Le chant des cigales réjouit les vacanciers venus du Nord, mais se doutent-ils qu’il intrigue nombre d’ingénieurs ? Plusieurs zones d’ombre planent encore sur le mécanisme permettant de produire ces puissants sons, mais quelques voiles viennent de se lever. Les côtes qui parcourent les cymbales de ces insectes présentent des fonctionnements atypiques et méconnus.

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    L'été approchant, le chant si caractéristique des cigales ne devrait pas tarder à se faire entendre. Pour rappel, seuls les mâles possèdent des cymbales, ces organes phonatoires qui produisent les sons, et dont le fonctionnement est régulièrement comparé à celui des criquets employés par les soldats alliés durant la deuxième guerre mondiale. Ces organes se situent dans l'abdomenabdomen et se composent d'une plaque de cuticule courbe, mais rigide et déformable, par ailleurs parcourue par des côtes.

    Chacune d'entre elles (il y a en deux par insecte) est reliée à un puissant muscle pouvant se contracter 100 fois par seconde. Or, chaque mouvementmouvement provoque une déformation de la cymbale associée, qui émet ensuite un claquement en reprenant sa position initiale. Le son produit est alors amplifié dans un espace vide servant de caisse de résonance, qui occupe la majeure partie de l'abdomen, avant d'être diffusé par des évents. Résumé ainsi, le mécanisme de production des sons paraît assez simple. Pourtant, aucun appareil ne peut à ce jour « cymbaliser » comme les cigales, c'est-à-dire émettre de forts signaux sonores tout en étant de petite taille et peu énergivore.

    Des ingénieurs maritimes, comme ceux du Naval Undersea Warfare Center (NUWC) de Newport (États-Unis), cherchent pourtant à copier les facultés musicales de la cigale depuis plusieurs années, car ce son pourrait se révéler utile pour développer de nouveaux moyens de communication subaquatiques. À l'occasion du 21st International Congress on Acoustics (ICA 2013), qui se tient du 2 au 7 juin à Montréal (Canada), les chercheurs Derke Hughes, et Allan Pierce de l'Institut océanographique de Woods Hole (Whoi), présentent leurs derniers résultats sur le chant des cigales. Alors quels sont les secrets de cet insecte ?

    Certaines cigales peuvent émettre des sons de 150 décibels à la source durant leur cymbalisation. © Ettore Balocchi, Flickr, cc by 2.0

    Certaines cigales peuvent émettre des sons de 150 décibels à la source durant leur cymbalisation. © Ettore Balocchi, Flickr, cc by 2.0

    Des côtes vibrantes aux déformations non uniformes

    Durant ses travaux, Derke Hughes a utilisé un vibromètre laserlaser, un capteurcapteur de vibrationvibration sans contact, pour étudier le mouvement des cymbales durant la production des sons. Ainsi, elles ne font pas juste « clic-clac », puisqu'elles entrent en vibration lorsque le signal sonore est produit. Par ailleurs, la relation qui unit ces mouvements et la pression acoustique extérieure n'est pas linéaire. Cette situation complique bien des choses lorsque l'on souhaite traduire un phénomène physiquephysique en équationéquation, par exemple pour le développement d'un modèle. Grâce à des analyses complémentaires, la source des vibrations a été identifiée : les côtes parcourant les cymbales.

    Le scientifique Allan Pierce a quant à lui cherché à modéliser le mécanisme de base impliqué dans la production des sons. Ainsi, les vibrations causées par les côtes dépendraient elles aussi d'un phénomène non linéaire. L'explication, simple, serait que les côtes ne se déforment pas de manière uniforme. Enfin, les ingénieurs souhaitant créer des cigales mécaniques devront faire face à une dernière difficulté : les mouvements des deux cymbales d'un même individu sont déphasés durant leurs vibrations, sauf lors de l'émissionémission du puissant son habituellement entendu. Qui se serait douté qu'un aussi petit animal offrirait tant de défis à des équipes d'ingénieurs chevronnés ?