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Guillaume Morel

Guillaume Morel

Enseignant chercheur en robotique

Manipulation

Aide médicale

Chirurgie

La curiosité, le plaisir de penser, l’enthousiasme, le goût du débat sans lequel il n’est pas de partage des connaissances … Autant de valeurs que Futura-Sciences défend pour rapprocher notre microcosme scientifique de la société au service de laquelle il travaille. Merci de votre action salutaire, loin des poncifs de l’expertise, des tartes à la crème de l’excellence, toutes ces tours d’ivoire dans lesquelles nous sommes chaque jour plus incités à nous enfermer.

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Biographie

Parcours académique et professionnel :

Guillaume Morel est né à Clermont-Ferrand en janvier 1969. Après un diplôme d'ingénieur électronicien de l'Institut des Sciences et Technologies (1990), il a obtenu en 1994 un doctorat de l'Université Pierre et Marie CurieMarie Curie (UPMC) - spécialité Mécanique et RobotiqueRobotique. Il a ensuite travaillé deux années au Massachusetts Institute of Technology comme chercheur postdoctoral (1995-1996).

De retour en France, après un an passé à travailler comme ingénieur pour le compte d'Electricité de France il rejoint le monde académique en septembre 1997 en tant de Maître de ConférencesMaître de Conférences à l'Université Louis PasteurLouis Pasteur - Strasbourg I.

Il s'autorise ensuite un nouvel intermède dans le monde industriel en 2000-2001 (ingénieur de recherche à EDF) puis rejoint l'UPMC de ses débuts en tant que Maître de Conférences en septembre 2001. Depuis septembre 2007, il est Professeur en Robotique dans ce même établissement.

Fonctions actuelles :

A l'Institut des Systèmes Intelligents et de Robotique, Guillaume Morel dirige l'équipe AGATHE (Assistance aux Gestes et ApplicationsApplications Thérapeutiques) qui regroupe une quinzaine de chercheurs permanents ou non autour de la robotique d'assistance au geste avec un intérêt particulier pour les applications thérapeutiques (assistance à la chirurgiechirurgie et à la médecine, rééducation fonctionnelle). Parallèlement, il dirige la formation d'ingénieurs en Robotiqueingénieurs en Robotique qu'il a créée en 2006 à Polytech'Paris-UPMC.

Guillaume Morel est éditeur associé de la revue IEEEIEEE/ASME Transactions on Mechatronics, et membre des comités éditoriaux de conférences internationales de référence dans les domaines de la robotique, de la mécatroniquemécatronique et de l'assistance au geste chirurgical (IEEE Int. Conf. on Robotics & Automation, IEEE Int. Conf. on Advanced Intelligent Mechatronics, Inf. Conf. on Medical Image Computing and Computer Assisted Interventions). Il est également membre du Directoire de la Recherche de l'UPMC, qui est le board de l'Université sur lequel s'appuie la Présidence pour définir sa politique de recherche.

Parcours scientifique :

Depuis 15 ans, les travaux de recherche de Guillaume Morel ont porté sur la commande des systèmes robotiques exploitant des capteurscapteurs extéroceptifs, en particulier la commande en efforts (contrôle fin des contacts) et l'asservissement visuel (contrôle des mouvementsmouvements exploitant une image en temps réel).

En 1999, à la suite d'une rencontre avec le Professeur Marescaux à l'hôpital de Strasbourg, il oriente ses recherches vers les applications chirurgicales en proposant un système d'automatisation du geste endoscopique exploitant les techniques d'asservissement visuel, un projet qui lui vaut d'être lauréat du concours national « ACI jeunes chercheurs ».

Revenu à l'UPMC, il poursuit ses recherches dans cette idée que les systèmes robotiques peuvent exploiter des informations sensorielles pour réaliser des gestes simples en autonomieautonomie, et non sous contrôle complet du chirurgien comme c'est le cas actuellement. Trois expériences réalisées sur des animaux par son équipe de recherche jalonnent ce travail :

• en 2005, un robotrobot baptisé MC2E, capable de contrôler en temps réel les efforts appliqués à un organe dans une procédure laparoscopique, est utilisé comme un assistant par le Dr. N. Bonnet pour réaliser une ablationablation de la vésicule. Ce qui est nouveau dans cette expérience c'est que le robot, exploité pour dégager la vésicule en tirant dessus avec une force constante, fonctionne de façon autonome et non pour suivre une trajectoire imposée.

