La fonction d'économie de batterie de l'application mobile Uber sait détecter l'autonomie restante du téléphone. Selon les constatations de ce service de véhicule de transport avec chauffeur, les clients dont le smartphone est sur le point de s'éteindre seraient susceptibles d'accepter des hausses de tarif très substantielles. Uber assure toutefois qu'il n'utilise pas cette information…

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    Le scénario est le suivant : en tant qu'utilisateur d'Uber, ce service de voiture de transport avec chauffeur (VTC), vous avez besoin de vous rendre quelque part. Confiant, vous dégainez votre smartphone et lancez l'applicationapplication afin de trouver un chauffeur. Las, vous constatez que l'indicateur de votre batterie a viré au rouge. Il faut faire vite car il ne vous reste plus que quelques minutes avant que le téléphone ne s'éteigne. Seriez-vous prêt à accepter un tarif plus élevé dans ces circonstances ? Apparemment oui si l'on en croit Uber qui a évalué cette situation.

    Lors d'un entretien pour l'émissionémission The Hidden Brain, diffusée en podcast, Keith Chen, économiste comportemental à l'UCLA (université de Californie, à Los Angeles) et directeur des études économiques chez Uber, a fait une révélation surprenante. L'entreprise a la capacité de connaître le niveau de batterie d'un smartphone et a remarqué que les personnes dans ce cas de figure étaient plus enclines à accepter des hausses de tarif.

    Il faut savoir que le modèle économique d'Uber repose sur le surge pricing ou « tarification dynamique ». Il s'agit d'un algorithme qui ajuste le prix des courses selon la demande. Plus la demande est forte, plus les prix seront élevés. Un client pressé acceptera de payer plus cher pour obtenir une voiture très rapidement tandis qu'un client ayant la possibilité d'attendre bénéficiera d'un tarif plus raisonnable.

    En ce qui concerne la hausse des tarifs, Keith Chen, directeur des études économiques chez Uber, explique avoir constaté qu’un chiffre multiplicateur rond est moins bien perçu par les clients. Par exemple, si le prix de la course est multiplié par 2, ils auront tendance à penser qu’il s’agit d’une hausse opportuniste pas forcément justifiée. Cependant, si l’augmentation est de 2,1 fois le prix normal, ils seront davantage enclins à se dire que ce prix a été calculé au plus juste. Ainsi, révèle le spécialiste, les clients d'Uber sont plus nombreux à accepter des courses 2,1 fois plus chère que des courses 2 fois plus chères… © Alexey Boldin, Shutterstock

    En ce qui concerne la hausse des tarifs, Keith Chen, directeur des études économiques chez Uber, explique avoir constaté qu’un chiffre multiplicateur rond est moins bien perçu par les clients. Par exemple, si le prix de la course est multiplié par 2, ils auront tendance à penser qu’il s’agit d’une hausse opportuniste pas forcément justifiée. Cependant, si l’augmentation est de 2,1 fois le prix normal, ils seront davantage enclins à se dire que ce prix a été calculé au plus juste. Ainsi, révèle le spécialiste, les clients d'Uber sont plus nombreux à accepter des courses 2,1 fois plus chère que des courses 2 fois plus chères… © Alexey Boldin, Shutterstock

    La tarification dynamique d’Uber et ses nombreux critères

    L'idée de base est de créer un effet d'aubaine pour les chauffeurs Uber afin de les inciter à se rendre rapidement sur les zones en tension. C'est de la sorte que le service assure un haut niveau de disponibilité. Dans des zones urbaines denses, quelques minutes suffisent pour trouver un chauffeur. Le fonctionnement de l'algorithme Uber est évidemment secret et on ignore exactement quels critères sont pris en compte. Le lieu, le moment de la journée, les conditions météorologiques et de circulation jouent un rôle.

    Toutefois, l'outil peut aussi faire preuve d'un opportunisme mal venu. Ainsi, en décembre 2014, lors de la prise d'otage du Lindt Chocolat Cafe, à Sydney (Australie), les prix des Uber avaient été multipliés par quatre pour les personnes cherchant à fuir le centre-ville. Face à la polémique, la société avait rapidement présenté ses excuses et remboursé les clients lésés.

    Dès lors, faut-il penser qu'Uber exploite avec cynisme les données sur le niveau de batterie des mobiles pour gagner plus d'argentargent ? Rien ne permet de l'affirmer. Mais, même si elle ne s'en sert pas, comment l'entreprise a-t-elle accès à cette information ?

    Sur AndroidAndroid, iOSiOS et les autres systèmes d'exploitation mobiles, il existe un mode d'économie de la batterie. Arrivé à un certain seuil, cette option, qui doit être activée manuellement par l'usager, va couper les fonctionnalités les plus énergivores (GPS, Bluetooth, Wi-Fi...) afin de prolonger au maximum la duréedurée de vie de la batterie. Les applications mobiles peuvent elles aussi communiquer avec cette fonction pour pouvoir désactiver les options gourmandes en énergieénergie.

    Autrement dit, l'application Uber sait lorsqu'un smartphone passe en mode économie de batterie. Keith Chen, qui étudie les effets psychologiques de la tarification dynamique pour la rendre plus acceptable, a expliqué que c'est de façon « accidentelle » que l'un des membres de son équipe a découvert que les clients étaient prêts à payer plus cher lorsque le niveau de batterie de leur smartphone était bas. « Nous n'utilisons absolument pas ces données, a-t-il assuré. Mais il s'agit d'un aspect psychologique intéressant du comportement humain ». On aimerait croire qu'Uber ne saurait ainsi profiter d'une telle situation pour gagner plus d'argent mais une part irrépressible de notre « comportement humain » ne peut s'empêcher de douter...