Kites, cerfs-volants ou ballons : les idées fusent pour tirer parti des puissants vents d'altitude, générer de l'électricité n'importe où avec un système transportable ou tirer des navires de marchandises.
Les vents qui passent au-dessus de l'Europe représentent une énergie équivalente à celle de 100 000 centrales nucléaires ! Voilà qui a de quoi faire réfléchir en prévision de l'après-pétrole. Encore faut-il savoir comment puiser dans cette manne. En Europe, et même en France malgré l'importance de l'énergie nucléaire, les éoliennes fleurissent un peu partout.
Mais ces énormes hélices ne peuvent utiliser que les vents proches du sol, c'est-à-dire les plus faibles. De plus, ces installations sont fixes et difficiles à installer en pleine mer. Bref, on peut faire mieux.
En matière d'énergie éolienne, il est clair qu'il n'existe pas de solution unique, susceptible de s'appliquer partout. Armés de nouveaux matériaux, d'électronique et d'une bonne dose d'imagination, ingénieurs, scientifiques et même quelques aventuriers sont en train de mettre au point des solutions complètement nouvelles d'une réjouissante diversité.
Kite Wind Generator : une centrale en forme de manège
C'est probablement aujourd'hui le projet le plus impressionnant. Le Kite Wind Generator, alias KiteGen, ou KWG, ou encore KiWiGen, fournirait des dizaines de mégawatts (MW) grâce aux vents soufflant à plusieurs centaines de mètres d'altitude. Le principe est original : un manège porte des bras pivotants sur lesquels sont accrochés de très longs câbles reliés à des cerfs-volants. La position de ces derniers est contrôlée électroniquement et l'ensemble fait tourner le manège qui entraîne une turbine.
Pour que cela fonctionne, les dimensions doivent être généreuses : au moins cent mètres de diamètres pour la roue. Mais la puissance augmente très vite avec le diamètre : 0,5 MW pour 100 mètres, 5 MW pour 200 mètres, 500 MW pour 1 000 mètres.
Porté par une société italienne, Sequoia Automation, spécialisée dans le contrôle de phénomènes vibratoires, ce projet vise actuellement une puissance de 84 MW. Il est soutenu par une kyrielle d'experts : Dominique Pineau (EDF), W. G. J. H. M. Van Sark (université d'Utrecht), Niveen M. Mawsouf (université du Carie), Wubbo Ockels (université de Delft), Alan Mortimer (Scottish Power) et Wim Turkenburg, spécialiste des énergies renouvelables à l'ONU. Mais ce dernier travaille aussi à l'ESA et ce n'est pas un hasard : ce carrousel pourrait aussi servir sur la planète Mars...
M. A. R. S. : un ballon transportable
Magenn Power Inc., entreprise américaine spécialiste du plus léger que l'air, a imaginé un curieux engin, baptisé Mars (Magenn Air Power Rotor System). Au bout d'un câble, à 300 mètres d'altitude, ce ballon captif gonflé à l'hélium est muni de quatre ou cinq grosses pales. Il se comporte comme un rotor horizontal tournant avec le vent. Cette rotation induit de plus une force de sustentation supplémentaire - c'est l'effet Magnus, qui dévie les balles de tennis, de golf ou de football quand elles tournent sur elles-mêmes et qui tractait l'Alcyone du commandant Cousteau.
Un générateur fixé sur l'axe fabrique de l'électricité. D'après ses concepteurs, Mars commencerait à fonctionner à partir d'un vent de seulement 1 mètre par seconde (3,6 km/h). La taille de l'engin pourrait être très variable. Un petit modèle de quelques mètres serait transportable et fournirait plusieurs kilowatts. Magenn projette la construction d'une unité de 4 kW cette année.
Hovering Wing Turbine : des turbines volantes
Datant de 2004, ce projet d'une société américaine, Briza Technologies, est d'une ampleur bien plus grande.
La structure volante est sustentée par des rangées de petits dirigeables, portant chacun un groupe de quatre pales horizontales et une turbine (soit 100 kg). Chacun de ces éléments produirait 30 kW.
KiteShip : les voiliers reviennent à la mode
Le vent ne sert pas qu'à produire de l'électricité. On peut aussi s'en servir pour faire avancer des bateaux. Bien sûr, l'idée n'est pas vraiment nouvelle... Mais alors que l'énergie du vent s'est depuis longtemps cantonnée à la plaisance, certains imaginent de la remettre au goût du jour pour aider à la traction des navires marchands de grandes tailles.
Spécialiste du kite, c'est-à-dire une voile libre, comme un cerf-volant, KiteShip, aux Etats-Unis, propose d'adapter ce principe aux navires de commerce. L'avantage est évident : la méthode peut facilement être appliquée à tout type de bateau, sans nécessiter de planter un mât sur le pont et de revenir à la navigation à voile du dix-neuvième siècle.
Le principe du kite est d'ailleurs loin d'être une nouveauté. En 1903, Samuel Franklin Cody a vaincu la Manche dans une barque tirée par un cerf-volant. En 2006, Manu Bertin et Anne Quéméré ont tous deux traversé l'Atlantique, l'une dans son « Oceankite », une petite embarcation tirée par une aile, et l'autre sur son kitesurf, un engin dont il est l'inventeur.
Parfois, les aventuriers sont aussi les pionniers de technologies novatrices...