• En 2006, dans le cadre du projet Gabie, un système robotique intervient à l'intérieur d'un cœur battant grâce à un guidage automatique exploitant en temps réel des images échographiques. Le chirurgien ne déplace pas directement le robot mais contrôle la trace de l'instrument directement dans l'image échographique grâce à une interface informatique.

• En 2010, dans le cadre du projet PERSEE, un système micro-robotique permet de réaliser une image in vivoin vivo grâce au balayage d'une sonde d'endomicroscopie confocale à la surface d'un organe. La résolutionrésolution des images est à l'échelle du micronmicron alors que, sur le sujet vivant, l'amplitude des mouvements engendrés par la respiration est 10 000 fois plus grande (un centimètre).

Guillaume Morel est auteur ou co-auteur d'une centaine d'articles dans des journaux et conférences internationales à comité de lecture de rang A ainsi que d'une dizaine de brevets internationaux déposés ou en cours de dépôt.

Projet scientifique :

Au cours des dernières années, l'équipe Agathe a opéré un virage important en abandonnant le paradigme de l'automatisation du geste par commande référencée capteurs, qui, bien que techniquement réalisable, se heurte à des obstacles liés à la sécurité d'exécution et à des difficultés d'acceptation par le corps médical. Aujourd'hui, les travaux sont orientés vers le développement du concept de comanipulation : les dispositifs considérés sont des systèmes robotiques qui travaillent en synergiesynergie avec le chirurgien, pour augmenter ses capacités motrices ou sensorielles et faciliter la réalisation de l'intervention. Parallèlement, les mêmes concepts sont exploités dans des applications de rééducation fonctionnelle.

