Manger local pour sauver la Planète serait finalement un mythe : cela n'a pas vraiment d'impact sur les émissions de gaz à effet de serre. Ce qui compte, c'est en fait ce que l'on mange, comment cela a été produit et comment on le cuisine !


au sommaire


    Environ 25 à 30 % de nos émissionsémissions de gaz à effet de serre proviennent de la nourriture. Mais manger local pour sauver la Planète serait en fait... une illusion. Si personne ne remet en question l'intérêt social, humain, pédagogique et économique de soutenir les producteurs de sa ville, département ou région, consommer local n'est en revanche pas toujours bénéfique pour l'environnement.    

    Le transport des aliments ne représente que 1 à 5 % des émissions de gaz à effet de serre

    Quelque 41 % des Anglais estiment par exemple que manger local est la meilleure façon de réduire les émissions de gaz à effet de serre liées à la nourriture, selon un sondage de Social Change Lab. La réalité est bien différente selon les données de l'organisme Our World in Data : ce que l'on choisit de manger a bien plus d'impact que la provenance géographique. La viande et les produits laitiers restent les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre liés à la nourriture, même s'ils sont produits à deux kilomètres de chez nous. Our World in Data a rassemblé les données de 38 000 fermes de production animale dans 119 pays différents. Pas moins de 29 types d'aliments concentrent la majorité des gaz à effet de serre : bœuf, agneau, fromage, lait, chocolat et café occupent les premières places du podium des aliments émetteurs de gaz à effet de serre. Pour chacun de ces aliments, le graphique montre clairement les actions qui mènent à l'émission des polluants : en vert, la transformation des terres nécessaires pour élever les animaux ou faire pousser les cultures ; en marron, la ferme en elle-même (déjections, énergieénergie et carburants nécessaires) ; en orange, la nourriture nécessaire pour l'élevage ; en bleu, les émissions liées à la transformation des animaux en aliments ; en rose, le transport ; en jaune, l'énergie nécessaire pour la conservation et congélation des aliments ; en gris, les emballages des aliments.

    L'impact environnemental de notre nourriture. © Our World in Data
    L'impact environnemental de notre nourriture. © Our World in Data

    Le constat est clair : pour la grande majorité des aliments, c'est la ferme en elle-même qui émet la plus grande part des émissions de gaz à effet de serre, et de loin. Derrière, on trouve la transformation des terres qui passe parfois par la déforestation, puis la nourriture animale, et la transformation des animaux en aliments (abattage et découpe). La part des transports dans les émissions de gaz à effet de serre n'est que très limitée, même pour les aliments qui voyagent à l'international. Quel que soit le voyage effectué par la nourriture pour parvenir jusque chez nous, le transport ne représente finalement que 1 à 5 % de la pollution pour la majorité des aliments, à l'exception de certains comme le sucresucre de canne et l'huile d'olive (jusqu'à 20 % des émissions). Consommer du bœuf, du café, du riz, du chocolat, du fromage, ou encore des tomates qui viennent du village d'à côté n'a finalement que très peu d'impact sur les gaz à effet de serre, et par extension sur le réchauffement climatique.

    Les conséquences environnementales varient en fonction du type de ferme

    Bien évidemment, même si les produits animaux sont les plus énergivores et les plus polluants, chaque ferme de production animale n'a pas le même impact environnemental : entre un troupeau de 30 vaches essentiellement en liberté dans les montagnes et pratiquant l'éco-pâturage et une usine de 1 000 vaches enfermées toute l'année, la différence est immense et les données de Our World in Data sont une simple moyenne entre différents types d'élevage. De même que consommer des végétaux provenant de cultures intensives et consommer des végétaux issus d'un producteur respectueux des terres et pratiquant la diversification des cultures. Voilà pourquoi, si l'on veut réduire nos émissions de gaz à effet de serre, le simple fait de consommer local n'a pas grand intérêt : l'impact sur l'environnement dépend de la manière dont notre nourriture a été produite, qu'il s'agisse de nourriture animale ou végétale. Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, il est donc nécessaire d'être correctement informé sur la façon dont est produite notre nourriture, ce qui comprend son impact sur la transformation des terres.

    La manière dont sont élevés les animaux de ferme, et leur impact sur les terres naturelles, a bien plus d'impact que le transport effectué par la viande. © Chayakorn, Adobe Stock
    La manière dont sont élevés les animaux de ferme, et leur impact sur les terres naturelles, a bien plus d'impact que le transport effectué par la viande. © Chayakorn, Adobe Stock

    La façon dont on cuisine nos aliments a un impact majeur sur la pollution

    Mais pour une action réellement significative sur la Planète, cela n'est pas suffisant : beaucoup d'études sur l'impact environnemental de la nourriture oublient un paramètre primordial, la cuisine. En plus du gaspillage alimentaire qui est également source de pollution, la façon dont on cuisine nos aliments aussi : les cuisinières à gaz sont l'appareil de cuisine qui produit le plus de méthane, elles en émettent même lorsqu'elles sont éteintes. Une petite partie s'en échappe en continu lorsque l'appareil ne fonctionne pas. Dans certains pays, la cuisine s'effectue encore majoritairement avec des poêles à boisbois, une source de pollution majeure, surtout s'ils sont en mauvais état. Dans ce cas, consommer local n'a pas vraiment d'impact si les aliments sont cuits dans une cuisinière à gaz ou un poêle à bois !

    Pour espérer faire une réelle différence en matièrematière d'environnement, il faut privilégier des aliments produits par des fermes écologiques respectueuses des terres et du bien-être animal, d'où qu'ils viennent, puis les cuisiner en utilisant l'électricité avec des appareils en bon état. Acheter local afin de soutenir son village, sa région ou son pays, est un bonus qui doit nécessairement prendre en compte ces autres critères.

    La plupart des études sur l'impact environnemental de la nourriture oublient de prendre en compte la pollution générée par certains types de cuisson, comme le gaz. © Canva
    La plupart des études sur l'impact environnemental de la nourriture oublient de prendre en compte la pollution générée par certains types de cuisson, comme le gaz. © Canva