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Le Giec était en réunion à Brest cette semaine. Jean Jouzel répond aux questions de Futura-Sciences. © siren-com, Wikipédia, cc by-sa 3.0
Jean Jouzel est vice-président du groupe de travail I du Giec, qui étudie les principes physiquesphysiques du changement climatique. De 2001 à 2008, il a dirigé l'Institut Pierre Simon Laplace. En 2002, le CNRS lui décerne la médaille d'or, la plus haute distinction pour la recherche scientifique française. En 2007, il reçoit avec le Giec, le prix Nobel de la paix.
Cette semaine, après avoir accompagné Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'Écologie, lors de la conférence de presse présentant les mesures d'adaptation au changement climatique, il a rejoint ses confrères climatologuesclimatologues à Brest pour la réunion du groupe de travail I du Giec.
C'est à l'issue de cette réunion que Jean JouzelJean Jouzel a bien voulu répondre aux questions de Futura-Sciences.
Le premier groupe de travail du Giec était en réunion de travail à Brest. Jean Jouzel, vice-président du groupe, a répondu à nos questions à l'issue de la réunion. © cherrylynx, Flickr, CC by 2.0
Futura-Sciences : Quels étaient les principaux objectifs de cette réunion du groupe de travail I ?
Jean Jouzel : Le but principal était que les différents auteurs des chapitres se retrouvent et qu'ils retouchent leurs écrits en fonction des différents commentaires. Nous avons aussi beaucoup travaillé sur la relation entre les chapitres, puisqu'il y a pas mal de thèmes qui se recoupent, ainsi que sur la longueur des chapitres.
On a aussi créé une rubrique FAQ (Frequently Asked Questions). C'est important parce que ça permet de répondre aux questions que se posent les gens. Nous tentons d'y répondre de la manière la plus simple possible.
À l'issue de cette réunion, tout le monde repart avec pour mission d'écrire une nouvelle version des chapitres pour le mois de novembre. Puis ces derniers seront soumis à des commentaires, externes cette fois-ci.
Futura-Sciences : Quels seront ces grands chapitres ?
Jean Jouzel : Il y a d'abord quatre chapitres d'observation. Observation de l'atmosphère, de l'océan, de la cryosphère et des données du passé.
Puis on a écrit trois chapitres sur les différents mécanismes. Celui du cycle du carbone et des autres cycles biogéochimiques et on a introduit un nouveau chapitre : les relations entre les nuagesnuages, les aérosolsaérosols et le rayonnement. Ces notions sont très importantes parce que les interactions entre les nuages et les aérosols sont probablement à l'origine d'une partie significative des erreurs concernant les projections du changement climatique. Cette fois-ci, on a pas mal de nouvelles données, notamment des données satellitaires. Elles nous aideront à comprendre ces interactions. Je pense que ce nouveau chapitre sera très intéressant.
Suit un chapitre sur les forçages puis un sur l'attribution du réchauffement climatiqueréchauffement climatique. C'est une thématique très discutée. Est-ce que le réchauffement actuel est déjà lié aux activités humaines ? Dans le dernier rapport, on avait conclu que c'était très vraisemblablement le cas pour le réchauffement des cinquante dernières années. Il y a beaucoup de nouvelles données là-dessus aussi, avec de nombreux nouveaux modèles. Ils permettront de voir si les conclusions du dernier rapport sont modifiées ou renforcées.
Encore une nouveauté, nous avons décidé de scinder en deux le chapitre sur les projections du changement climatique. La première partie concernera les projections à court terme. C'est important parce que c'est ce qui retient l'attention des décideurs. Enfin, le chapitre sur le niveau de la mer sera très regardé parce qu'il y a eu beaucoup d'incertitudes sur ce sujet.
Futura-Sciences : Y a-t-il déjà des grands axes, des nouveautés qui se dégagent de ce rapport ?
Jean Jouzel : L'idée, c'est d'arriver, dans chacun des domaines, à faire une synthèse critique et à faire la part des choses, mais il n'y a pas d'articles qui n'aient pas déjà été portés à la connaissance du public.
Futura-Sciences : Par rapport au 4e rapport, est-ce que le Giec va annoncer une aggravation de la situation ?
Jean Jouzel : Oui. Par exemple, on sait que les émissionsémissions de gaz à effet de serregaz à effet de serre ont augmenté très rapidement au cours de la dernière décennie. Mais pour l'instant, il n'y a pas encore de grand résultat qui ressorte.
Futura-Sciences : Vous étiez mercredi dernier en compagnie de Nathalie Kosciusko-Morizet, qui dévoilait son plan d'adaptation au changement climatique. Ce plan vous semble-t-il suffisant pour faire face à la situation ?
Jean Jouzel : Le plan est intéressant parce qu'il anticipe bien le problème et il est mis en place relativement rapidement. C'est un des premiers plans d'adaptation qui soit proposé en Europe. Le contenu est très riche, mais le problème c'est le passage de ce plan à la réalité.
Il y a beaucoup de mesures, mais leur succès passe par leur réelle applicationapplication, et par l'application de leurs décrets. C'est quand même beaucoup de travail... Il y a un comité de suivi, c'est aussi ce qui est intéressant pour vérifier comment les recommandations sont mises en œuvre et si elles le sont. Je ne dirais pas que cet aspect m'inquiète, mais il va falloir surveiller. L'adaptation, c'est beaucoup de bon sens et d'anticipation et c'est ce qu'on retrouve dans ces mesures.
Futura-Sciences : Quelles sont les prochaines étapes du groupe de travail I du Giec ?
Jean Jouzel : La prochaine réunion aura lieu à Marrakech en avril et la suivante en Australie, en janvier 2013. Quant à l'approbation du rapport, elle aura lieu en septembre 2013. Donc cette réunion à Brest, même si elle a peu de visibilité médiatique, était importante.