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métier

On pourrait penser qu’être enseignant-chercheur, c’est exercer deux métiers : enseigner et faire de la recherche. C’est en fait beaucoup plus copieux que ça. Récit d’une journée type. 6h00 : réveil. Café. Un premier coup d’œil sur les mails, ceux de la nuit, qui viennent souvent des Etats Unis ou d’Asie. Rien d’urgent, c’est-à-dire rien qui ne peut attendre que je sois au labo. Je marque en rouge deux messages, qui appellent une réponse dans la journée. Si je n’y réponds pas, ils vont disparaître dans le flot. Pas grave : si c’est important je serai relancé. 6h30 : deuxième café. Lecture de mes notes de cours. Je recopie sur un brouillon quelques passages clé, pour éviter de cafouiller au tableau. Je répète mentalement le cours. Où en était-on la dernière fois ? Comment résumer rapidement les épisodes précédents pour remettre les étudiants dans le bain ? Quel est le message principal aujourd’hui ? A quel élément de leur vie quotidienne vais-je pouvoir le rattacher ? 8h20 : arrivée au labo. Vite, imprimer le synopsis du cours pour les étudiants, attraper un vidéoprojecteur. Quelle salle déjà ? Ça change tout le temps. 8h30-10h30 : cours d’Automatique. Un vrai plaisir à enseigner, cette matière. Les concepts sont nouveaux pour les étudiants mais les outils mathématiques restent très accessibles. On peut se concentrer sur le sens physique des choses. Il y a plusieurs façons d’expliquer les mêmes phénomènes, dans l’espace des temps, celui des fréquences, celui des propriétés mathématiques des modèles. Tout ça se rejoint et reste très cohérent. Les illustrations dans la vie quotidienne sont nombreuses. Aujourd’hui, j’utilise la parabole de la douche : comment faites vous pour régler la température de la douche, chez vous ? Et lorsque vous couchez dehors ? Pourquoi est-ce différent ? Qu’en déduisez-vous sur l’importance de disposer d’un modèle dans un problème de régulation ? Et sur les moyens à mettre en œuvre pour l’identifier ? Récemment, une ancienne élève m’a dit (en rougissant !) que pendant longtemps, après ce cours, elle s’était observée lorsqu’elle réglait la température de sa douche pour comprendre ce qui se passe. Gagné ! 10h45 : de retour dans mon labo, je veux dire mon bureau. Café. Immense bazar. Il faut vraiment que je trouve le temps de ranger, cela devient gênant pour travailler. Pas la place de poser mon ordinateur portable. Nouvelle salve d’emails. Je m’occupe cette fois de l’administration des enseignements. Je suis responsable d’une formation d’ingénieurs que nous avons mise en place il y a quatre ans. La deuxième promotion est sortie il y a quelques semaines. Je suis en train de collecter les informations que les jeunes diplômés m’envoient : ont-ils trouvé un emploi ? Si oui, dans quelles conditions ? Les statistiques sont bonnes, seuls deux diplômés cherchent encore une situation. Je les encourage. C’est un immense soulagement car la formation que nous proposons est la seule dans son genre en France. C’est bien joli d’innover, mais le juge de paix, c’est l’insertion professionnelle. Et lorsque qu’on a entraîné des jeunes dans une nouvelle aventure, c’est bien leur avenir qu’on a engagé. 1 1h30 : j’ai rendez-vous avec un doctorant. En fait, on avait rendez-vous à 11h, mais j’ai dû lui dire de repasser car la journée est trop remplie. J’ai été désagréable en le renvoyant dans ses cordes. Nous buvons un café pour commencer la séance de travail sur de meilleures bases. Il est en train de rédiger un article sur ses derniers résultats de recherche. C’est très difficile pour lui, car il ne s’agit pas seulement de décrire ce qu’il fait, mais de le mettre en perspective et d’argumenter de l’originalité et la pertinence du travail. Il y a une dimension assez littéraire et en plus la rédaction se fait en anglais. Or il n’est doué ni pour l’écriture, ni pour les langues étrangères. C’est très frustrant pour lui car ses résultats sont bons. Nous décidons d’un plan d’attaque : résumer en quelques phrases le contenu essentiel de sa contribution. Il devra rédiger tout son article avec ces quelques phrases en tête… Aussi, on voit bien que pour cet article, il lui manque un résultat expérimental. Il va devoir refaire des manips avant la fin de la semaine. Il est sous pression car il sait que s’il manque la date limite de soumission de son article, il devra attendre une autre opportunité et il dispose d’un temps finalement très limité pour publier. Sans publication, point d’avenir dans la profession. Je me dis que l’encadrement doctoral est le point de rencontre de l’enseignement et la recherche. Finalement, on fait de la formation par apprentissage. Mon propre savoir-faire, je l’ai acquis en roulant ma bosse à droite et à gauche. Comment le transmettre à ces jeunes ? 12h30 : déjeuner avec un partenaire industriel. La valorisation est aussi une des missions statutaires des enseignants-chercheurs. Mais nous sommes trop souvent livrés à nous-mêmes. Il nous faut trouver des contacts dans le monde industriel, comprendre les besoins, les attentes. Il faut se départir des réflexes protectionnistes, ceux qui nous font penser que les industriels sont là pour nous voler nos idées et s’enrichir sur le dos du contribuable. Bien sûr qu’ils sont là pour créer de la richesse autour de notre activité. Le type avec qui je mange m’explique l’importance du marketing dans la valorisation d’une invention. Culturellement, le choc est frontal : dans mon microcosme, marketing, c’est presque une insulte. Mais je l’écoute et je comprends ce qu’il veut dire : de l’invention à son utilisateur (dans mon cas : le chirurgien puisque je travaille dans le domaine de la robotique médicale) il y a un long chemin, le long duquel quelqu’un doit porter la valise. Et cela demande de l’énergie, de la conviction, du temps, de l’argent. Et cela pourrait bien avoir autant de valeur que l’invention en elle-même. Lui aussi, il a un savoir-faire qui est indispensable à la valorisation de nos travaux. 