Manœuvrer une prothèse le plus naturellement possible tout en recouvrant le sens du toucher après l’amputation d’un membre, voilà la prouesse technologique que sont parvenus à réaliser les chercheurs de l’agence de recherche et développement du département américain de la Défense (Darpa). Plus de détails sur ce bras bionique d’un nouveau genre.

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    L'avant-bras bionique d'Anakin Skywalker dans Star Wars, capable d'analyser les variations du champ électromagnétiquechamp électromagnétique de son environnement pour procurer le sens du toucher, est maintenant dépassé par la réalité. Les derniers modèles de prothèses mis au point par l'agence de recherche et développement du département américain de la Défense (Darpa), en association avec l'université Case Western Reserve (Ohio, États-Unis), permettent à la fois de bouger un membre artificiel de façon presque naturelle, mais aussi de redonner la sensation tactile à son porteur.

    Nul besoin du système électrostatiqueélectrostatique décrit dans les films de science-fiction, ni d'implants neuronaux dans le cerveau pour cela : les chercheurs ont exploité les ressources cachées de l'humain.

    C’est le docteur Kuiken du <em>Rehabitation Institut of Chicago</em> (RIC) qui a élaboré, dès 2002, la technique appelée <em>Targeted Muscle Reinnervation</em> (TMR), autrement dit, la « réinnervation musculaire ciblée ». Les chercheurs ont remarqué que les cellules musculaires étaient capables de se lier aux terminaisons nerveuses restantes et de répondre aux impulsions du cerveau. En associant cet ensemble à un support en matériau polymère de taille nanométrique, il permet au cerveau de contrôler les mouvements de la prothèse robotisée, comme s’il s’agissait du véritable membre. © Darpa

    C’est le docteur Kuiken du Rehabitation Institut of Chicago (RIC) qui a élaboré, dès 2002, la technique appelée Targeted Muscle Reinnervation (TMR), autrement dit, la « réinnervation musculaire ciblée ». Les chercheurs ont remarqué que les cellules musculaires étaient capables de se lier aux terminaisons nerveuses restantes et de répondre aux impulsions du cerveau. En associant cet ensemble à un support en matériau polymère de taille nanométrique, il permet au cerveau de contrôler les mouvements de la prothèse robotisée, comme s’il s’agissait du véritable membre. © Darpa

    Une technique plus naturelle et durable que les implants neuronaux

    Dans le cadre d'un projet global appelé Reliable Neural-Interface Technology (RE-NET), les deux institutions ont employé et amélioré une technologie déjà existante depuis plusieurs années, la « réinnervation musculaire ciblée » (TMR). Elle permet de contrôler un bras ou une main artificielle via les nerfsnerfs et les muscles restants après amputationamputation.

    Pour cela, de petites capsules en polymèrepolymère de taille nanométrique sont greffées aux vestiges des terminaisons nerveuses couplées aux cellules musculairescellules musculaires. Elles intègrent des capteurs myoélectriques qui renvoient les informations provenant du cerveau vers la prothèseprothèse, pour la piloter « presqu'aussi aisément » qu'un membre normal. La toute première prothèse de ce type date de 2005. Depuis, du chemin a été parcouru, et un jeune Américain équipé d'une jambe robotisée fonctionnant sur ce principe a même réussi à monter, par les escaliersescaliers, les 103 étages de la tour Willis à Chicago, l'un des plus grands gratte-ciel.

    Le résultat était déjà très impressionnant, mais le porteur de cette prothèse devait en permanence observer son membre pour le contrôler, puisqu'il ne disposait pas du sens du toucher. C'est justement la révolution qu'apportent les dernières recherches.

    Une technologie de prothèse qui donne du « sens »

    Pour faire gagner en précision et rendre le mouvementmouvement presque naturel, les chercheurs ont associé cette technique de TMR à une autre. Elle consiste à exploiter le reste des nerfs du membre amputé et à les greffer à une interface nerveuse artificielle plate, appelé par les scientifiques Flat Interface Nerve Electrode (Fine). Grâce à ce système, un certain sens du toucher par les doigts a été rétabli. La technologie a été testée en grandeur nature sur un ancien major de l'armée, Glen Lehman, blessé en Irak et amputé de l'avant-bras droit. Sur une vidéo diffusée par la Darpa (ci-dessous), on peut le voir manipuler des objets et même rattraper un voile pratiquement aussi aisément qu'avec un véritable bras.


    Blessé en Irak, le sergent-chef Glen Lehman a perdu son avant-bras droit. Il a participé à une étude menée par le Rehabitation Institut of Chicago (RIC). Avec les dernières innovations de la Darpa et de l’université Case Western Reserve, il a pu recouvrer le sens du toucher avec sa prothèse bionique. © Darpa, YouTube

    La Darpa ne s'arrête pas à la préparation technologique des Hommes et des machines de guerre, elle fait aussi le « service après-vente » en finançant des projets de recherche médicale, pour réparer les blessures causées par les combats. Ainsi, selon les chiffres des services de santé de l'armée américaine, entre 2000 et 2011, près de 5.700 militaires ont dû subir l'amputation d'un membre, suites à un conflit ou dans l'exercice de leurs fonctions. Parmi eux, on compte 2.600 amputés d'au moins une main ou un pied. En attendant d'inventer un remède contre les guerres, ce type d'invention permettra peut-être à ces victimes, soldats ou civils, de continuer à vivre avec plus d'autonomie.