Réunis au siège de l’OMS les 16 et 17 février, chercheurs, éditeurs et autorités sanitaires ont majoritairement approuvé l’idée de la publication intégrale des études polémiques concernant les virus de la grippe H5N1 créés en laboratoire. Cependant, il est préconisé d’attendre encore plusieurs semaines avant de rendre publiques toutes ces informations.

au sommaire


    L'OMS évoque un accord assez fort. En effet, l'affaire polémique des virus H5N1 créés en laboratoire vient de prendre un nouveau tournant depuis la réunion les jeudi 16 et vendredi 17 février au siège de l'institution de l'ONU à Genève (Suisse). Contrairement au souhait du National Science Advisory Board for Biosecurity (NSABB), une autorité sanitaire américaine qui demandait une publication partielle des travaux, il a été décidé entre les 22 acteurs présents de tout dévoiler, après avoir pris cependant le temps nécessaire pour une évaluation complète.

    Un rappel des faits s'impose. Des chercheurs néerlandais dirigés par Ron Fouchier avaient déclaré en septembre dernier avoir mis au point un virus de la grippe aviaire devenu très contagieuxcontagieux chez des furets alors qu'il ne se transmettait que par l'intermédiaire d'oiseaux contaminés. Quelque temps plus tard, une équipe américaine, menée par Yoshihiro Kawaoka leur emboîtait le pas et parvenait au même résultat. Un virus mortel à 60 % qui devient hautement transmissible chez les mammifèresmammifères (donc potentiellement chez l'Homme) a profondément inquiété certaines autorités sanitaires.

    Parmi elles, le NSABB s'est manifesté et a demandé à titre consultatif aux revues Science et Nature, de ne pas publier les informations les plus sensibles, au nom des risques de bioterrorisme. Ce à quoi les deux journaux se sont pliés, prévoyant de publier en mars des versions édulcorées des travaux incriminés.

    Personne n’est en mesure d’expurger les données sensibles

    L'OMS a cependant voulu reprendre le contrôle des opérations et a donc organisé la semaine passée une réunion à laquelle étaient conviés une vingtaine d'invités, parmi lesquels Ron Fouchier, Yoshihiro Kawaoka, les directeurs de plusieurs organismes sanitaires dont le NSABB, les éditeurs des deux revues concernées ainsi bien sûr que des spécialistes de l'OMS.

    Les laboratoires qui disposent des virus du H5N1 sont hautement sécurisés et le personnel tout à fait qualifié. Si effectivement les chercheurs néerlandais et américains disposent de mutants très contagieux chez les furets, ils sont maintenus dans un lieu sûr. Plusieurs laboratoires détiennent dans leurs réfrigérateurs des virus qui ont été très mortels par le passé, et aucun d'entre eux n'est jamais ressorti de ces lieux confinés. © Sanofi Pasteur, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Les laboratoires qui disposent des virus du H5N1 sont hautement sécurisés et le personnel tout à fait qualifié. Si effectivement les chercheurs néerlandais et américains disposent de mutants très contagieux chez les furets, ils sont maintenus dans un lieu sûr. Plusieurs laboratoires détiennent dans leurs réfrigérateurs des virus qui ont été très mortels par le passé, et aucun d'entre eux n'est jamais ressorti de ces lieux confinés. © Sanofi Pasteur, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Les discussions ont abouti sur un accord qui prévoit la publication intégrale des deux études. Premièrement parce que les personnes présentes sont d'avis que ces travaux contribuent davantage à favoriser la santé publique et la recherche scientifique plutôt qu'à faciliter une attaque bioterroriste. Deuxièmement, pour des raisons plus pragmatiques, parce qu'il n'existe aucun mécanisme officiel qui précise comment retirer les données sensibles ni qui est en mesure de le faire.

    Le virus H5N1 n’a pas fini de faire parler de lui

    Malgré tout, le moratoire de deux mois décidé le 20 janvier dernier par les scientifiques eux-mêmes est poursuivi le temps que les discussions autour des risques sur la biosécurité aboutissent complètement. De ce fait, les dates de publications des études ne sont pour l'heure pas encore connues. 

    Ces conclusions laissent un peu dubitatif Bruce Alberts, rédacteur en chef de Science, qui fait remarquer que la situation n'est pas encore démêlée. « Tout n'est pas encore complètement clair dans mon esprit en ce qui concerne cette décision, mais une chose est sûre : le programme que nous (NDLRNDLR : les revues Nature et Science) avions prévu pour le mois de mars doit être revu. »

    Cette réunion ne constituait selon l'OMS qu'une première étape pour faciliter la discussion entre opinions divergentes. Des précisions supplémentaires seront fournies à l'avenir. L'affaire est donc toujours à suivre...