La conservation de la biodiversité n'est pas que le respect de la nature. Une étude réalisée à l'échelle mondiale montre en effet que pour lutter contre la pauvreté, il faut maintenir la biodiversité. Les services écologiques apportés par la nature bénéficient particulièrement aux populations les plus pauvres.

au sommaire


    Le colibri est capable de réaliser un vol stationnaire et il lui est donc possible de prélever le nectar des fleurs et contribuer ainsi à la pollinisation, un service écologique offert par la nature. © San Diego Shooter, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Le colibri est capable de réaliser un vol stationnaire et il lui est donc possible de prélever le nectar des fleurs et contribuer ainsi à la pollinisation, un service écologique offert par la nature. © San Diego Shooter, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Et si la conservation de la biodiversitébiodiversité permettait également de lutter contre la pauvreté ? Cette relation, très fortement suspectée, n'avait encore jamais été établie de façon claire. En tout cas pas assez pour convaincre les décideurs politiques d'en faire une priorité. Mais une étude davantage exhaustive et réalisée sur une échelle spatiale plus importante que les précédentes permet de tirer des conclusions tranchées.

    Pourquoi la biodiversité pourrait-elle aider les humains et notamment les plus pauvres d'entre eux ? Car la nature rend ce que l'on appelle des services écologiques : la purification des eaux, le maintien de la richesse des sols, la pollinisation, etc. Une quantité extraordinaire de tâches que les Hommes seraient bien obligés de réaliser si la nature ne s'en occupait pas. Tâches pour lesquelles il leur faudrait payer.

    La biodiversité, des services écologiques gratuits

    Plusieurs études ont tenté d'évaluer en termes pécuniaires ce que représentent ces services. Ainsi, des chercheurs de l'Inra et le CNRS, entre autres, estimaient que la pollinisation correspondait à environ 153 milliards d'euros, gracieusement offerts par la nature.

    Dans leur étude publiée cette semaine dans le journal BioScience, Will Turner, directeur de la division Science et connaissance de l'association Conservation International, et ses collègues expliquent comment ils ont déterminé les zones qui apportent le plus de services et à qui ceux-ci bénéficient en priorité. C'est ce que les auteurs appellent les flux de services.

    Les différents services écologiques considérés (à gauche) répartis en quatre catégories, en fonction des bénéficiaires. Afin de réaliser leurs estimations, les auteurs ont divisé le monde entier en plus de 58.000 hexagones de 2.592 km². © Turner <em>et al. </em>2012, <em>BioScience - </em>adaptation Futura-Sciences

    Les différents services écologiques considérés (à gauche) répartis en quatre catégories, en fonction des bénéficiaires. Afin de réaliser leurs estimations, les auteurs ont divisé le monde entier en plus de 58.000 hexagones de 2.592 km². © Turner et al. 2012, BioScience - adaptation Futura-Sciences

    Une variété de services écologiques (17) a été prise en compte. Ils ont été répartis en différentes catégories correspondant aux bénéficiaires, en fonction de leur emplacement géographique par rapport à la source du service. Les facteurs socioéconomiques ont également été considérés.

    Bénéfice simultané pour les Hommes et la nature

    Ceci leur a permis de localiser des zones de conservation prioritaires, qui fournissent le plus de services. Les auteurs ont donc pu montrer que les populations pauvres (déterminées en fonction du taux d'enfants de moins de 5 ans en sous-poids) sont bénéficiaires de plus de la moitié des services provenant de ces zones. La preuve que la conservation d'espaces à fort potentiel écologique est un moyen de lutte contre la pauvreté.

    En outre, les chercheurs ont également évalué les retombées économiques : le maintien et la conservation des espaces fournissant des services exigent une intendance. Ils ont calculé que les coûts liés à ces missions sont plus de trois fois inférieurs aux bénéfices apportés pas les services. Ces coûts sont ensuite transférés à la population locale (sous forme de rémunération), ce qui constitue un bénéfice simultané pour les Hommes et la nature.

    Selon les auteurs, le message délivré aux décideurs politiques est clair : « Protéger les zones hautement prioritaires pour la conservation de la biodiversité profitera grandement au bien-être et à la lutte contre la pauvreté. »