Pour la première fois, une carte mondiale de la dispersion des larves de corail a été réalisée. Il apparaît que l’ouest de l’Indo-Pacifique et la Grande Barrière de corail ont de forts niveaux de connectivité, mais que certaines régions comme Hawaï ou la mer Rouge sont très isolées.

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    Sans les coraux durs, il n'y aurait pas de récifs coralliens. Les scléractiniairesscléractiniaires sont des cnidaires pourvus d'un exosquelette chargé en carbonate de calcium. Ils contribuent, à leur mort, à la fortification de la base du récif, et sont donc essentiels à la conservation de ces véritables niches écologiques que sont les barrières coralliennes. L'enrichissement d'un récif en coraux durs dépend de la répartition des larves par les courants océaniques. Un corailcorail est le plus souvent hermaphroditehermaphrodite, il pond une fois par an et s'autoféconde. Les larves sont ensuite emportées par les courants océaniques.

    La question de savoir comment les larves se dispersent et dans quelle région elles s'accrochent aux récifs est complexe. Il n'est pas possible de traquer in situ la trajectoire des larves dans chaque région de ponte. Une méthode consiste à réaliser des analyses génétiquesgénétiques dans diverses régions, de façon à identifier la connectivité des espècesespèces à l'échelle régionale ou mondiale. En complément, parce que les ordinateursordinateurs sont des calculateurs de plus en plus puissants, l'élaboration de modèles de répartition se développe.

     <br />Cette carte de distribution des larves de corail à l'échelle mondiale a été réalisée à partir des trajectoires simulées de plus 115 millions de larves. L'échelle de couleur exprime le logarithme du nombre de larves individuelles passant dans une cellule de 1° de côté. Les zones bleues présentent une faible quantité, et les rouges une quantité importante. © S. Wood <em>et al.</em>,<em> Global Ecology and Biogeography</em>, 2013
     
    Cette carte de distribution des larves de corail à l'échelle mondiale a été réalisée à partir des trajectoires simulées de plus 115 millions de larves. L'échelle de couleur exprime le logarithme du nombre de larves individuelles passant dans une cellule de 1° de côté. Les zones bleues présentent une faible quantité, et les rouges une quantité importante. © S. Wood et al., Global Ecology and Biogeography, 2013

    Jusqu'à présent, les modèles de dispersion des larves se concentraient sur une région, restant à une échelle spatialement restreinte. Une équipe de recherche anglo-américaine fournit pour la première fois une carte de dispersion globale des larves. L'objectif était de définir une vision globale de la connectivité entre les différents récifs coralliens du monde. Les résultats de modélisationmodélisation, publiés dans la revue Global Ecology and Biogeography, suggèrent que 50 % des connexions se produisent sur une distance de 50 à 100 km. Mais dans de rares régions, la bathymétriebathymétrie du littoral sert de tremplin pour les larves, et elles peuvent aller jusqu'à 9.000 km du lieu de ponte.

    L’ouest de l’Indo-Pacifique et la Grande Barrière de corail sont connectés

    Le centre du Pacifique est une sorte de barrière de passage. Les larves pondues à une extrémité du bassin ne parviennent presque jamais de l'autre côté. D'après les simulations, confirmées par les tests génétiques, il peut y avoir un tremplin depuis les îles Galápagos vers les îles Marquises. Les régions d'Hawaï, de l'île de Pâques, de la mer Rouge et de l'est de l'Atlantique semblent être des régions très isolées, où on ne trouve pas de connectivité avec le reste des récifs coralliens.

    Des pics de connectivité sont identifiés entre l'ouest de l'Indo-Pacifique et la Grande Barrière de corail. La dispersion des larves et leur introduction dans de nouvelles populations sont courantes entre ces deux grandes zones coralliennes. Un pic secondaire est identifié dans l'ouest de l'océan Indien, région connue pour sa grande diversité d'espèces de coraux.

    Plus de 12.000 habitats considérés

    Pour établir une telle carte globale, les chercheurs ont dû paramétrer le modèle. D'abord, le modèle simule une période de huit ans, durant laquelle 100 larves ont été injectées chaque mois dans les 12.397 habitats considérés par le modèle. En tout, il y a eu 93 événements de dispersion, ce qui fait au total 115 millions de larves. Les larves, prises dans les courants, grandissent et quittent la colonne d'eau au bout d'un certain temps pour se fixer sur les récifs. Dans le modèle, il est estimé que durant les dix jours qui suivent le lâcher, 10 % des larves se fixent chaque jour. Par ailleurs, la capacité de fixation du corail a une duréedurée limitée. S'il devient trop gros avant de se fixer, son corps nécessite plus d'énergieénergie qu'il ne peut en fournir. Le temps dont il dispose pour se fixer a été déterminé par une loi mathématique.

    Cette vision globale de la dispersion des coraux comble les lacunes des études génétiques et des modèles régionaux de connectivité. Elle permet d'établir la distribution mondiale, ce qui est nécessaire lorsqu'on veut étudier la réponse des coraux au changement climatique et aux forçages anthropiques. D'un autre côté, si elle atteint un récif corallien, une larve doit affronter des prédateurs et bien d'autres obstacles avant de réussir à se développer en polype. Le modèle ne prend pas ces forçages précisément en compte, et ne doit donc pas être vu comme un outil exact pour un récif particulier.