Hadopi) chargée d'envoyer des messages d'avertissement aux internautes identifiés comme ayant téléchargé de manière illégale des contenus en ligne. La démarche retenue est celle de la riposte graduée : avertissement par e-mail, puis lettre recommandée en cas de récidiverécidive, et, en cas de troisième infraction, suspension de l'abonnement Internet pour une duréedurée maximale d'un an. Le contrevenant risque également une amende (de 1.500 à 300.000 euros), voire une peine pouvant aller jusqu'à trois ans de prison.

    Les premiers messages d'alertes ne seront toutefois pas envoyés aux pirates avant le printemps 2010, au plus tôt.