Les étoiles à battements de cœur sont des étoiles doubles qui se présentent comme des étoiles variables particulières. L'une d'elles a des variations de lumière spectaculaires dont on pense maintenant qu'elles proviennent du crash d'immenses vagues de plasma à la surface d'une étoile, des vagues de marée géantes comme dans Interstellar.


au sommaire


    On doit à Newton la première théorie scientifique et quantitative des marées sur Terre. Cette théorie fut considérablement développée par Laplace (le Newton français selon les Anglais en raison de ses contributions en mathématique et astronomie) dans son traité de mécanique céleste et plus tard par Poincaré. Au cours du XXe siècle, la théorie des marées a été transposée aussi bien aux autres planètes du Système solaire qu'aux étoiles, ce qui n'est guère étonnant puisque ce n'est pas pour rien que l'on parle de la théorie de la gravitation universelle.

    On sait ainsi que ce sont les forces de maréeforces de marée qui sont responsables du volcanisme infernal de Io, l'une des principale luneslunes de JupiterJupiter. La majorité des étoiles dans la Voie lactéeVoie lactée, et sans aucun doute aussi dans les autres galaxiesgalaxies, étant des systèmes binairessystèmes binaires (voir triples et même sextuples), on pouvait s'attendre à ce que des forces de marée importantes s'exercent sur chacune des étoiles membres de tels systèmes lorsqu'elles sont particulièrement rapprochées, au point d'arracher parfois de la matièrematière de l'une vers l'autre.

    Ce schéma illustre le concept d'étoiles à battements de cœur. La courbe de lumière de ces étoiles ressemble à un électrocardiogramme. Le pic de luminosité des pulsations lumineuses se produit quand les deux étoiles sont proches. Elles sont alors fortement déformées. © Nasa
    Ce schéma illustre le concept d'étoiles à battements de cœur. La courbe de lumière de ces étoiles ressemble à un électrocardiogramme. Le pic de luminosité des pulsations lumineuses se produit quand les deux étoiles sont proches. Elles sont alors fortement déformées. © Nasa

    Des étoiles déformées par les forces de marée

    On observe bien des étoiles doubles de ce genre et les observations du satellite Kepler ont montré qu'il existait un certain nombre de ce qui est appelé des étoiles à battements de cœur. Sous le regard de Kepler, on voit ainsi que la courbe de lumièrelumière de ces étoiles ne varie pas simplement de manière périodique comme le font des étoiles variablesétoiles variables pulsantes périodiques.

    La forme de la courbe de lumière fait penser à un électrocardiogrammeélectrocardiogramme et on a fini par comprendre qu'une partie des pulsations observées était due au fait qu'une des étoiles est sur une orbiteorbite assez elliptique autour de l'autre, la conduisant à s'approcher assez près de son étoile compagne (les étoiles à battements de cœur peuvent s'approcher à seulement quelques rayons stellaires l'une de l'autre). De même que sur Terre les océans prennent la forme d'une sorte de ballonballon de rugby, un ellipsoïde de rotation sous l'action des forces de marée, la surface des deux étoiles fait de même et comme elles sont en mouvementmouvement, nous les voyons alternativement selon l'orientation de la partie la plus lumineuse en raison de la déformation des surfaces des deux étoiles qui suivent le mouvement de l'une autour de l'autre.


    Une des scènes mythiques d'Interstellar. Les forces de marée sur la planète Miller exercées par le trou noir supermassif Gargantua donnent des ondes de marée gigantesques. © Warner Bros, Paramount Pictures, Legendary Pictures, Syncopy Films

    Aujourd'hui, deux astrophysiciensastrophysiciens états-uniens sont arrivés à la conclusion que ce phénomène prenait des proportions dantesques avec la formation de gigantesques vaguesvagues de marée à la surface de l'une des étoiles du Système binaire Macho 80.7443.1718. Comme son nom l'indique, on avait fait sa découverte à l'occasion de la campagne de recherche pendant les années 1990 effectuée en se basant sur le principe des micro-lentilles gravitationnelles. Il s'agissait de chasser des Macho (acronyme de massive astrophysical compact halo object) des objets hypothétiques compacts et sombres, tels des naines brunesnaines brunes ou des trous noirstrous noirs primordiaux, pouvant errer dans le halo galactique et rendre compte de la nature de la matière noirematière noire. En passant devant une étoile, un Macho devait la faire briller plus momentanément par effet de lentillelentille.

    Des vagues de marée de 4,3 millions de km de haut tous les mois

    Dans le cas de Macho 80.7443.1718, l'origine du pic de luminositéluminosité initialement observé s'est révélée tout autre, comme l'explique un communiqué du Centre d'astrophysiqueastrophysique-Harvard & Smithsonian (CfA) aux États-Unis. Le passage rapproché de la plus petite étoile fait se lever sur la plus grosse, contenant environ 35 massesmasses solaires, des vagues de marée qui n'ont rien à envier à celles sur la planète Miller dans Interstellar.  

    Une vue d'artiste de l'onde de marée se transformant en vague déferlante à la surface d'une des étoiles de Macho 80.7443.1718. © Melissa Weiss, CfA
    Une vue d'artiste de l'onde de marée se transformant en vague déferlante à la surface d'une des étoiles de Macho 80.7443.1718. © Melissa Weiss, CfA

    Les raz-de-maréeraz-de-marée qui en résultent s'élèvent à environ un cinquième du rayon de l'étoile géanteétoile géante, ce qui équivaut à des vagues à peu près aussi hautes que trois soleilssoleils empilés les uns sur les autres, soit environ 4,3 millions de kilomètres de haut !

    Cela fait dire à Morgan MacLeod, qui a réalisé une simulation numériquesimulation numérique avec le célèbre Abraham (Avi) Loeb  très controversé pour ses affirmations sur les E.T et qui est coauteur avec MacLeod d'un article dans Nature Astronomy : « Chaque crash des immenses raz-de-marée de l'étoile libère suffisamment d'énergieénergie pour désintégrer notre Planète entière plusieurs centaines de fois ! »

    Pas étonnant que lors de sa découverte, la binaire ait rendu les astrophysiciens perplexes. Les étoiles à battements de cœur ne voient en général leur luminosité varier que de 0,1 % environ alors que dans le cas de Macha 80.7443.1718, c'est de  l'ordre de 20 %, du jamais-vu auparavant.

    Le crash d'une déferlante géante à la surface de l'étoile principale se produit tous les mois environ et selon les simulations numériques il produit une éjection de matière au-dessus de l'étoile qui alimente une enveloppe atmosphérique qui se met à briller de façon caractéristique, donnant une signature du phénomène de déferlante géante.

    Le communiqué de Harvard précise qu'en fait le cas de Macho 80.7443.1718 ne doit pas être unique car on a compris dernièrement que sur les quelque 1 000 étoiles à battements de cœur découvertes jusqu'à présent, une vingtaine d'entre elles présente de grandes fluctuations de luminosité proches de celles du système simulé par MacLeod et Loeb.