Une étoile qui explose en supernova, ce n’est pas si rare. Mais lorsque des astronomes découvrent qu’elle a, au préalable, perdu l’équivalent de la masse de notre Soleil, ça devient exceptionnel.


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    Lorsqu'elles arrivent en fin de vie, les étoiles dites supergéantes rougessupergéantes rouges - qui présentent entre 8 et 25 fois la masse de notre Soleil - explosent en ce que les astronomesastronomes appellent des supernovae de type II. C'est ce qui est arrivé à une étoile située à quelque 20 millions d'années-lumière de notre Terre. Sa supernova, baptisée SNSN 2023ixf, a été découverte il y a quelques mois seulement. Le phénomène n'est pas si rare. Et s'il en est question aujourd'hui, c'est que les chercheurs du Centre d'astrophysique de l'université de Harvard et de la Smithsonian Institution (États-Unis) lui ont observé un comportement tout à fait inattendu qu'ils décrivent dans The Astrophysical Journal Letters.

    La supernova SN 2023ixf dans la galaxie M101, la galaxie du Moulinet, dans la constellation de la Grande Ourse. © S. Gomez, STScl 
    La supernova SN 2023ixf dans la galaxie M101, la galaxie du Moulinet, dans la constellation de la Grande Ourse. © S. Gomez, STScl 

    Cette supernova remet les théories en cause

    En principe, en effet, lorsque l'onde de choc atteint le bord extérieur de l'étoile, quelques heures après l'explosion seulement, une supernova de type II produit un éclairéclair de lumière. Ça n'a pas été le cas pour SN 2023ixf. Les astronomes ont observé le phénomène avec plusieurs jours de retard. Un retard qu'ils attribuent à la présence d'un matériaumatériau dense provenant d'une perte de masse. Leur conclusion : dans l'année qui a précédé son explosion en supernova, la supergéante rouge a perdu une masse proche de celle de notre Soleil. De quoi remettre en question la théorie de l'évolutionthéorie de l'évolution des étoiles massives et de leurs supernovaesupernovae.

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    Une étoile a explosé en supernova dans une galaxie de la Grande Ourse !

    Les observations de SN 2023ixf suggèrent qu'elle a connu une instabilité au cours des dernières années de sa vie qui a mené vers cette perte de masse énorme. En cause, peut-être, les dernières étapes de combustioncombustion nucléaire d'éléments lourds de type siliciumsilicium dans le noyau de l'étoile.

    Cette vue d’artiste de SN 2023ixf montre la brillante explosion qui s’est produite après une perte de masse inattendue. © Mélissa Weiss, Centre d’astrophysique de l’université de Harvard et de la Smithsonian Institution
    Cette vue d’artiste de SN 2023ixf montre la brillante explosion qui s’est produite après une perte de masse inattendue. © Mélissa Weiss, Centre d’astrophysique de l’université de Harvard et de la Smithsonian Institution

    Des supernovae difficiles à étudier

    « La seule façon de comprendre le comportement des étoiles massives au cours des dernières années de leur vie jusqu'au point d'explosion est de découvrir les supernovae lorsqu'elles sont très jeunes, et de préférence à proximité, puis de les étudier sur plusieurs longueurs d'ondelongueurs d'onde », explique Edo Berger, professeur d'astronome à Harvard, dans un communiqué. « En utilisant à la fois des télescopestélescopes optiques et millimétriques, nous avons transformé SN 2023ixf en une machine à voyager dans le temps pour reconstruire ce que faisait son étoile génitrice jusqu'au moment de sa mort. » Le tout ayant été rendu possible grâce à des astronomes amateurs qui surveillaient le ciel au bon moment pour alerter les professionnels et leurs instruments de pointe.


    Des astronomes citoyens publient leurs découvertes sur la supernova observée dans la Grande Ourse

    Ils sont plus d'une centaine, possédant des eVscopes, la majorité étant des particuliers mais d'autres sont des astronomes professionnels de renom comme Franck Marchis et Alexei Filippenko. Ils viennent de publier collectivement un article scientifique sur la supernova la plus proche de la Voie lactéeVoie lactée de la dernière décennie, illustrant la puissance grandissante du réseau issue de la collaboration entre le Seti Institute en Californie et la société Unistellar en France.

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco paru le 23/07/2023

    Une supernova vient d’être observée dans la galaxie M101 dite galaxie du Moulinet. © AkuAku, Adobe Stock
    Une supernova vient d’être observée dans la galaxie M101 dite galaxie du Moulinet. © AkuAku, Adobe Stock

    Il est de plus en plus facile pour des astronomes amateurs, au sens large, de parcourir des chemins qui n'étaient accessibles qu'aux astronomes du tout début du XXe siècle, par exemple en posant leur candidature au DUAO (Diplôme universitaire d’astronomie observationnelle) de l'Observatoire de la Côte d'Azur (OCA) ou en devenant un des astronomes citoyens du réseau mondial créé par le Seti Institute (Search for Extra-Terrestrial IntelligenceSearch for Extra-Terrestrial Intelligence Institute) en Californie et la société Unistellar en France.

    L'un de ces fondateurs, l'astronome Franck Marchis, vient de le montrer une fois de plus en participant à la publication d'un article dans Research Notes of the American Astronomical Society qui établit un record, celui du plus grand nombre d'astronomes citoyens, mais aussi professionnels car on retrouve dans les signataires par exemple Alexei Filippenko (un astrophysicienastrophysicien états-uniens bien connu, professeur d'astronomie à l'Université de Californie à Berkeley et qui a participé à la découverte de l'énergie noireénergie noire en étudiant les supernovae), ayant participé conjointement à l'étude d'un phénomène astrophysique et qui sont cosignataires de l'article scientifique à son sujet.

