Au XVIIIe siècle, le royaume de France est un territoire en voie d’expansion : il possède une superficie estimée à 528.000 km2 en 1789, assez proche de celle de l’Hexagone actuel : environ 551.000 km2. Cet espace géographique se mesure en journées de voyage ou en lieues, unité de longueur variant entre trois à six kilomètres suivant les régions. Jusqu’aux années 1750, la France souffre cruellement d’un réseau routier qui n’est pas à la hauteur de sa puissance politique et économique. Il faut plus de trois semaines, par exemple, pour aller de Lille à la frontière des Pyrénées en diligence.

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    Le réseau routier existant est accusé d'être impropre à la circulation des marchandises, les provinces et les pôles régionaux sont mal raccordés et mal desservis. Le large maillage des chemins ruraux est à la charge des riverains et souvent impraticable en hiverhiver. Dès le début du XVIIIe siècle, des voix s'élèvent pour réclamer une « révolution routière ».

    Des routes au service de l’administration et du commerce

    Les grandes routes ou routes royales (grands axes entre Paris et métropoles régionales) sont du ressort de l'État qui va leur consacrer un budget de plus en plus important (jusqu'à 4 % en 1789) et créer le corps des ingénieurs des Ponts-et-Chaussées dès 1716. Ces cadres techniques, dont l'École est fondée en 1747, vont définir les règles de constructionconstruction des routes et ponts du royaume.

    En 1738, l'instauration de la corvée par le contrôleur général des Finances Orry (ministre de Louis XV), contraint tous les paysans habitant près des grands chemins à participer deux fois par an à l'entretien des routes du royaume. Les années 1750-1780 sont marquées par les travaux les plus intensifs : le réseau des routes royales estimé à 14.000 km en 1775, a quasiment doublé en 1790 (27.000 km). À cette date, on estime à près de 50.000 km le réseau des chemins pavés et entretenus.

    La poste et les messageries

    La densification du réseau routier va de pair avec celle d'un réseau de poste plus efficace. En 1775, le contrôleur général des Finances Turgot (ministre de Louis XVI) crée la Régie des diligences et messageriesmessageries : la poste dispose alors de relais tous les 15 à 20 km, le long d'un réseau routier de qualité nettement plus homogène. Avant la Révolution, la poste compte environ 3.000 relais et 12.000 employés qui sillonnent les routes du royaume.

    Les messageries sont un service de fourgons, coches et diligences transportant voyageurs et marchandises. Parmi les guides routiers proposés aux voyageurs, L'Indicateur fidèle mentionne un trajet Paris-Toulouse d'une durée de quinze jours en 1765 pour sept jours en 1780. Paris-Bordeaux s'effectue en quatorze jours en 1765 contre cinq jours en 1780.

    Guide des voyageurs <em>L'Indicateur fidèle</em> dressé par Michel et Desnos, en 1765. Routes de la diligence Paris-Toulouse et du carrosse Paris-Bordeaux. Bibliothèque nationale de France, département Arsenal. © Gallica, BnF, domaine public.

    Guide des voyageurs L'Indicateur fidèle dressé par Michel et Desnos, en 1765. Routes de la diligence Paris-Toulouse et du carrosse Paris-Bordeaux. Bibliothèque nationale de France, département Arsenal. © Gallica, BnF, domaine public.

    Un réseau routier centralisé

    Le réseau français à la fin du XVIIIe siècle met en évidence l'importance de la centralisation : Paris est au cœur d'une immense toile d’araignée qui relie la capitale aux territoires et aux grandes villes du royaume. Les économies régionales bénéficient du désenclavement, la route permet une plus grande fluidité de la circulation des hommes et des marchandises. Elle facilite également le travail de l'administration et avantage le gouvernement dans la vitesse de transmission des ordres et des informations. Il faut attendre la fin du siècle pour que les communications entre provinces s'améliorent vraiment par l'aménagement de chemins transversaux entre grands axes routiers.

    Carte générale de France dans <em>L'Indicateur fidèle</em>, datée de 1785. Les cercles concentriques vont de 10 en 10 lieues : entre Paris et Orléans, il y a environ 22 lieues, c'est-à-dire 120 kilomètres. Bibliothèque universitaire lettres et sciences humaines Bordeaux Montaigne. © Université Bordeaux Montaigne, domaine public.

    Carte générale de France dans L'Indicateur fidèle, datée de 1785. Les cercles concentriques vont de 10 en 10 lieues : entre Paris et Orléans, il y a environ 22 lieues, c'est-à-dire 120 kilomètres. Bibliothèque universitaire lettres et sciences humaines Bordeaux Montaigne. © Université Bordeaux Montaigne, domaine public.

    À savoir

    Les atlas des routes de France dit atlas de Trudaine, réalisés entre 1745 et 1780 sur ordre de Charles Daniel Trudaine, directeur des Ponts-et-Chaussées, constituent une collection de 62 volumes totalisant plus de 3.000 planches manuscrites. Ces atlas représentent une documentation très recherchée sur les paysages français du XVIIIe siècle.