Une nouvelle étude prétend que l'acupuncture serait efficace pour réduire la survenue des crises d'angine de poitrine chronique en plus des traitements classiques. Pourtant, la méthodologie utilisée est peu convaincante comme souvent concernant ces pratiques ancestrales. Détails.


au sommaire


    C'est une nouvelle étude chinoise publiée dans le Journal of American Medicine Association qui suggère que la vraie acupuncture serait plus efficace qu'une fausse acupuncture pour réduire la survenue des angines de poitrine chroniques - un symptôme des maladies coronariennes, causé par une ischémie du myocardemyocarde - en plus des traitements classiques. En fait, si l'on se penche de plus près sur la méthodologie utilisée par les scientifiques, les effets prétendus ne sont pas au rendez-vous.

    Quelques rappels

    L'acupuncture est considérée, à juste titre pour l'instant, comme une pratique médicale douce, autrement dit, sans effet physiologique et thérapeutique propre. L'acupuncture, c'est cet art thérapeutique oriental qui se base essentiellement sur l'existence supposée des méridiensméridiens et des énergiesénergies. Des précisions sémantiques s'imposeraient pour savoir de quoi on parle lorsque l'on cite ces deux entités. Toujours est-il que rien ne semble prouver leurs existences à l'aide de nos outils de mesures actuels. La question qui se pose est donc : est-ce que l'acupuncture apporte un bénéfice thérapeutique lors de certaines affections ? Cette nouvelle étude affirme que c'est le cas chez les patients traités pour des angines de poitrine, sauf que ce n'est pas si clair que ça et nous allons voir pourquoi. 

    Le saviez-vous ?

    L'acupuncture pour anesthésier les opérations à cœur ouvert n'est jamais utilisée seule, elle est toujours combinée à des anesthésiants et à des entraînements à la respiration. De plus, elle ne semble pas efficace sur l'anesthésie elle-même mais seulement sur la morbidité post-opératoire et les coûts médicaux engendrés. Même question étant donné la faible qualité des essais : est-ce l'acupuncture ou simplement les effets contextuels qui sont à l'œuvre ?

    L'acupuncture face à ses biais

    Dans leur étude, ces scientifiques chinois - occupant des postes dans des universités médicales où l'acupuncture est largement enseignée - ont conduit leur expérience sur 404 patients choisis aléatoirement pendant 20 semaines, en testant soit la vraie acupuncture - autrement dit avec les « vrais » points -, soit une fausse acupuncture - avec des points choisis au hasard -, soit une acupuncture simulée, soit pas d'acupuncture. Les participants ainsi que les évaluateurs des résultats, les collecteurs de données et les statisticiens ne savaient pas quel groupe recevait quel traitement. Cependant, les praticiens, si. Leurs résultats démontrent alors une supériorité de la « vraie » acupuncture sur la fausse (4 fois plus de réduction d'angorangor), de la fausse sur la simulée (5 fois plus de réduction d'angor) et de la simulée sur aucun traitement (5,6 fois plus de réduction d'angor).

    Néanmoins, on peut se demander si le fait que les praticiens, connaissant le groupe de patients qu'ils traitent, n'insère pas des biais de traitement au sein de l'étude. On peut aussi penser à un éventuel faux positif, étant donné le nombre d'études limité et de piètre qualité sur le sujet (groupe contrôle pas toujours présent et jamais de double aveugle) ne permettant que trop peu les comparaisons et les évaluations. Enfin, les patients suivant déjà des traitements peuvent être plus motivés à prendre soin d'eux.

    Dans le paradigme scientifique actuel, rien ne prouve l'existence présupposée des méridiens et des énergies. © Wellcome Images
    Dans le paradigme scientifique actuel, rien ne prouve l'existence présupposée des méridiens et des énergies. © Wellcome Images

    Que faut-il penser de ces résultats ? 

    Premièrement, il faut se rappeler que le caractère crédible des données n'est pas la même chose que la crédibilité que l'on doit accorder à la théorie. En effet, il faut généralement comparer cela à d'autres hypothèses alternatives fécondes et juger laquelle paraît la plus vraisemblable. De plus, comme précisé plus haut, comment savoir si c'est bien la « vraie » acupuncture qui apporte un effet thérapeutique si des biais implicites et inconscients peuvent se cacher dans le traitement des patients ? Pourtant, il suffirait simplement de plusieurs essais en double - voire triple aveugle - dans différents contextes, pour connaître la réponse à cette question dans le paradigme statistique actuel de la p-value. Des indications seraient fournies au préalable à des novices concernant l'emplacement des points sans que ces derniers ne sachent ce qu'ils appliquent.

    Pour résumer, tant que des essais de meilleure qualité ne seront pas au rendez-vous, il sera difficile de juger l'efficacité thérapeutique réelle de l'acupuncture seule ou en adjonction des traitements classiques. Pour conclure, notons que les expérimentateurs semblent conscients des biais de leur étude mais leur conclusion, que voici, « par rapport à la fausse acupuncture, l'acupuncture simulée ou l'absence d'acupuncture, la vraie acupuncture en tant que traitement d'appoint au traitement anti-angineux a montré des avantages supérieurs pour le soulagement de l'angine de poitrine » ne s'accorde pas avec la prudence employée dans le reste de leur article.