Qu'on l'appelle réalité virtuelle ou augmentée, elle s'apprête à sortir des applications industrielles haut de gamme pour investir les jeux vidéo, les laboratoires, les bureaux ou la télévision. Laval Virtual, référence mondiale, a bien montré l'inflexion du secteur. Futura-Sciences, partenaire de cet événement, en a arpenté les stands et a repéré d'étonnantes réalisations et des acteurs passionnés. Attachez vos ceintures...

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    « Il y a eu les smartphones, puis les tablettes, demain ce sera la réalité virtuelle » : c'est en substance ce qu'affirme Mark ZuckerbergMark Zuckerberg, le patron de Facebook. Son entreprise vient justement de racheter OculusOculus, la toute jeune société qui a réalisé un casque 3D à bas coût que tout le monde s'arrache. Avec un écran, des accéléromètres de smartphone et deux lentilleslentilles optiques, il en fait à peu près autant que des modèles haut de gamme. Baptisé RiftRift, cet engin est vendu 350 dollars en kit (soit environ 250 euros) et, selon l'avis général, « il change tout ». Actuellement, plus de 60.000 kits auraient été vendus.

    Or, jusque-là, la réalité virtuelle, ou « RV » (et « VR » pour les anglophones), restait réservée à des usages professionnels pour des applicationsapplications très particulières, dans l'automobileautomobile ou l'aéronautique. Avec des matériels moins onéreux, la réalité virtuelle peut aborder des domaines très variés et parfois inattendus, comme l'archéologie. C'est bien l'impression que donne cette édition 2014 de Laval Virtual, un salon bouillonnant qui attire chaque année des milliers de personnes dans la capitale de la Mayenne.

    Le Rafale, vu ici au dernier salon du Bourget, et observé sur une tablette via l'appareil photo. L'avion est reconnu et le logiciel, mis au point par Diotasoft, superpose le circuit électrique tel qu'il est réellement dans l'avion. Tous les membres des équipes de maintenance qui doivent démonter ou contrôler les sous-ensembles d'un engin volant comprendront immédiatement l'intérêt d'un tel outil. © Futura-Sciences, Jean-Luc Goudet

    Le Rafale, vu ici au dernier salon du Bourget, et observé sur une tablette via l'appareil photo. L'avion est reconnu et le logiciel, mis au point par Diotasoft, superpose le circuit électrique tel qu'il est réellement dans l'avion. Tous les membres des équipes de maintenance qui doivent démonter ou contrôler les sous-ensembles d'un engin volant comprendront immédiatement l'intérêt d'un tel outil. © Futura-Sciences, Jean-Luc Goudet

    Les bas coûts changent tout

    Depuis 1999, start-ups et grandes entreprises s'y croisent au milieu des chercheurs, notamment japonais grâce à une collaboration de longue date. « Nous avons ajouté 1.000 m2 pour accueillir 130 exposants, contre 106 l'an dernier », nous confie Simon Richir, directeur scientifique et cofondateur du salon, professeur aux Arts et métiers ParisTech. Pour lui, l'activisme de FacebookFacebook en matièrematière de RV témoigne d'une inflexion de la courbe.

    « Avec notre solution logicielle, basée sur l'environnement de développement Unity 3D (gratuit) et un Oculus Rift, on peut créer en très peu de temps des applications 3D pour se balader dans un décor et manipuler des personnages » montre Alexandre Pia, ingénieur chez I'm in VR, jeune entreprise du secteur, qui nous accueille sur son stand. De quoi concevoir quantité d'outils et de jeux. « Le plus grand marché sera celui de l'éducation », estime Yann Froger d'Eon Reality, géant états-unien du domaine et qui va installer une filiale française à Laval. « Nous commençons également à travailler avec les parcs d'attractions. » En attendant, une filiale, créée pour l'occasion et sur l'idée d'un employé, obtient un gros succès avec un simulateur de football américain utilisant un Oculus Rift.

    Derrière l'écran polarisant, qui pourrait être une lunette, une autre image apparaît, différente de celle affichée sur le téléviseur 3D. Ce système baptisé Familink, encore expérimental, pourrait avoir différents usages. Un film pourrait être vu en relief avec des lunettes et en 2D lorsqu'on les enlève. Un écran d'ordinateur pourrait afficher deux images, dont une cachée. Deux personnes pourraient regarder deux programmes de télévision différents. Etc. © Futura-Sciences, Jean-Luc Goudet

    Derrière l'écran polarisant, qui pourrait être une lunette, une autre image apparaît, différente de celle affichée sur le téléviseur 3D. Ce système baptisé Familink, encore expérimental, pourrait avoir différents usages. Un film pourrait être vu en relief avec des lunettes et en 2D lorsqu'on les enlève. Un écran d'ordinateur pourrait afficher deux images, dont une cachée. Deux personnes pourraient regarder deux programmes de télévision différents. Etc. © Futura-Sciences, Jean-Luc Goudet

    Une infinité d'applications à imaginer pour la réalité virtuelle

    Dans la série low cost, Cyberith a imaginé Virtualizer, un ensemble immersif très simple avec un casque Oculus et une sorte de youpala pour adulte. Relié à un cerceau métallique horizontal par un harnais fixé à la taille, l'utilisateur marche, ou plutôt patinepatine (en chaussettes, les chaussures étant interdites), sur une surface glissante. Ses mouvementsmouvements sont ainsi repérés avec un dispositif bien moins coûteux que les trackings à infrarougeinfrarouge. Le casque 3D et l'ordinateur font le reste. Le joueur peut ainsi se promener réellement dans l'universunivers de son jeu. Le visiteur peut se promener dans l'image en trois dimensions d'un bâtiment inexistant ou lointain. Un étudiant ou un chercheur peuvent explorer un milieu inatteignable. Etc.

