Des données issues de précédentes recherches suggèrent que la conscience est susceptible d’être en place au début de la petite enfance et peut même apparaître avant la naissance. Ces résultats pourraient présenter d'importantes implications cliniques, éthiques et juridiques.


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    La conscience est non seulement « l'un des mots les plus difficiles à définir » d'après le philosophe André Comte-Sponville, mais son apparition infantile reste également teintée de mystère. Quand et sous quelle forme la conscience émerge-t-elle pour la première fois ? Il existe deux écoles pour répondre à la question temporelle. « Nous ne pouvons pas nous souvenir de notre enfance, et les chercheurs sur la conscience ne sont pas d'accord sur la question de savoir si la conscience apparaît "tôt" (vers la naissance) ou "tard" - vers l'âge d'un an ou même beaucoup plus tard" », explique dans un communiqué le Dr Tim Bayne, professeur de philosophie à l'université Monash (Melbourne).

    Deux visions d’apparition de la conscience

    Peu de gens doutent que la conscience soit généralement en place à l'âge d'un an, où les enfants ont un large éventail de capacités perceptives et cognitives et présentent des comportements dits « communicatifs ». Certains théoriciens défendent alors une vision « tardive », suggérant que la conscience nécessite des capacités cognitives qui sont peu susceptibles d'être en place avant le premier anniversaire de l'enfant (au plus tôt).

    D'autres théoriciens défendent un récit « précoce », suggérant que la conscience est susceptible d'être en place à la naissance (ou peu de temps après) et peut même émerger au cours du troisième trimestre de grossesse. C'est cette vision que défend une équipe internationale de chercheurs - du Trinity College de Dublin et leurs collègues d'Australie, d'Allemagne et des États-Unis - après examen des progrès empiriques et méthodologiques dans ce domaine. Les résultats de l'étude, intitulée « La conscience au berceau : l'émergenceémergence de l'expérience infantile », sont publiés dans la revue Trends in Cognitive Science.

    Ces progrès prennent en compte l'utilisation de certains marqueurs issus de l'imagerie cérébrale chez les adultes et qui permettent de différencier de manière fiable la conscience de son absence. C'est la première fois que ces marqueurs sont utilisés pour évaluer la possible conscience des nourrissons.

    Quatre perspectives sur l’émergence de la conscience, regroupées en deux visions : « précoce » ou « tardive ». © Tim Bayne et al.
    Quatre perspectives sur l’émergence de la conscience, regroupées en deux visions : « précoce » ou « tardive ». © Tim Bayne et al.

    Pas de réponse définitive

    « Bien qu'il soit prématuré de faire des affirmations définitives sur le moment où la conscience émerge pour la première fois, nous suggérons que les preuves actuelles indiquent que la conscience est susceptible d'être en place dès la petite enfance, et peut même commencer avant la naissance. Notre objectif principal, cependant, n'est pas de fournir une réponse définitive à la question de savoir quand (et sous quelle forme) la conscience émerge pour la première fois, mais de présenter les développements récents dans un cadre convaincant qui fera avancer la discussion de cette question importante », écrivent les auteurs.

    Il faut préciser que la notion de conscience impliquée dans l'étude relève davantage d'une « sensibilisation » ou d'une « conscience primaire » (d'un point de vue de l'expérience) que d'autres formes qui nécessitent une réflexion ou une conscience de soi. « Ces caractéristiques peuvent même être absentes dans les états de conscience adultes et il est peu probable qu'elles soient présentes aux premiers stades de l'expérience de la vie », précisent les chercheurs.