Une zone située dans les hautes terres de l’hémisphère sud de Mars remet en cause les hypothèses établies sur leur origine. Cette région, plus grande que l’Europe, présente des similitudes avec la croûte continentale terrestre. Les nouvelles données suggèrent que sous la surface de la Planète rouge, se cacherait un continent.


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    Dans l'hémisphère sudhémisphère sud de la planète Mars se dresse les « hautes terres », des terrains considérés comme homogènes vieux de quatre milliards d'années. Pourtant une équipe de planétologues français et américains, menée par Sylvain Bouley du laboratoire de géoscience de Paris-Saclay, vient de mettre en évidence une anomalieanomalie à l'intérieur de ces « hautes terres ». Un bloc crustal qui s'étend sur une région une fois et demie plus vaste que l'Europe et présente des propriétés géophysiques et géochimiques semblables à la croûte continentalecroûte continentale terrestre. Ces travaux sont publiés le 6 janvier 2020 dans la revue Nature Geoscience suggèrent la possibilité d'un continent caché sous la surface de Mars.

    a.Épaisseur crustale actuelle de la planète Mars. b. Épaisseur crustale de la planète Mars sans les bassins d’impacts et édifices volcaniques. c. Anomalies magnétiques. d. Concentration en Thorium. e. Concentration en Potassium. La limite du bloc crustal Terra Cimmeria-Sirenum est indiquée en pointillé. © Sylvain Bouley et al.<em> Nature Geoscience</em>, 2020
    a.Épaisseur crustale actuelle de la planète Mars. b. Épaisseur crustale de la planète Mars sans les bassins d’impacts et édifices volcaniques. c. Anomalies magnétiques. d. Concentration en Thorium. e. Concentration en Potassium. La limite du bloc crustal Terra Cimmeria-Sirenum est indiquée en pointillé. © Sylvain Bouley et al. Nature Geoscience, 2020

    Des anomalies dans la croûte de Mars

    L'équipe de géomorphologues, géophysiciens et géochimistes a appliqué une technique permettant de découvrir pour la première fois la structure de la croûte de Mars avant la formation des principaux bassins d'impact (Hellas, Argyre, Isidis et Utopia) et des provinces volcaniques (Tharsis et Elysium). Les données proviennent principalement de cartes topographiques et d'épaisseur crustale de Mars réalisées à partir des mesures du champ de gravité de la Planète rouge.

    En enlevant l'effet des bassins d'impact et des édifices volcaniques sur la croûte, la carte d'épaisseur crustale révèle un bloc aux propriétés singulières dans la zone de TerraTerra Cimmeria-Sirenum. L'épaisseur de croûte dans cette région dépasse la cinquantaine de kilomètres et on y trouve les plus fortes anomalies magnétiques et des anomalies géochimiques. Sur Terre, de telles anomalies sont observées au niveau des cratonscratons continentaux, zone d'accrétion de microcontinents.

    Ces terrains n’ont pas une origine unique et relance le débat sur une possible tectonique lors des 500 premiers millions d’années de l’histoire de Mars

    Terra Cimmeria-Sirenum est également la seule zone de l'hémisphère sud où on observe en surface un enrichissement en potassium (K) et thorium (Th). Ensembles, ces éléments suggèrent la présence d'une croûte continentale sur Mars. De plus, Curiosity a observé des roches similaires dans le cratère Gale, situé au nord du bloc crustal décrit dans la publication.

    L'existence même de ce bloc crustal remet en cause les deux familles d'hypothèses concernant la formation des hautes-terres au sud et des plaines plus basses de l'hémisphère nordhémisphère nord, couramment appelée dichotomie martienne. Elle indique en effet que ces terrains n'ont pas une origine unique et relance le débat sur les mécanismes de croissance crustale et d'une possible tectonique lors des 500 premiers millions d'années de l'histoire de Mars.