Après la petite fille guérie du Sida, une nouvelle étude montre que 14 Français vivent depuis plusieurs années avec le VIH sans prendre de traitement tout en contrôlant la charge virale grâce à une prise en charge très précoce. Cela voudrait-il dire que 15 % des patients séropositifs pourraient stopper leurs antirétroviraux sans mettre leur santé en danger ?

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    Certains patients séropositifs parviennent naturellement à contrôler le VIH (schématisé à l'image), même si ces cas sont rares. Grâce à une prise en charge précoce, 14 patients français survivent désormais sans aucun traitement contre leur infection tout en contrôlant le virus du Sida. Une performance qui pourrait concerner environ 15 % des malades. © Los Alamos National Laboratory, Wikipédia, DP

    Certains patients séropositifs parviennent naturellement à contrôler le VIH (schématisé à l'image), même si ces cas sont rares. Grâce à une prise en charge précoce, 14 patients français survivent désormais sans aucun traitement contre leur infection tout en contrôlant le virus du Sida. Une performance qui pourrait concerner environ 15 % des malades. © Los Alamos National Laboratory, Wikipédia, DP

    Il y a deux semaines, la communauté scientifique se réjouissait du cas de guérison fonctionnelle possible chez une petite fille née avec le virus du Sida grâce à des médicaments administrés dans les premières heures qui ont suivi la naissance. On suppose alors qu'elle devrait pouvoir vivre avec le virus toute sa vie sans prendre de traitement et sans tomber malade. En soi, ce cas n'est pas unique car il existe des personnes qui, naturellement, parviennent à contrôler leur charge virale, d'où leur nom de contrôleur.

    Cette annonce semble montrer que ce sort, qui permet de gérer l'infection sans prendre de médicament, pourrait ne pas être réservé aux 0,5 % des patients bénéficiant par chance de ces aptitudes, mais que des traitements antirétroviraux donnés à temps pourraient aboutir aux mêmes résultats. De nouveaux cas de guérisons fonctionnelles, déjà évoqués en juillet dernier, viennent de faire l'objet d'une publication dans Plos Pathogens.

    L'étude menée à l'Institut Pasteur impliquait des chercheurs de plusieurs centres hospitaliers français. Elle a concerné au total 14 patients. Tous infectés par le virus du Sida à l'âge adulte, ils ont bénéficié d'un traitement antirétroviral très précoce, dans les 10 semaines suivant leur contamination. Le protocoleprotocole thérapeutique a été maintenu pendant une période médiane de 3 ans. Chaque patient a ensuite interrompu son traitement, sous surveillance médicale... pour voir comment réagissait le virus. Surprise, leur système immunitaire a pu maintenir la charge virale au plus bas. En tout cas, à un niveau équivalent à celui des contrôleurs naturels.

    Les thérapies contre l'infection au VIH se composent de plusieurs médicaments antirétroviraux à prendre quotidiennement. Le traitement est donc très lourd et, de plus, ces produits ne sont pas dénués d'effets secondaires. Heureusement, certains patients pourraient éventuellement arrêter leur traitement sans risque de déclarer la maladie. © Wurfel, Wikipédia, cc by sa 3.0

    Les thérapies contre l'infection au VIH se composent de plusieurs médicaments antirétroviraux à prendre quotidiennement. Le traitement est donc très lourd et, de plus, ces produits ne sont pas dénués d'effets secondaires. Heureusement, certains patients pourraient éventuellement arrêter leur traitement sans risque de déclarer la maladie. © Wurfel, Wikipédia, cc by sa 3.0

    L’infection au VIH recule après plusieurs années sans traitement

    Mieux encore : les auteurs ont observé « une diminution du nombre de cellules infectées circulant dans le sang, au cours des quatre années qui ont suivi ». En effet, certains de ces patients ont cessé les antirétroviraux il y a plusieurs années. « Le traitement précoce a probablement limité l'extension des réservoirs viraux et préservé les réponses immunitairesréponses immunitaires », explique Christine Rouzioux, de l'hôpital Necker, co-auteur de l'étude.

    « Comme dans le cas du nourrisson américain, la mise sous traitement très précoce ne nous permet pas d'évaluer si nos 14 patients n'auraient pas contrôlé spontanément leur infection, admet Asier Saéz-Cirion, l'un des auteurs de cette recherche. Néanmoins, la plupart ne présentent ni les caractéristiques génétiques favorables ni le type de réponses immunitaires habituellement observés chez les contrôleurs naturels du VIHVIH. »

    Les résultats de cette étude plaident donc en faveur d'une initiation précoce du traitement après l'infection. Et donc d'un dépistagedépistage également précoce. Il ne s'agit pas pour autant d'envisager ce protocole thérapeutique comme méthode de préventionprévention. « Entre 5 et 15 % des patients ainsi traités réussissent à contrôler leur charge virale », insiste Asier Saéz-Cirion. Chez les autres, l'arrêt du traitement entraîne, dans les mois qui suivent, la réplicationréplication rapide du virus. De plus et comme le rappellent les auteurs, « cette méthode de traitement précoce ne peut pas guérir l'infection ». Cependant, une étude récente vient de montrer que si l'infection était bien traitée, les patients ne mourraient plus du Sida. La recherche avance donc à grands pas.