La Russie préserve son aviation depuis le début de la guerre en Ukraine. Elle serait toutefois en train d'amasser de nombreux aéronefs près de la frontière pour appuyer une grande offensive. Parmi les modèles vedettes des forces aérospatiales, deux avions modernes engagés dans le conflit se distinguent même si le Kremlin cherche à les préserver.


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    Depuis le début de l'invasion en Ukraine, l'armée russe a très peu engagé ses forces aériennes. Les combats ont été majoritairement dominés par l'artillerie et les blindés. Aucun des deux belligérants n'a pu établir de supériorité aérienne. Contrairement aux véhicules terrestres et notamment les chars dont on estime que la moitié du parc opérationnel a été détruit ou capturé, les forces aérospatiales russes (VKS) sont pratiquement intactes. Jusqu'à maintenant, les avions de chasse et bombardiers servent essentiellement à lancer des missiles à longue portée depuis le territoire russe.

    Et pour cause, les défenses aériennes ukrainiennes sont suffisamment efficaces pour dissuader l'aviation russe de s'engager. Ainsi, alors que leur usage reste très limité sur le front, depuis presque un an, 65 avions russes ont été détruits, notamment les vieux avions d'attaque au sol Su-25 Frogfoot (25). Même les modernes et coûteux bombardiers Su-34 Fullback engagés ont subi les foudresfoudres des défenses aériennes ukrainiennes : 18 d'entre eux ont été détruits, selon le site Oryx qui recence, d'après photos et vidéos, le nombre de véhicules et aéronefsaéronefs neutralisés depuis le début du conflit.

    Mais, aujourd'hui, selon le renseignement américain, il semble que la Russie amasse des forces à sa frontière et sur les territoires contrôlés en Ukraine pour mener une nouvelle offensive. Parmi le matériel accumulé, les alliés de l'Ukraine ont pu également constater l'arrivée de nombreux « aéronefs à voilure fixe et rotatifs » près de la frontière ukrainienne. Ils pourraient servir d'appui à l'offensive terrestre. Même si cette hypothèse reste douteuse étant donné la doctrine militaire russe quant à l'engagement de son aviation.

    Le Su-57 Felon est la star des avions de chasse russe. De cinquième génération, il associe polyvalence, puissance et furtivité. Cinq de ces avions ont été identifiés sur une base russe à portée de l’Ukraine. La Russie en possède une dizaine. Trop peu pour faire la différence. © <em>Ministry of defense UK</em>
    Le Su-57 Felon est la star des avions de chasse russe. De cinquième génération, il associe polyvalence, puissance et furtivité. Cinq de ces avions ont été identifiés sur une base russe à portée de l’Ukraine. La Russie en possède une dizaine. Trop peu pour faire la différence. © Ministry of defense UK

    L’avion de combat le plus moderne de la flotte russe

    Outre ces vieux modèles datant parfois de l'époque soviétique, comme le Su-25 et le Su-30, la Russie dispose aussi de quelques fleurons qu'elle pourrait engager lors de cette offensive. Parmi les stars symboliques, il y a le Sukhoi Su-57, autrement appelé Felon. Testé en 2018 en Syrie, et en service officiellement depuis 2020, ce supersonique de cinquième génération est polyvalent, à l'instar de notre Rafale national. Il est engagé depuis le début de conflit, mais ne se serait pas approché des zones de combat. La Russie craindrait qu'il ne soit abattu, puis décortiqué par l'ennemi. Il faut dire que le moindre Su-57 endommagé ou abattu viendrait ternir définitivement la réputation de l’avion et son exportation. En attendant, des photos montrent cinq exemplaires du Su-57 sur une base située à 500 km de la frontière avec l'Ukraine. En tout, il n'y aurait pas plus d'une dizaine de cet appareil dans les forces aériennes russes.

    Les secrets du « Cygne blanc » bientôt dévoilés ?

    Du côté des bombardiers, l'autre vedette est le fameux BlackJack, c'est-à-dire le Tu-160 autrement appelé « Cygne blanc » par les Russes. Mis en service à la fin des années 80, il s'agit du bombardier supersonique à capacité nucléaire le plus lourd existant (max 270 T). Ses ailes sont à géométrie variable pour permettre à l'avion de passer en mode supersonique. Sa vitessevitesse maximale est alors de Mach 2,1 et il croise autour de 1 000 km/h. Le Tu-160 cultive son aura anxiogène avec sa capacité d'emport d'armement. Il peut embarquer dans ses deux soutes jusqu'à 40 tonnes de munitions. Il fait partie des avions qui tirent des missilesmissiles Kh-55 sur les installation critiques en Ukraine. Il peut d'ailleurs en emporter 12. Il est également capable de lancer jusqu'à 24 missiles Kh-15P. Ces deux types de missiles peuvent être équipés de têtes nucléaires et c'est bien ce qui lui confère ses capacités de bombardier stratégique nucléaire.

    Photo d’un Tu-160 Blackjack ou Cygne blanc prise depuis le cockpit d’un F-16 de l’armée de l’air belge à proximité de l’espace aérien des pays baltes. Les intrusions de ce type d’appareil sont régulières depuis 2017. Les aéronefs russes sont alors interceptés et escortés par la police de l’air de l’Otan. © Sylvain Biget, Composante Air belge 
    Photo d’un Tu-160 Blackjack ou Cygne blanc prise depuis le cockpit d’un F-16 de l’armée de l’air belge à proximité de l’espace aérien des pays baltes. Les intrusions de ce type d’appareil sont régulières depuis 2017. Les aéronefs russes sont alors interceptés et escortés par la police de l’air de l’Otan. © Sylvain Biget, Composante Air belge 

    Outre les modèles datés, c'est la version la plus moderne, le Tu-160 M qui est observée de près par les alliés de l'Ukraine. Le bombardier se distingue des précédentes variantes par de nouveaux turboréacteursturboréacteurs moins énergivores. Avec eux, il dispose d'un rayon d'action de 1 000 kilomètres supplémentaires (8 300 km). Le Kremlin souhaite voir sa flotte passer à 50 TU-160, et n'en compte que 16 de ce modèle pour le moment. Les détails de sa version modernisée restent cependant inconnus.

    Mais le secret ne devrait pas tenir bien longtemps, puisqu'un transfuge russe ayant travaillé sur ce modèle chez Tupolev, à Kazan, s'est réfugié dernièrement aux États-Unis. Il devrait livrer tout ce qu'il sait sur les spécificités des nouvelles versions du Tu-160. Les Américains souhaitent par exemple savoir si le bombardier est capable de lancer les dernières armes hypersoniques mises au point par la Russie. L'ingénieur en sait également beaucoup sur l'organisation de l'usine de Tupolev et son fonctionnement. Qu'il s'agisse du Felon ou de ce Cygne Blanc, la Russie aime communiquer sur ces appareils modernes pour montrer leurs capacités au combat. Mais, pour le moment, le Kremlin ne prend pas le risque de trop les approcher des zones de combat, par crainte de mauvaise publicité, s'ils sont abattus ou touchés.