Deux baleines boréales, l'une venant du Pacifique nord et l'autre de l'Atlantique nord, se sont rendues au même endroit, au nord du Canada, normalement inaccessible à cause de la banquise. Un voyage qui n'avait pas été possible depuis environ 10.000 ans. Le fameux passage du Nord-Ouest s'est ouvert pour les baleines, mais aussi, sans doute, pour d'autres espèces.

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    Les baleines boréales de l'Atlantique et du Pacifique se retrouvent au nord du Canada. &opcy;  National Oceanic and Atmospheric Administration

    Les baleines boréales de l'Atlantique et du Pacifique se retrouvent au nord du Canada. &opcy;  National Oceanic and Atmospheric Administration

    Les baleines boréales (Balaena mysticetus) vivent dans les eaux froides de l'Arctique. Elles sont divisées en cinq populations correspondant à des aires géographiques. Pour la première fois, des scientifiques ont prouvé que des baleines vivant dans le nord de l'océan Pacifique et d'autres provenant de l'océan Atlantique avaient atteint le même point au nord du Canada, en nageant au milieu des glaces de l'Arctique, signe que la traversée d'un océan à l'autre est possible.

    À cause du réchauffement climatique, la banquise de l’Arctique fond petit à petit. Régulièrement, les instituts de veille comme la Jaxa ou le NSIDC enregistrent des records de minimum de surface. Le dernier date de 2007 et a bien failli être battu cette année. 

    À force de battre en retraite, la banquise finit par laisser un passage entre les océans Pacifique et Atlantique, au nord du Canada. C'est le passage du Nord-Ouest, qui fait depuis longtemps rêver les navigateursnavigateurs humains. Au cours de l'hiver, il est bien sûr infranchissable puisque les glaces sont abondantes. Mais pendant l'été, et plus particulièrement en septembre, mois de tous les records, la banquise est à son minimum.

    Le réchauffement ouvre la route à travers la banquise

    C'est probablement à la fin de l'Holocène (il y a environ 10.000 ans) que des baleines ont pu traverser ce passage pour la dernière fois, une époque où la glace était absente à la fin de l'été. Mais en équipant des baleines appartenant à deux des cinq populations de Balaena mysticetus, celle du détroit de Béring, de la mer de Beaufort et celle de la mer de Baffin et du détroit de Davis avec des GPSGPS, les scientifiques du Greenland Institute of Natural Ressource, de l'université de Washington et de l'Alaska Department of Fish and Game ont montré que ces populations avaient emprunté le passage du Nord-Ouest à plusieurs reprises.

    Parcours des deux baleines mâles dont les trajets se sont croisés en septembre 2010. © Heide-Jørgensen <em>et al. </em>2011 - <em>Biology Letters</em>

    Parcours des deux baleines mâles dont les trajets se sont croisés en septembre 2010. © Heide-Jørgensen et al. 2011 - Biology Letters

    Déjà, en 2002, une baleine de l'Atlantique s'engageait dans ce passage avant de faire demi-tour, témoignant d'une certaine volonté de traverser le passage tandis qu'en 2006, une baleine du Pacifique tentait une expérience similaire. C'est en 2010 que les chemins de deux mâles, l'un venu du Pacifique, l'autre de l'Atlantique, se sont croisés au niveau du canal Parry. Les scientifiques ignorent ce qui a pu attirer ces deux cétacés dans cette zone plutôt pauvre en ressources alimentaires, mais suspectent, puisque seuls des mâles semblent avoir emprunté ce passage, que ces cétacés étaient probablement à la recherche de femelles.

    Les analyses génétiquesgénétiques réalisées sur des populations de baleines de part et d'autre du passage suggèrent qu'il y a déjà eu des flux de gènesgènes entre ces populations, dont l'occurrence dépend probablement de l'ampleur de la banquise et de l'ouverture du passage qui en découle. On parle alors de métapopulations. Quoi qu'il en soit, si les baleines ont réussi à se frayer un chemin au milieu de la banquise, c'est que d'autres espècesespèces, dont la dispersion est plus difficile à observer, l'ont déjà fait ou sont désormais capables de le faire.