Des chercheurs américains ont créé un système de bio-impression mobile, qui permet d’imprimer de la peau en plusieurs couches, directement sur une blessure, en utilisant les cellules du patient. Des applications seraient possibles dans des cas de brûlures ou de blessures importantes.


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    Cette innovation pourrait révolutionner les soins apportés aux grands brûlés qui aujourd'hui ont besoin d'être traités par des greffes de peau. Elle a été élaborée à l'Institut de médecine régénératrice Wake Forest (Caroline du Nord). Son directeur, Anthony Atala, a déclaré dans un communiqué : « Cette technologie pourrait éliminer le besoin de greffes cutanées douloureuses qui causent une défiguration supplémentaire aux patients souffrant de plaies ou de brûlures importantes. »

    Cette technologie pourrait éliminer le besoin de greffes cutanées douloureuses qui causent une défiguration supplémentaire aux patients

    Comment fonctionne ce nouveau dispositif, encore expérimental ? Des cellules de la peau, des fibroblastes et des kératinocytes, sont isolées à partir d'une biopsie d'un tissu sain. Les cellules sont mélangées à un hydrogelhydrogel et placées dans le « bioprinter », une sorte d'imprimante 3D qui travaille avec du matériel biologique. L'objectif des scientifiques est d'utiliser des cellules du patient afin d'éviter les problèmes de rejet de greffe.

    Le saviez-vous ?

    Les fibroblastes sont des cellules qui fabriquent de la matrice extracellulaire et le collagène, qui jouent un rôle dans la guérison des plaies. Les kératinocytes sont les principales cellules présentes dans l’épiderme, la couche la plus externe de la peau. Ils représentent environ 90 % des cellules de l’épiderme.

    L'appareil scanne la plaie et transmet les données à un logiciellogiciel, ce qui permettra d'injecter les cellules au bon endroit. La bio-imprimante dépose les cellules directement dans la blessure et reproduit la structure de la peau en couches, ce qui va accélérer la formation de peau « normale » et donc la cicatrisation.

    La peau comprend plusieurs couches, avec l’épiderme à l’extérieur, composé essentiellement de kératinocytes. © sakurra, Fotolia
    La peau comprend plusieurs couches, avec l’épiderme à l’extérieur, composé essentiellement de kératinocytes. © sakurra, Fotolia

    Un dispositif expérimental et mobile qui dépose les cellules dans la plaie

    L'appareil a été testé en préclinique sur des modèles animaux : sur des souris et sur des cochons. Les chercheurs ont trouvé que la blessure se refermait rapidement. Le tissu dermique créé avait une structure et une composition proches de celles d'une peau saine. La prochaine étape sera donc de mettre en place un essai cliniqueessai clinique sur des humains.

    Sean Murphy, un des auteurs de l'article paru dans la revue Scientific Reports, a expliqué que ce qui rend cette technologie unique est « la mobilité du système et la possibilité de gérer sur place les plaies étendues en les scannant et en les mesurant afin de déposer les cellules directement là où elles sont nécessaires pour créer la peau ».

    Ce système pourrait servir pour des brûlures et des lésions de la peaulésions de la peau qui ne guérissent pas, comme l'ulcère diabétiquediabétique. Aujourd'hui ces plaies sont souvent soignées avec des greffes de peau, mais il est parfois compliquer de disposer d'un échantillon suffisamment grand de peau saine.


    De la peau humaine imprimée en 3D

    Article de Futura avec l'AFP paru le 11 février 2016

    Poietis, une jeune société basée près de Bordeaux, développe une technique d'impression 3D de tissus humains grâce au laserlaser. Les applicationsapplications sont très attendues en cosmétique et en clinique, par exemple pour créer des greffonsgreffons de peau à partir des cellules d'un patient.

    « Il s'agit de marier les technologies d'impression 3D et la biologie cellulairebiologie cellulaire afin de fabriquer, couche par couche, des tissus biologiques », résume Fabien Guillemot, ancien chercheur à l'Inserm (Institut national de santé et de recherche médicale) et fondateur de la start-up en 2014. Car l'impression tridimensionnelleimpression tridimensionnelle, qui permet la création d'un volumevolume par l'empilement de couches, a ouvert de très nombreux champs d'expérimentation, notamment pour les chercheurs travaillant sur le vivant.