    La vie de bureau profitera aussi de la RV. Le grand Français du secteur, Immersion, intégrateur de solutions et fournisseur de grands clients, montrait sur son stand une table tactile assez étonnante. Sur cet objet désormais connu, des fenêtresfenêtres-écrans s'affichent devant les participants qui peuvent les agrandir, les passer au voisin ou y écrire des annotations partagées sur les autres.

    Il suffit de poser un smartphone sur une image affichée sur cette table tactile pour qu'elle soit automatiquement téléchargée. Le système fonctionne aussi dans l'autre sens. Imaginé par l'entreprise Immersion, le principe consiste à relier par Wi-Fi le téléphone à l'ordinateur pilotant la table, de sorte qu'il détecte le moment où le téléphone la touche, grâce aux accéléromètres. Si cet instant est le même que celui auquel le détecteur à infrarouge a repéré un nouvel objet posé sur la table, alors il s'agit du téléphone et le téléchargement est déclenché. Si une photo est affichée à cet endroit, elle est expédiée au téléphone. Sinon, c'est l'inverse qui se produit : la photo du téléphone arrive sur la table. Compliqué, mais cela fonctionne... © Futura-Sciences, Jean-Luc Goudet

    Il suffit de poser un smartphone sur une image affichée sur cette table tactile pour qu'elle soit automatiquement téléchargée. Le système fonctionne aussi dans l'autre sens. Imaginé par l'entreprise Immersion, le principe consiste à relier par Wi-Fi le téléphone à l'ordinateur pilotant la table, de sorte qu'il détecte le moment où le téléphone la touche, grâce aux accéléromètres. Si cet instant est le même que celui auquel le détecteur à infrarouge a repéré un nouvel objet posé sur la table, alors il s'agit du téléphone et le téléchargement est déclenché. Si une photo est affichée à cet endroit, elle est expédiée au téléphone. Sinon, c'est l'inverse qui se produit : la photo du téléphone arrive sur la table. Compliqué, mais cela fonctionne... © Futura-Sciences, Jean-Luc Goudet

    Innovation maison : un smartphone posé sur l'écran est immédiatement reconnu grâce à une astucieuse utilisation de la connexion Wi-FiWi-Fi, à l'accéléromètre du smartphone et à un dispositif de repérage à infrarouge autour de la table. Résultat, on peut télécharger une image montrée sur la table simplement en posant le téléphone dessus et, dans l'autre sens, déposer une photo.

    La science en profite aussi

    Pour le téléviseur, le professeur Akihiko Shirai présentait son Familink, système expérimental pilotant un téléviseur 3D pour y afficher deux images différentes. L'exploit n'est pas nouveau, mais ici, l'une des images est visible à l'œilœil nu et l'autre nécessite des lunettes. Mieux, un film 3D sera visible en relief avec des lunettes polarisantes et, sans elles, en 2D normale. Le spectateur d'un film 3D pourra donc momentanément retirer ses lunettes et continuer à profiter du film. Encore expérimental, mais fonctionnel...

    La villa de Diomède, à Pompéi, telle qu'elle est aujourd'hui (à droite) et telle qu'elle était à l'origine (à gauche). L'outil de photogrammétrie mis en œuvre par Iconem permet d'intégrer dans un même modèle des informations d'origines diverses (mesures, images et même dessins anciens). © Iconem

    La villa de Diomède, à Pompéi, telle qu'elle est aujourd'hui (à droite) et telle qu'elle était à l'origine (à gauche). L'outil de photogrammétrie mis en œuvre par Iconem permet d'intégrer dans un même modèle des informations d'origines diverses (mesures, images et même dessins anciens). © Iconem

    Dans le domaine scientifique, les chercheurs n'ont sans doute encore rien vu. À l'observatoire de la Côte d'Azur, les astronomesastronomes avaient réussi leur simulation de la collision entre deux astéroïdes. Devant l'énorme quantité d'informations obtenues, les chercheurs se sont adressés à Taodyne, entreprise spécialisée dans les présentations en 3D sans lunettes, notamment par le procédé de l'alioscopie. Résultat : un nuagenuage d'un milliard de points répartis en 4.000 couches. Sont alors apparues des structures en filaments qui ont beaucoup intéressé les astronomes. La visualisation leur a permis d'appréhender autrement leurs propres résultats. Avec ses drones spécialement conçus, la petite société Iconem a réalisé un système novateur de cartographie de sites archéologiques, avec des projets à Pompéi, en Italie, et à Mes Aynak, en Afghanistan. Nous y reviendrons.

    Pour l'industrie, l'école, les centres de formation, le bureau ou la science, pour travailler ou pour jouer, les promesses de la réalité virtuelle commencent à devenir réalité. Mark Zuckerberg n'a sans doute pas tort d'avoir misé deux milliards de dollars dans cette affaire...