- À lire, notre dossier sur le message des dinosaures
Au sud de l'Argentine, en Patagonie, les paléontologues ont, comme en Chine, un paradis à leur mesure : depuis des années, ils en exhument une impressionnante série de fossiles de dinosaures de différentes époques. On a ainsi vu défiler Mapusaurus roseas, chasseur en meute, Austroraptor cabazai, redoutable carnivore dromaeosauridé, Panphagia protos, un sauropode omnivore, et bien d'autres.
L'exploitation de ces trésors n'est pas terminée... Dans la province de Chubut, une équipe de paléontologues du MEF (Museo Paleontológico Egidio Feruglio, le musée paléontologique de Trelew) a mis au jour les restes d'un dinosaure quadrupède d'allure modeste, d'environ 3 mètres de longueur. Le squelette n'est pas complet (l'inverse étant une chance très rare...) mais Diego Pol, Alberto Garrido et Ignacio Cerda ont pu extraire la colonne vertébrale, le bassin et les quatre pattes, ce qui leur permet d'écrire une nouvelle page de la longue histoire des dinosaures.
L'animal a reçu le nom de baptême de son lieu de découverte, les montagnes de Taquetren, dans la formation géologique Leoneras. Il s'appellera donc Leonerasaurus taquetrensis. Il vivait il y a environ 180 millions d'années, c'est-à-dire pendant le Jurassique précoce, et il est manifestement un « sauropodomorphe », donc un proche parent des sauropodes. Cette famille connaîtra ses heures de gloire environ 10 millions d'années plus tard, avec les plus grands animaux que les terres émergées ont portés, caractérisés par une queue et un cou démesurément longs.
Petit mais déjà sauropode
Parmi ces géants, on remarque par exemple les brachiosaures et les diplodocus (probablement jusqu'à 25 mètres), ou encore les titanosaures, dont le célèbre Argentinosaurus, découvert lui aussi en Argentine.
On ne sait pas grand-chose de leur apparition ni de la manière dont ils ont pu évoluer jusqu'à cet étonnant gigantisme, qui pose de nombreux problèmes physiologiques. L'analyse phylogénétique du fossile de L. taquetrensis montre qu'il est effectivement proche des premiers sauropodes. On parle de « groupe frère ». Les vertèbres du sacrum, en particulier, se révèlent très semblables à celles des sauropodes géants. Or on pensait jusque-là que leur structure était liée à la taille très grande de l'animal. Il faut donc inverser cette logique : les premiers sauropodes devaient déjà avoir un sacrum puissant, lequel a, plus tard, permis des tailles plus grandes.
« Cela, et d'autres découvertes récentes, montrent que le schéma corporel caractéristique des sauropodes a évolué graduellement » concluent les auteurs dans l'article paru dans la revue scientifique Plos One.