13h45 : j’ai placé une réunion avec des anthropologues avec qui je travaille sur l’observation de la création d’un objet technologique dans un projet impliquant des chercheurs en robotique, des médecins et des industriels. Pour moi c’est une grande respiration que de discuter et réfléchir avec eux. C’est très étrange : je suis, dans cette recherche, observateur et analyste, tout en étant acteur du projet. Les discussions sont passionnantes. Je découvre tout un corpus de connaissances et de méthodes en sociologie du travail, en ethnographie, … La pluridisciplinarité prend enfin, dans ma vie de scientifique, un sens concret, un vrai enrichissement pour moi, et, je crois, pour mes partenaires. 15h : je quitte en courant et à regret cette salvatrice pause anthropologique pour une réunion du Directoire de la recherche de l’UPMC. Ici, on discute de la « politique de recherche de l’établissement ». Nous sommes dans la salle du conseil de l’établissement, au 23ème étage de la tour Zamansky, sur le campus Jussieu : une immense table ovale high-tech, avec des micros, des caméras qui suivent les intervenants, des écrans individuels, le tout avec une vue panoramique époustouflante sur Paris, Notre Dame, la Tour Eiffel, etc. Il y a deux ans, l’UPMC a voulu rajeunir son directoire et j’ai fait partie des jeunes nommés. Je suis très impressionné par l’intelligence et l’éloquence de mes prestigieux collègues. Cependant, il faut bien le dire, les débats sont souvent assez ennuyeux. On parle beaucoup moins de sciences que de budget des laboratoires, de l’administration, de modernisation, de restructuration. Le système universitaire français a subi de grandes évolutions ces dernières années, caractérisées notamment par la multiplication des personnes morales et des regroupements stratégiques. Aujourd’hui, nous passons notre temps à essayer de décoder le système pour comprendre qui décide quoi. Ainsi, moi, je suis dans un laboratoire de recherche (Institut des Systèmes Intelligents et de Robotique) qui dépend à la fois de l’UPMC et du CNRS. Ça fait des années que c’est comme ça, et jusque là on s’y retrouve. Mais voilà, depuis quelques années, ce ne sont pas ces tutelles qui nous donnent de l’argent. C’est principalement l’ANR (Agence Nationale de la Recherche), à travers le financement des projets. L’ANR nous demande de monter des projets, de préférence, dans le cadre de Pôles de Compétitivité (regroupements thématiques d’acteurs académiques et industriels jouant un peu le rôle de lobbys). Pour l’évaluation, on a créé l’AERES, Agence d’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur, qui note les équipes. Et puis tout s’est accéléré. Aujourd’hui, mon laboratoire émarge dans un projet de LABEX (laboratoire d’excellence Sorbonne Tech qui regroupe plus laboratoires d’ingénierie dans mon université et ailleurs), dont les contours sont différents de ceux de l’UFR (une faculté disciplinaire dans une université) ainsi qu’un EQUIPEX (equipement d’excellence) qui regroupe, cette fois sous la tutelle du CNRS, 15 labos de recherche en robotique en France. Mon Université se fond dans un PRES (Pôle de Recherche et d’Enseignement Supérieur Sorbonne Universités, qui regroupe plusieurs établissements dont l’UPMC) lequel vient de déposer, sous une géométrie élargie, un projet IDEX (Initiative d’excellence). A côté de ça, il m’est demandé de participer à un ITMO (Institut Thématique Multi Organismes - Technologies pour la Sante), qui réunit le CNRS, l’INSERM et le CEA, de regarder les appels à projet d’OSEO, du FUI, etc … Je vois défiler des schémas organisationnels tentaculaires qui deviennent stérilisants. C’est assez décourageant. 17h : Retour au labo avec un léger mal de crâne. 2 comprimés dans un café. Je commence à dépiler les emails marqués en rouge depuis le matin. L’éditeur en chef d’une revue scientifique pour laquelle je suis éditeur associé me presse de rendre l’évaluation d’un article que je devrais avoir rendue depuis plusieurs semaines. Je m’y colle : relecture de l’article, des évaluations que j’ai demandées à des collègues. Décision : ce papier ne sera pas publié. Je me demande si j’ai bien fait. 18h : Avant de finir la journée, je dois faire un peu de … comptabilité. Nous appelons ça l’administration de la recherche. Dans un laboratoire de 110 personnes, il y a trois secrétaires. Cela ne suffit pas pour gérer correctement les finances des différents projets. En tant que porteur d’un projet ANR, je dispose d’un budget, je dois veiller à ce que l’argent soit dépensé conformément à un code assez compliqué. Je n’y connais rien. Je me perds dans les chiffres, les amortissements, les charges patronales, les prix qui sont parfois à prendre hors taxe, parfois toutes taxes comprises … Je remplis des tableaux et vérifie que les équipements sont inventoriés. Au fait, c’est quoi un « équipement ». Je cherche et trouve plusieurs définitions. J’abandonne pour cette fois : apparemment, nous ne sommes pas dans le rouge et cette information suffit pour continuer à travailler. 19h : La journée est finie et je vais pouvoir rentrer. Ah, non, mince, il faut absolument que je finisse de remplir le tableau de service avant demain matin. Là, on parle d’administration des enseignements. La responsabilité d’une formation, ce n’est pas seulement définir les programmes et les méthodes pédagogiques. C’est aussi faire des emplois du temps, réunir les équipes pédagogiques, suivre les étudiants, chercher des moyens pour monter des nouveaux projets, etc. Ce soir, c’est passer deux heures devant des tableaux dans lesquels les enseignants ont rempli les heures qu’ils effectuent dans le cadre de cette formation. Je croise avec mes tableaux, je valide ou je corrige. Pas passionnant, mais quand il faut, il faut. 21h : ça y est, je rentre. Promis, demain, je travaille moins longtemps et je prends le temps de lire cet article qu’un collègue m’a envoyé et qui paraît passionnant (enfin, je fais comme si j’y croyais).