    Une image de la galaxie M101 prise par l'observateur Unistellar Michael Cunningham. SN 2023ixf est indiqué par la flèche orange. © <em>Seti Institute</em>, Unistellar
    Une image de la galaxie M101 prise par l'observateur Unistellar Michael Cunningham. SN 2023ixf est indiqué par la flèche orange. © Seti Institute, Unistellar

    Une SN II sous l'œil des eVscope

    Ils sont en effet 123 au total à avoir utilisé un eVscope d’Unistellar sur toute la Planète pour le suivi de l'évolution de la courbe de lumière de la supernova récente la plus proche de la Voie lactée. Il s'agit de SN 2023ixf, repéré pour la première fois le 19 mai 2023 par le célèbre astronome amateur japonais Koichi Itagaki, dont les photonsphotons ont commencé à nous parvenir en mai 2023 après un voyage d'environ 22 millions d'années depuis la galaxiegalaxie Messier 101Messier 101 située dans la constellation de la Grande Ourseconstellation de la Grande Ourse.

    Les astronomes citoyens se sont rapidement trouvés mobilisés, juste une heure après l'alerte donnée par Koichi Itagaki, dans le cadre du nouveau programme scientifique Cosmic Cataclysms de Seti et Unistellar, soutenu par les Fondations Richard Lounsbery et Gordon et Betty Moore, ce qui permet à ces astronomes citoyens d'être parmi les premiers à être témoins d'événements cataclysmiques, comme les supernovae et les sursautssursauts gamma, et d'aider les astronomes à découvrir ce qui les a provoqués.

    Pendant plus d'un mois, les astronomes citoyens ont donc suivi l'évolution de la courbe de lumière caractéristique d'une supernovae de type II, pour reprendre la classification de l'astronome germano-américain Rudolph Minkowski et de l'astronome suisse Fritz Zwicky qui ont contribué au début du XXe siècle à l'élucidation de la nature des « nouvelles étoiles », en abrégé appelées des novae par Tycho Brahe et Johannes Kepler, autre célèbre bâtisseur du Ciel, selon les termes des romans historiques de Jean-Pierre Luminet.

    SN 2023ixf est donc le produit final et explosif de la vie d'une étoile contenant au moins 8 à 10 masses solaires et qui a probablement laissé derrière elle un cadavre stellaire sous le forme d'une étoile à neutrons, un astreastre dont on doit la première description théorique sérieuse rien de moins qu'à Robert Oppenheimer !

    La courbe de lumière de la supernova SN 2023ixf, utilisant les données prises par les astronomes citoyens du <em>Seti Institute</em>-Unistellar, montre comment la luminosité de la supernova a changé avec le temps. Les observations photométriques de la supernova sont représentées par des cercles pleins, tandis que les observations qui n'ont pas détecté la supernova mais ont révélé une limite à sa luminosité sont représentées par des triangles ouverts. L'encart montre les 1,5 premiers jours d'observations prises par le réseau de science citoyenne. L'ajustement du modèle est représenté par une ligne blanche. © <em>Seti Institute</em>-Unistellar
    La courbe de lumière de la supernova SN 2023ixf, utilisant les données prises par les astronomes citoyens du Seti Institute-Unistellar, montre comment la luminosité de la supernova a changé avec le temps. Les observations photométriques de la supernova sont représentées par des cercles pleins, tandis que les observations qui n'ont pas détecté la supernova mais ont révélé une limite à sa luminosité sont représentées par des triangles ouverts. L'encart montre les 1,5 premiers jours d'observations prises par le réseau de science citoyenne. L'ajustement du modèle est représenté par une ligne blanche. © Seti Institute-Unistellar

    Un outil pour percer les mystères des supernovae

    Ce qui est certain, c'est que, toujours selon le communiqué du Seti Institute, « c'est vraiment incroyable ce que ce réseau scientifique citoyen peut faire », comme l'a déclaré Lauren Sgro, qui a dirigé l'étude avec Tom Esposito, tous les deux membres d'une équipe de chercheurs de l'Institut guidée par Franck Marchis, qui y est astronome senior, également directeur scientifique et cofondateur d'Unistellar. « C'était la supernova la plus proche de la dernière décennie, et les observateurs ont pleinement profité de cette occasion unique. Ils ont sauté sur la cible dès que possible et ont continué à observer, ce qui nous a permis de constater tout le potentiel de ce programme ». Rappelons en effet que les observations précoces des supernovae SN II sont rarement disponibles. Or elles sont nécessaires pour vraiment comprendre la nature des étoiles génitrices de ces explosions et étudier plus en profondeur ces dernières car elles recèlent encore des mystères.

    Les emplacements des observateurs de la noosphère avec un eVscope d'Unistellar qui ont fourni des données sur SN 2023ixf. © <em>Seti Institute</em>-Unistellar 
    Les emplacements des observateurs de la noosphère avec un eVscope d'Unistellar qui ont fourni des données sur SN 2023ixf. © Seti Institute-Unistellar 

    Les astronomes citoyens d'Unistellar devraient dans les années à venir participer à plusieurs études scientifiques du même genre avec les supernovae proches qui seront détectées rapidement par l’Observatoire Vera C. Rubin, le LSST.