Les larmes d’une femme agressée pourraient-elles apaiser le comportement de son agresseur ? Après des études sur les rongeurs, les résultats sur l’humain semblent aller dans ce sens, sans toutefois prouver la cause biologique.


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    Dans la nature, les mammifèresmammifères utilisent des fluides corporels (sueur, urine, etc.) pour transmettre des signaux chimiques sociaux. Les larmes pourraient jouer ce même rôle, bien que Charles DarwinCharles Darwin ne semblait leur trouver aucune autre fonction utile que celle de lubrifier l'œil. Le père de la théorie de l'évolutionthéorie de l'évolution estimait que les larmes « émotionnelles » avaient dû évoluer chez l'humain au hasard.

    Les larmes, une protection contre l’agression ?

    Pourtant, de nombreuses études précédentes ont mis en évidence des signaux sociaux dans les larmes de rongeursrongeurs et dont l'objectif serait de diminuer l’agressivité des animaux. Ainsi, dans les combats entre deux souris mâles, les larmes réduiraient le comportement agressif du mâle dominant envers le dominé. Chez l'humain, la recherche sur le sujet ne fait que débuter. Le professeur Noam Sobel et son équipe de l'Institut Weizmann des sciences en Israël ont émis l'hypothèse que les larmes humaines contiennent également des substances chimiques qui servent de signaux sociaux. Les résultats de l'étude sont publiés dans PLOS Biology.

    « Nous avons montré que les larmes activent les récepteurs olfactifs et qu'elles modifient les circuits cérébraux liés à l'agression, réduisant de manière significative le comportement agressif, a déclaré Noam Sobel. Ces résultats suggèrent que les larmes sont une couverture chimique, offrant une protection contre l'agression, et que cet effet est commun aux rongeurs et aux humains ».

    Pour chaque expérience, les chercheurs ont utilisé près de 1,5 millilitre de larmes par participante. Les larmes ont été recueillies au cours d'environ 125 séances de don auprès de 6 femmes volontaires, qui ont été sélectionnées pour leur capacité à pleurer facilement. © Laura Pashkevich, Fotolia
    Pour chaque expérience, les chercheurs ont utilisé près de 1,5 millilitre de larmes par participante. Les larmes ont été recueillies au cours d'environ 125 séances de don auprès de 6 femmes volontaires, qui ont été sélectionnées pour leur capacité à pleurer facilement. © Laura Pashkevich, Fotolia

    Deux expériences menées sur peu de participants

    Les chercheurs ont mené deux types d'expérience sur des hommes exposés soit à des larmes de femmes, soit à des solutions salines témoins, sans pouvoir distinguer l'une de l'autre car elles toutes sont inodores. D'un côté, six femmes âgées de 22 à 25 ans ont fourni des « larmes émotionnelles » après avoir regardé des extraits de films tristes. De l'autre, 25 hommes ont été invités à renifler l'une ou l'autre des solutions, puis à participer à un jeu monétaire conçu pour susciter un comportement agressif d'un joueur à l'égard d'un autre joueur (en pensant qu'il trichait). Résultat : les joueurs exposés aux larmes se sont montrés 43,7 % moins agressifs que les autres.

    Dans la deuxième expérience, les chercheurs ont voulu connaître l'effet de l'inhalation des larmes sur le cerveau. Environ le même nombre de participants a subi un examen d'imagerie par résonance magnétique fonctionnelleimagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) avec le même type d'expérience de jeu. L'imagerie fonctionnelle a montré que deux régions du cerveau liées à l'agression -- le cortex préfrontal et l'insulainsula antérieure -- étaient moins actives lorsque les hommes respirant les larmes. En outre, il existerait une corrélation significative entre la condition expérimentale (larmes contre solution saline) et l'activité dans ces régions.

    Selon les auteurs, les larmes de femmes contiennent un signal chimique inodore qui diminuerait les niveaux de testostéronetestostérone et l'agressivité associée. Il est important de noter que ces chercheurs partent du prérequis qui accuse un niveau élevé de testostérone de causer une agressivité majorée chez les hommes, ce qui pourrait être une idée reçue. Par ailleurs, le nombre de participants était relativement faible.