    À ce jour, quatre technologies de « bio-impression » coexistent. Poeitis (du grec « fabriquer ») est pour l'heure la seule entreprise au monde, selon ses initiateurs, à imprimer de la matièrematière vivante grâce à de la lumière laser« Le laser a plusieurs avantages. Il permet, par sa très haute définition, de reproduire toute la complexité des tissus, avec une précision très élevée. Il permet aussi d'assurer la viabilité des cellules à hauteur de 95 à 100 % », explique le jeune entrepreneur.

    Mais alors, comment passe-t-on de quelques cellules mises en culture à la complexité d'un véritable tissu fonctionnel ? « Grâce au laser, l'imprimante dépose des micro-gouttelettes contenant des cellules, couche par couche, selon un modèle prédéfini par ordinateurordinateur et inspiré de tissus existants », détaille Fabien Guillemot, dont l'entreprise a déjà déposé trois familles de brevets. Ces modèles numériquesmodèles numériques, entièrement mis au point par Poietis, permettent non seulement d'organiser les cellules au départ, mais également d'anticiper la façon dont elles vont interagir dans le temps.

    « Avec une précision de l'ordre de 20 micronsmicrons NDLRNDLR : millièmes de millimètre], soit autour de la taille maximum d'une cellule, le laser permet de guider l'auto-organisation des cellules », explique le chercheur. Trois semaines sont nécessaires pour reproduire de la peau. Pour l'heure, l'entreprise, qui compte une vingtaine de salariés (biologistes, ingénieurs en optique, informaticiens...), utilise deux imprimantes mises au point avec l'Inserm et le laboratoire Alphanov, dépendant du pôle de compétitivité bordelais dédié aux lasers. Elle travaille déjà à l'élaboration de son propre outil d'impression, qui devrait être opérationnel d'ici à deux ans.

    Les peaux synthétisées au laboratoire pourraient permettre de tester des cosmétiques. © JL-Pfeifer, Shutterstock
    Les peaux synthétisées au laboratoire pourraient permettre de tester des cosmétiques. © JL-Pfeifer, Shutterstock

    Vers la production de peau pour des greffes ou des tests cosmétiques

    Si l'objectif de Poietis est d'aller en clinique pour servir à la réparation de tissus, l'entreprise fonde d'abord son développement sur l'énorme potentiel que représentent les tests en recherche cosmétique et pharmaceutique. « C'est pour cela que nous avons d'abord travaillé sur la peau, c'est une vraie opportunité de développement », confie l'entrepreneur, qui vient de signer un partenariat stratégique avec le géant mondial de la chimiechimie, le groupe allemand BASF, fournisseur d'ingrédients pour les cosmétiques. L'enjeu est d'autant plus grand que les tests sur animaux pour les cosmétiques sont interdits depuis 2013 dans l'Union européenne. Pour la recherche pharmaceutique, il s'agit de reproduire autant des peaux saines que des peaux pathologiquespathologiques.

    La société, qui vient de procéder à une augmentation de capital de 1,2 million d'euros (dont 1 million de financement participatif pour PME), compte valider ses premiers produits et les commercialiser auprès des centres de recherche et de tests d'ici à 2017.

    En matière médicale, il faudra être plus patient. Poietis envisage la fabrication de greffons de peau, totalement assimilables par le greffé, puisque fabriqués à partir de ses propres cellules, d'ici à dix ans environ. Les expérimentations menées au sein d'un laboratoire de l'Inserm ouvrent déjà d'autres horizons. Des tests sur une souris blessée au crânecrâne ont mis en évidence la façon dont la bio-impression par laser pouvait contribuer à la réparation osseuse directement sur le sujet.

    Dans cette perspective, la reproduction d'organes dans le cadre d'une médecine toujours plus personnalisée ne semble plus une chimèrechimère. Derrière la révolution technologique se profile un vertigineux questionnement éthique. « Nous nous sommes posés une limite », précise sans détour Fabien Guillemot : « Nous nous bornons à la réparation des tissus et non leur augmentation ou leur amélioration ».