Le spectrographe Desi, un instrument inédit, vient d'ouvrir ses 5.000 yeux sur le cosmos pour traquer l’énergie noire. Il a reçu ses « premières lumières ». En 2020, il devrait débuter une cartographie de l'univers au rythme de 5.000 objets galactiques observés toutes les 20 minutes à la recherche de l'énergie noire. Invisible et de nature inconnue, elle est à l'origine de l'expansion de l'univers.


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    L'essentiel (70 %) de la densité d'énergie de l'univers semble due à une « énergie noire » de nature inconnue, dont on ne sait rien, sinon qu'elle accélère l'expansion de l'univers, ce que ni la matière baryonique ni la matière noirematière noire ne peuvent faire. Cette force énigmatique a été imaginée pour tenter d'expliquer un phénomène découvert en 1999. Alors que la gravitation devrait freiner l'expansion de l'univers, on observe au contraire que cette expansion accélère à un rythme toujours plus rapide ! Cette énergie noire serait responsable de l'accélération, depuis cinq milliards d'années, de l'expansion de l'univers. Elle n'a jamais été observée directement, bien que ses effets soient mesurés.

     

    Une machine à remonter le temps

    Pour lever enfin le mystère de cette énergie noire, les astronomesastronomes s'apprêtent à cartographier l'univers comme cela n'a jamais été fait auparavant en mesurant la distance de 35 millions de galaxiesgalaxies et de 2,4 millions de quasarsquasars sur un tiers du ciel, en seulement cinq ans ! Ils disposeront ainsi des cartes en trois dimensions les plus détaillées de l'univers donnant un instantané de son expansion, à différentes époques, ce qui renseignera sur son histoire et son évolution. Surtout, ils pourront mesurer la variation du taux d'expansion de l'univers avec une précision inégalée.

    En confrontant les mesures de distance de ces 35 millions d'objets au modèle standard de la cosmologiemodèle standard de la cosmologie qui suppose l'existence de cette énergie noire, les scientifiques seront peut-être en mesure de déterminer sa nature. Comme le suggère le groupe Renoir, du Centre de PhysiquePhysique des Particules de Marseille, cette énergie noire pourrait être une forme nouvelle d'énergie, ou bien une constante cosmologiqueconstante cosmologique, ou alors la manifestation d'une déviation aux lois de notre théorie de gravitation aux très grandes échelles cosmiques.

    Equipé de 5.000 petits robots disposant chacun d’une fibre optique, Desi est en mesure de pointer automatiquement vers une liste précise de galaxies et de quasars préalablement sélectionnés pour en détecter la lumière et ainsi mesurer leur distance à la Terre. © LBL, <em>Desi Science team</em>
    Equipé de 5.000 petits robots disposant chacun d’une fibre optique, Desi est en mesure de pointer automatiquement vers une liste précise de galaxies et de quasars préalablement sélectionnés pour en détecter la lumière et ainsi mesurer leur distance à la Terre. © LBL, Desi Science team

    Pour réaliser cette cartographie dans des délais aussi courts, un instrument inédit, le Desi, Dark Energy Spectroscopic Instrument, monté sur le télescopetélescope Kitt Peak en Arizona (États-Unis), a été mis au point. Cet instrument se compose de dix spectrographesspectrographes capables d'analyser simultanément la lumièrelumière émise par cinq mille objets toutes les 20 minutes, soit cinq fois plus d'objets et deux fois plus rapidement que les meilleurs instruments existants. Auparavant, une heure était nécessaire pour mesurer le spectrespectre d'un millier d'objets galactiques.

    Desi est le fruit d'une collaboration internationale, à laquelle participe l'Institut de recherche sur les lois fondamentales de l'univers (Irfu) du CEA (Saclay), avec le CNRS et l'appui de la Fondation A*Midex portée par Aix-Marseille université.

    Fruit d’une collaboration internationale pour traquer l’énergie noire, le spectrographe Desi est monté sur l’ancien télescope Nicholas U. Mayall de l'Observatoire national de Kitt Peak, près de Tucson en Arizona. © Marilyn Chung, <em>Lawrence Berkeley National Laboratory</em>
    Fruit d’une collaboration internationale pour traquer l’énergie noire, le spectrographe Desi est monté sur l’ancien télescope Nicholas U. Mayall de l'Observatoire national de Kitt Peak, près de Tucson en Arizona. © Marilyn Chung, Lawrence Berkeley National Laboratory