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Dans de nombreux domaines, la robotisation ne va pas remplacer les humains mais plutôt venir augmenter leurs capacités en les déchargeant de tâches pénibles ou fastidieuses. De fait, l'Homme et la machine ne seront pas des rivaux mais des collaborateurs (lire à ce sujet, « Mon collègue est un robot » de Valéry Bonneau). Et l'un des enjeux actuels est de faire en sorte de créer un dialogue le plus fluide possible. Dans cet échange, l'intelligence artificielle (IAIA) joue un rôle central en permettant au robot de progresser par l'apprentissage automatique (machine learning)) grâce auquel il accumule une forme d'expérience.
Mais cette expérience doit pouvoir aussi se parfaire en temps réel, sur le terrain. Il faut donc que la personne puisse corriger les erreurs d'un robot aussitôt qu'il les constate. Le plus évident serait l'échange verbal, mais la reconnaissance vocale et l'IA n'ont pas encore atteint un niveau de spontanéité équivalent à celui de deux humains dialoguant entre eux. L'une des pistes explorées par les roboticiens est le contrôle d'un robot par la pensée via une interface neuronale directe. Mais là encore, ce type de dispositif nécessite une gymnastique mentale spécifique qui n'est pas adaptée à un contexte professionnel.
C'est là que l'innovation de chercheurs du MIT (Massachusetts Institute of Technology) et de l'université de Boston pourrait changer les choses de façon radicale. Ils ont développé un système qui détecte l'activité cérébrale spécifique lorsqu'une personne constate une erreur. En résumé, le fait de penser à une erreur suffit pour indiquer au robot qu'il doit corriger son action. Le dispositif repose sur la lecture de l'activité cérébrale via un casque EEGEEG couplé à un algorithme d'apprentissage automatique qui classe les ondes cérébrales en temps réel dans un délai de 10 à 30 millisecondes. Il va repérer les signaux cérébraux appelés ErrPs (error-related potentials ou potentiels liés aux erreurs) qui se produisent dès que notre cerveaucerveau identifie une erreur.
Le robot Baxter de Rethink Robotics a servi pour cette expérience d’interaction Homme-machine. Munie d’un casque EEG, une personne observe la machine qui doit ranger des objets dans des caisses. Lorsque le robot semble parti pour se tromper, le réflexe cérébral de l’observateur va immédiatement déclencher l’envoi d’un signal qui amène Baxter à se corriger. Tout cela se passe en quelques millisecondes. © MIT CSAIL
L’intensité du signal cérébral est corrélée à l’importance de l’erreur constatée
Dans le cadre de leur étude, les chercheurs du CSAIL (Computer Science and Artificial IntelligenceIntelligence Laboratory) du MIT et de l'université de Boston ont travaillé avec le robot Baxter de Rethink Robotics. Comme on peut le voir dans la vidéo ci-dessus, l'interaction est assez simple. Baxter doit ranger des bombes de peinture et des bobines de câbles dans deux caisses séparées. Dès que la personne qui l'observe voit qu'il se trompe, son activité cérébrale envoie un signal qui amène le robot à corriger son geste quasi instantanément.
Bien entendu, le dispositif demande à évoluer au-delà de scénarii binaires tels que celui-ci. Mais cette avancée laisse entrevoir la possibilité d'une interaction beaucoup plus intuitive entre l'Homme et la machine. « Imaginez de pouvoir instantanément dire à un robot d'accomplir une action sans avoir besoin de taper une commande, d'appuyer sur un bouton ou même de prononcer un mot », commente avec enthousiasme Daniela Rus, directrice du CSAIL.
Selon elle, ce type de contrôle cérébral pourrait être utilisé avec les robots industriels voire même les voitures autonomes. Ces travaux ont fait l'objet d'un article scientifique qui sera présenté en mai prochain lors de l'IEEEIEEE International Conference on Robotics and Automation (ICRA).