Grâce à une méthode de simulation innovante, des chercheurs de Météo‐France, en collaboration avec le CNRS, ont découvert que les terminaux de l’aéroport Paris Charles de Gaulle retardent d'environ une heure trente la formation du brouillard. Cette avancée, technique et scientifique, dans la simulation des écoulements atmosphériques à l'échelle du mètre, laisse espérer une meilleure prise en compte des phénomènes de très petite échelle dans les modèles de prévision du temps.

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    Le brouillard se forme par condensationcondensation d'une partie de la vapeur d'eau contenue dans l'airair sous forme de très petites gouttelettes. Réduisant la visibilité, le brouillard a un impact important sur la sécurité des personnes et sur l'économie, notamment dans le domaine des transports. Sur les aéroports, il affecte par exemple les horaires d'atterrissage et de décollage des avions. Mais il reste imparfaitement anticipé car les phénomènes mis en jeu, de très petite échelle, sont encore mal prévus par les modèles de prévision du temps.

    L'amélioration des prévisions de localisation et du cycle de vie du brouillard est au cœur des recherches menées par MétéoMétéo‐France. Pour la première fois, une équipe de chercheurs de l'établissement associant le CNRS a réussi à simuler la formation du brouillard en présence de bâtiments à très fine échelle (1,5 m de résolutionrésolution horizontale et 1 m en vertical). Les données fournies par ADPADP (Aéroports de Paris) leur ont permis de s'appuyer sur la configuration exacte des terminaux de l'aéroport Paris‐Charles de Gaulle.

    Les infrastructures de l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle modifient les conditions météorologiques locales. Le sol est plus chaud que dans la campagne environnante tandis que les bâtiments modifient les vents et génèrent de la turbulence. Il est désormais possible de modéliser ces effets. © Google Earth

    Les infrastructures de l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle modifient les conditions météorologiques locales. Le sol est plus chaud que dans la campagne environnante tandis que les bâtiments modifient les vents et génèrent de la turbulence. Il est désormais possible de modéliser ces effets. © Google Earth

    Les simulations descendent à l'échelle du bâtiment

    « En conditions homogènes, le brouillard se forme quasi‐instantanément. À Roissy, nos simulations montrent qu'il met une heure trente à se former. Nous avons pu identifier les causes de ce retard : les deux effets thermique et dynamique en sont responsables chacun pour moitié » détaille Thierry Bergot, chercheur au CNRM‐GAME (Météo‐France/CNRS) et auteur principal de cette publication dans le Quarterly Journal of the Royal Meteorological Society. Du point de vue dynamique, les bâtiments créent des cisaillements de vents, des turbulencesturbulences et des déplacements d'air verticaux, ce qui gênent la formation du brouillard. Cependant, notent les auteurs, les turbulences facilitent le développement vertical de la couche de brouillard.

    Les bâtiments n'ont en revanche pas d'effet notable sur la dissipation des brouillards de hauteur importante. « Une fois formé, le brouillard crée ses propres mouvementsmouvements turbulents : ce sont eux qui conditionnent la duréedurée de la dissipation et non les bâtiments ». Ces résultats ont été obtenus grâce au modèle de recherche atmosphérique Meso‐NH(1), développé par Météo‐France et le Laboratoire d'aérologie (LA/OMP, CNRS / Université Toulouse III).

    « La finesse de la simulation nous a conduits à adopter la méthode dite des frontières immergées. Elle consiste à intégrer les hétérogénéités de surface, en l'occurrence les bâtiments, au sein de la zone de calcul du modèle numériquemodèle numérique. Notre grille de calcul contient donc des points à l'intérieur des bâtiments » complète Thierry Bergot. Cette méthode, encore jamais utilisée pour simuler des phénomènes atmosphériques à petite échelle, a l'avantage de pouvoir être transposée aisément à n'importe quel site présentant d'autres types d'hétérogénéités de surface.