Si les zombies ne sont probablement rien de plus qu'un objet de fiction, en psychiatrie, les morts-vivants ne sont pas strictement relégués au statut de légende. Ainsi, les personnes atteintes du syndrome de Cotard sont celles qui se rapprochent le plus de ces créatures à la frontière entre vie et mort : habitées par l'impression que leur corps est passé de vie à trépas, elles errent sans comprendre pourquoi elles ne sont pas encore passées de l'autre côté du voile.


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    Le syndrome de Cotard est une bête étrange parmi les créatures qui peuplent le monde de la psychiatrie. Caractérisé par une négation de l'existence de son propre corps, il oblige le sujet à mener son existence avec le sentiment de n'être rien de plus qu'un mort vivant, une coquille vide, un cadavre errant à la surface de la Planète. Typiquement présent dans le cas d'une dépression associée à une rupture psychotique, ce délire constitue une grande source de souffrance pour les personnes qui en sont atteintes.

    Spleen et morts-vivants

    Le syndrome de Cotard doit son nom au neurologue français, Jules Cotard (1840-1889), qui décrivit le trouble pour la première fois neuf ans avant sa propre mort. Il le désigna comme un trouble dépressif accompagné de mélancolie, d'anxiété, d'idées de damnation ou de rejet, d'insensibilité à la douleur, de négation de l'existence de son corps et, une fois sur deux, de délire d'immortalité. Le trouble fut catégorisé comme lypémanie, un terme introduit en 1819 par un autre Français, Jean-Étienne Esquirol, pour qualifier un état dépressif caractérisé par une profonde mélancolie et pouvant évoluer en obsession morbide ou en folie dépressive.

    Le syndrome de Cotard touche majoritairement les sujets jeunes, et particulièrement les femmes. © <em>Google Art Project</em>
    Le syndrome de Cotard touche majoritairement les sujets jeunes, et particulièrement les femmes. © Google Art Project

    Aujourd'hui, le syndrome de Cotard est divisé en trois types :

    • dépression psychotique caractérisée par de l'anxiété, de la mélancolie, de la culpabilité et des hallucinations auditives ;
    • type I, avec un délire hypocondriaque et nihiliste, ainsi que l'absence d'un épisode dépressif ;
    • type II, accompagné de dépression, d'anxiété, d'hallucinations auditives, de délire d'immortalité et de non-existence, ainsi que d'un comportement suicidaire.

    À cause de ces idées délirantes et de ces altérations, il n'est pas rare que les patients se mettent physiquement en danger. Tandis que certains cesseront de se laver, d'autres perdront la perception de la douleur ou iront jusqu'à s'affamer, ne voyant pas l'utilité de nourrir un corps mort.

    Une étude publiée dans le journal PubMeb en 2009 évoque le cas d'un patient convaincu de sa propre mort et inquiet du fait qu'on ne l'avait pas encore enterré. Une femme de 46 ans « avait l'impression constante de n'avoir aucune identité ou de "soi", et d'être seulement un corps sans contenu, racontent les chercheurs. En outre, elle était convaincue que son cerveau était absent, que ses intestins n'étaient plus là, et que tout son corps était translucidetranslucide. Elle refusait de prendre un bain ou douche parce qu'elle avait peur d'être soluble et de disparaître dans le siphonsiphon ».

    Le syndrome de Cotard, un trouble bien pris en charge

    De nombreux traitements ont été mis à l'épreuve afin de traiter cette patiente, victime d'un épisode dépressif, mais également d'un trouble bipolairetrouble bipolaire faisant l'objet d'attention médicale depuis ses 29 ans : « LithiumLithium, valproate, carbamazépinecarbamazépine, halopéridol, olanzapine, rispéridone, clozapine, pimozide, sulpiride, clomipramine, sertraline, paroxétineparoxétine, fluoxétine, citalopram, mirtazapine et venlafaxine. La thérapiethérapie électroconvulsive (ECT) [pourtant remarquablement efficace dans le traitement des troubles dépressifs et la schizophrénie, ndlr] a également été employée, sans effet ». Dans des cas moins extrêmes, de nombreux recours médicamenteux ont fait leurs preuves et l'ECT a généralement fourni de bons résultats. Le syndrome peut, par ailleurs, se résorber de lui-même, pour le plus grand soulagement de ces « morts-vivants » pour le moins atypiques.