En Espagne vient d'être découvert un reste fossile de ce qui pourrait être le plus ancien humain connu en Europe de l'ouest. Attribué à Homo antecessor, peut-être l'ancêtre commun de l'homme de Néandertal et de l'homme moderne, il vient bousculer l'histoire des migrations humaines entre l'Afrique et l'Europe.

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    José Bermúdez de Castro, à gauche, et Eudald Carbonell, à droite, examinent leur trouvaille. © EIA/Jordi Mestre

    José Bermúdez de Castro, à gauche, et Eudald Carbonell, à droite, examinent leur trouvaille. © EIA/Jordi Mestre

    C'est dans la Sima deldel Elefante (le gouffregouffre de l'Eléphant), l'une des grottes du massif d'Atapuerca, près de Burgos, au nord de l'Espagne, que l'équipe d'Eudald Carbonell a découvert, l'été dernier, une petite mâchoire humaine, porteuse de quatre dents. Ces mêmes grottes, dans trois gisementsgisements différents, ont déjà fourni par le passé de nombreux restes d'hominidéshominidés mais datant de 300.000 ans dans la grotte Sima de los Huesos (le gouffre des os) et de 780.000 à 800.000 ans dans le gisement de La Gran Dolina (la grande dolinedoline). Mais cette mâchoire serait bien plus ancienne. D'après la datation effectuée par les chercheurs espagnols de l'université Rovira i Virgili in Tarragona, qui viennent de publier leurs résultats dans Nature, elle serait vieille de 1,1 à 1,2 million d'années, ce qui en ferait le plus ancien fossilefossile humain d'Europe de l'ouest.

    A quelle espèceespèce appartenait le ou la propriétaire de cette mâchoire ? Eudald Carbonell et ses collègues l'attribuent provisoirement à HomoHomo antecessor, une espèce dont l'existence n'est pas prouvée mais dont on a émis l'hypothèse en 1994, après la découverte des nombreux fossiles (une centaine de restes) dans la grotte Sima de los Huesos. H. antecessor serait le dernier ancêtre communancêtre commun entre H. neandertalensis (l'Homme de NéandertalNéandertal) et H. sapiens (l'homme actuel). Considérant la taille de la mâchoire, les chercheurs pensent qu'il s'agissait d'un individu femelle.

    La mâchoire découverte dans le gouffre de l'Eléphant, au sein du massif d'Atapuerca, qui a manifestement vu passer de nombreux hominidés... © EIA/Jordi Mestre

    La mâchoire découverte dans le gouffre de l'Eléphant, au sein du massif d'Atapuerca, qui a manifestement vu passer de nombreux hominidés... © EIA/Jordi Mestre

    Deux millions d'années de migration

    L'époque de l'expansion humaine hors d'Afrique et de son installation en Europe et en Asie est une question toujours débattue. Le plus ancien fossile d'hominidé connu en Europe a été trouvé loin à l'est, dans les montagnes du Caucase, à Dmanisi, en Georgie, et date de 1,7 à 1,8 million d'années. Mais à l'ouest, les quelque 800.000 ans des précédents fossiles d'Atapuerca constituaient un record.

    Cette nouvelle découverte complique un peu le tableau de ces migrations entre l'Afrique, l'Europe et l'Asie, qui se sont sans doute étalées sur des durées très longues et mettent en scène plusieurs espèces. L'homme de Dmanisi serait un Homo erectusHomo erectus, à moins qu'il ne s'agisse d'une espèce particulière, à laquelle on a donné le nom de H. georgicus. Il y a 300.000 ans, H. heidelbergensis se promenait en Allemagne mais, avant eux, H. ergaster, inventeur du feu, avait déjà exploré le monde au-delà de l'Afrique.

    Il reste encore bien des fouilles à effectuer pour tracer précisément les routes des migrations humaines des deux derniers millions d'années...