Les États Latins d'Orient sont les États chrétiens établis par les croisés en Terre Sainte après la Première Croisade.


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    Les Etats Latins d'Orient sont formés à la suite de la Première Croisade. Ils constituent un témoignage inestimable des interactions entre l'Occident chrétien et l'Orient musulman entre les XIème et XIIIème siècles. 

    L'émergence des États Latins d'Orient : Un héritage de la Première Croisade

    La Première Croisade se déroule entre 1095 et 1099. Elle est déclenchée par l'appel de Clermont prononcé par le pape Urbain II. Il incite alors les chrétiens d'Occident à venir en aide aux chrétiens d'Orient et aux pèlerins menacés par la prise de Jérusalem par les Turcs Seldjoukides . Les Croisés, principalement composés de chevaliers européens, s'implantent progressivement sur les territoires conquis et forment ce qu'on appellera les Etats latins d'Orient. Ils sont au nombre de quatre et s'étendent au coeur du Levant.

     

    Une vision romantique du XIXe siècle de Godefroi de Bouillon et des chefs de la première croisade par Alphonse-Marie-Adolphe de Neuville © Wikimédia commons, domaine public
    Une vision romantique du XIXe siècle de Godefroi de Bouillon et des chefs de la première croisade par Alphonse-Marie-Adolphe de Neuville © Wikimédia commons, domaine public

    Le comté d’Édesse, le premier Etat latin d’Orient

    Fondé en 1098, le comté d'Édesse est le premier État à être établi. Il est créé par Baudouin de Boulogne, frère de Godefroy de Bouillon, qui est couronné premier comte d'Édesse. Situé dans la région de la Haute-Mésopotamie, le comté d'Édesse joue un rôle stratégique en tant que point d'ancrage pour les Croisés : ce territoire constitue le territoire le plus avancé à date dans les terres musulmanes et leur permet d'étendre leur influence vers l'est. Cependant, en 1144, il est conquis par Zengi, atabeg de Mossoul puis d'Alep. Fondateur de la dynastie zengide, l'atabeg procède à l'unification des territoires musulmans de la région sous son autorité.  En novembre 1144, Zengi profite d'une ville laissée sans défense pour attaquer Edesse. Il met le siège et profite de l'absence de renfortsrenforts chrétiens rapides pour percer les mursmurs d'enceinte. Il entre dans la cité, massacre une partie de la population et pousse les derniers survivants à se retrancher dans la citadelle. Le 26 décembre, la citadelle se rend. La nouvelle parvient en Occident en 1145 et provoque l'appel du pape et de Bernard de Clairvaux à la seconde croisade. Toutefois, Zengi doit porter son attention sur des troubles internes aux territoires musulmans. Par conséquent, il interrompt son avancée et ne conquiert pas la totalité du comté. L'opportunité de reconquérir la ville perdue est aussitôt saisie par Jocelyn, souverain du côté, alors que Zengi est assassiné. Mais cette tentative tourne au désastre et le comté est définitivement pris par les forces musulmanes et Nur-al-Din en 1146.

    Le Royaume de Jérusalem, un État chrétien méridional

    Le royaume de Jérusalem est aussi appelé royaume franc de Jérusalem. Il est fondé en 1099 à la suite de la première croisade et de la prise de Jérusalem le 15 juillet. C'est Godefroy de Bouillon, l'un des principaux seigneurs de la première croisade, qui en prend la tête. Toutefois ce dernier ne prend pas le titre de roi mais d'avoué du Saint Sépulcre. 

    Etat le plus méridional des quatre Etats latins, les territoires du royaume se composent du domaine royal et de quatre grands fiefs. L'extension territoriale maximum du royaume va des bords de la mer Rougemer Rouge à Beyrouth et au lac de Tibériade.

    Le royaume parvient à exister entre alliances et tensions avec les forces musulmanes unifiées sous la houlette de Nur al Din puis de Saladin. Toutefois les comportements de René de Châtillon et de Guy de Lusignan mènent à la terrible défaite chrétienne lors de la bataille de Hattin en juillet 1187 et à la reconquête de Jérusalem par les musulmans en octobre de la même année. Le royaume n'est alors plus que réduit qu'à la ville de Tyr. Malgré des tentatives chrétiennes de reprise de la ville Sainte, elle reste entre les mains des troupes musulmanes. Le nom de "royaume de Jérusalem" perdure mais la capitale est déplacée à Saint Jean d'Acre, dont la prise en 1291 marque la fin des États Latins d'Orient.

    Saladin et Guy de Lusignan après la bataille de Hattin en 1187 par Said Tahseen © Wikimédia commons, domaine public 
    Saladin et Guy de Lusignan après la bataille de Hattin en 1187 par Said Tahseen © Wikimédia commons, domaine public 

    La principauté d'Antioche et le comté de Tripoli

    En plus du royaume de Jérusalem et du comté d'Édesse, deux autres États Latins d'Orient sont établis à la suite de la première croisade : la principauté d'Antioche et le comté de Tripoli.

    La principauté d'Antioche est fondée en 1098 par Bohémond de Tarente, l'un des principaux seigneurs de la Première Croisade. Située dans la région de l'actuelle Turquie, près de la frontière syrienne, Antioche est repris aux Turcs seldjoukides qui venaient d'en chasser les Byzantins (1085). Deux longs sièges aboutissent à la création de la principauté. Elle devient un État important et prospère. Son emplacement stratégique en fait un carrefour commercial essentiel et une place forte militaire. La principauté est amputée d'une large partie de ces territoires lors de la deuxième croisade et entre en conflit avec Byzance lorsque René de Châtillon accède au pouvoir. Mais ce dernier est forcé de reconnaître la souveraineté byzantine avant d'être fait prisonnier par les forces musulmanes. Pris en étau dans les conflits entre mongols et mamelouks, le prince d'Antioche prend position pour les mongols. La défaite de ces derniers lors de la bataille d'Aïn Djalout entraîne la prise d'Antioche par les forces de l'empire mamelouk égyptien en 1268. Mais ce n'est qu'en 1291 que la totalité de la principauté tombe avec la chute de Saint Jean d'Acre, marquant la fin des Etats latins d'Orient. 

    Le siège d'Antioche, détail d'une miniature des Passages d'outremer de Sébastien Mamerot. © Wikimédia commons, domaine public
    Le siège d'Antioche, détail d'une miniature des Passages d'outremer de Sébastien Mamerot. © Wikimédia commons, domaine public

    Le comté de Tripoli quant à lui est établi en 1109 par Raymond IV de Saint-Gilles même si l'implantation chrétienne remonte à 1102 avec la prise de Tortose. Il fait lui aussi partie des seigneurs qui ont pris la tête de la Première Croisade. Situé sur la côte méditerranéenne de l'actuel Liban, le comté de Tripoli devint un important centre commercial et politique. Il entretenait des relations complexes avec les États musulmans voisins, cherchant à préserver son indépendance tout en maintenant des alliances stratégiques. Cependant, le comté de Tripoli fut confronté à des pressions croissantes de la part des forces musulmanes et de la montée en puissance de l'empire mamelouk. En 1187, il passe sous l'autorité des princes d'Antioche. Finalement, en 1289, Tripoli fut conquis par les mamelouks, mettant ainsi fin à la présence latine dans la région.