L'effet Hall est un phénomène bien connu en physique classique que l'on utilise pour mesurer des champs magnétiques ou construire, entre autres, des claviers d'ordinateurs. Son équivalent quantique se manifeste lui vers 1,5 degré au dessus du zéro absolu, on vient pourtant de l'obtenir à température ambiante avec du graphène !

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    Feuillets de Graphène constituant le Graphite

    Feuillets de Graphène constituant le Graphite

    Rappelons rapidement ce qu'est l'effet Hall classique. Lorsqu'on soumet un ruban métallique parcouru par un courant I à un champ magnétique B, il apparaît sur les faces parallèles à la direction de ce champ une accumulation de charges et donc une différence de potentiel VH. Cette situation est représentée par le schéma ci-dessous, le courant I étant selon la direction verticale.

    Effet Hall dans un capteur ( Crédit : Cyberman )

    Effet Hall dans un capteur ( Crédit : Cyberman )

    On peut alors définir une résistancerésistance à partir du coefficient de Hall RH liantliant VH, I et B. On peut donc se servir de cet effet pour fabriquer des capteurscapteurs pour mesurer un champ magnétique, si RH est connu, ou inversement, déterminer de façon précise les propriétés conductrices d'un matériau donné, comme le signe des porteurs de charges d'un semi-conducteur par exemple.

    L'effet Hall possède une histoire intéressante en liaison étroite avec la physique théorique, on y trouve en effet associés les noms de Heisenberg et Peierls, mais celle-ci a commencé à prendre un tournant dramatique en 1980 lorsque K. von Klitzing étudiait à Grenoble l'effet d'un champ magnétique intense sur des MOSFETs de silicium. Il découvrit alors que la résistance variait par paliers et était un multiple entier d'une constante faisant intervenir la charge électrique fondamentale et la constante de Planckconstante de Planck ! Il venait de mettre en évidence l'effet Hall quantiqueeffet Hall quantique entier et obtiendra le Prix Nobel de physique en 1985 pour cela.

    Cet effet a de multiples conséquences, aussi bien théoriques que pratiques. Il permet de construire des références standards, des étalons, pour la résistance des matériaux ainsi que des mesures précises des constantes fondamentales de la nature, comme la fameuse constante de structure fineconstante de structure fine de l'électrodynamique quantiqueélectrodynamique quantique. Du côté théorique, il présente encore des défis pour les théoriciens, et l'on considère que son explication n'est toujours pas complètement satisfaisante. Toutefois, il semble clair qu'il fait intervenir de subtils effets de théories quantiques topologiques des champs et même de la géométrie non commutative ! De façon incroyable, son étude possèderait alors des conséquences jusqu'en théorie des cordes et en gravitation quantiquegravitation quantique !

    On mesure donc l'importance de la prouesse aujourd'hui réalisée par les scientifiques du National High Magnetic Field Laboratory aux USA et simultanément au High Field Magnet Laboratory en Hollande. L'obtention d'un effet Hall quantique à température ambiante devrait faciliter considérablement aussi bien les applicationsapplications que les recherches théoriques sur cet effet fascinant.

    Ils ont pour cela utilisé une structure bidimensionnelle en graphènegraphène. Le graphène est une couche de l'épaisseur d'un atomeatome, formant un seul cristal de carbonecarbone, organisée à partir d'une structure hexagonale. C'est exactement ce qu'on retrouve dans les fullerènesfullerènes et aussi les nanotubesnanotubes, qui peuvent être considérés comme des feuilles de graphène enroulées. C'est donc un matériau de choix pour les nanotechnologiesnanotechnologies. En plongeant du graphène dans des champs magnétiques de plusieurs dizaines de TeslasTeslas, ce qui correspond aux plus intenses champs magnétiques que l'homme sait produire en laboratoire, les chercheurs des deux universités ont alors vu l'effet se produire. Ils viennent de publier un article en commun avec le Prix Nobel 1998 Horst Störmer, co-découvreur de l'effet Hall quantique FRACTIONNAIRE, dans la revue Science.

    Le potentiel des études du graphène dans des champs magnétiques intenses est énorme, certains envisagent même de simuler des processus à haute énergiesénergies comme l'évaporation des trous noirs grâce à lui !