Une équipe de scientifiques vient - enfin - d'identifier le siège de la perception en trois dimensions à l'intérieur du cerveau humain. Cet exploit, qui repose sur une suite d'expérimentations particulièrement complexes, ouvre la voie à de nouvelles recherches.

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    Coupe sagittale d'un cerveau humain en fMRI. Crédit UCL.

    Coupe sagittale d'un cerveau humain en fMRI. Crédit UCL.

    Qui ne s'est jamais interrogé devant les exploits d'un jongleur professionnel ? Au départ d'informations en deux dimensions transmises par chaque œil, son cerveau doit reconstruire une image non seulement tridimensionnelle, mais aussi quadridimensionnelle car la notion de temps et de vitessevitesse est ici prépondérante afin que l'artiste puisse projeter la main dans la direction où se trouvera l'objet lorsqu'il devra le saisir. Le tout, d'un geste automatisé et sans aucune possibilité de décision raisonnée.

    Le professeur Guy Orban, neurobiologiste de l'université catholique de Louvain (Belgique) et ses collègues ont réussi à localiser le centre de traitement de ces deux informations visuelles (position spatiale, vitesse et direction) au sein du cerveau, au niveau d'une zone appelée cortex intrapariétal antérieur (anterior intraparietal cortex, ou AIP).

    Processus d'identification

    L'identification d'un objet à trois dimensions repose, chez les primatesprimates, sur la vision binoculaire. L'image perçue par chaque œil est légèrement différente, c'est ce que les spécialistes nomment la disparité binoculaire spatiale. En second lieu, la forme d'un objectif se modifie pendant que celui-ci se déplace.

    Très longtemps, la façon dont notre cerveau arrive à intégrer ces données pour nous fournir une représentation de la réalité est restée un mystère. Afin de mieux pister ce processus, les chercheurs ont procédé à deux séries d'expérimentations non traumatisantes sur des primates, qui font intervenir l'Imagerie par Résonance Magnétique FonctionnelleImagerie par Résonance Magnétique Fonctionnelle (IRMf). Cette technique permet de visualiser l'activité siégeant dans un cerveau, en trois dimensions et en temps réel.

    La première expérience a consisté à présenter à des sujets simiesques des objectifs en trois dimensions, comme par exemple des trombones de bureau interconnectés. Ceux-ci étaient choisis pour être aisément identifiables par les singes, à condition toutefois de les apercevoir dans leur ensemble. Durant le test, des caches étaient disposés afin que l'objet n'apparaisse que partiellement à chaque oeil. Il s'agissait donc pour le cerveau d'assembler ces deux images complémentaires en une seule.

    Au cours de la seconde expérience, des images de synthèse en trois dimensions générées par ordinateurordinateur étaient soumises aux animaux, qui disposaient de leur vision binoculaire. La complexité des objets simulés sollicitait dans ce cas un processus de traitement de l'information en trois dimensions à partir d'une vision binoculaire réelle.

    Le rôle de l'AIP

    A l'analyse des résultats, Orban et son équipe ont constaté que lors des deux expériences, les informations ont convergé vers une zone unique du cerveau, l'AIP.

    A la faveur d'expériences antérieures, il avait déjà été établi que l'AIP intervenait lors du contrôle visuel des mouvementsmouvements de la main, entre autres, un type de synchronisation pratiquement exclusif aux primates, qui se sont distingués de cette manière des autres animaux au cours de l'évolution.

    La découverte des bases neuronales de la perception du relief à partir du mouvement visuel, en utilisant l'Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle (IRMf), renforce les connaissances des scientifiques sur le fonctionnement du cerveau. Elle pourrait permettre, dans un proche avenir, de mieux identifier l'origine de certaines déficiences ou de certains troubles comportementaux associés, et d'y remédier.

    Cette étude fait l'objet d'une publication dans la revue Neuron du 2 août 2007.