Face à la survenue d'une guerre de haute intensité aux portes de l'Union européenne, de nombreux observateurs craignent que l'invasion russe en Ukraine puisse provoquer une escalade irrémédiable. Si une guerre nucléaire s'avère hautement improbable, certains s'interrogent sur la possibilité d'une utilisation d'armes nucléaires tactiques par la Russie. 


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    Avec le début de la guerre en Ukraine, le 24 février, les craintes inhérentes à l'utilisation de l'arme nucléaire par la Russie sont allées crescendo. Depuis plus de 40 jours, Vladimir Poutine et certains membres de son gouvernement ont ainsi évoqué l'utilisation de l'arsenal nucléaire. En vain, l'Ukraine bénéficiant d'une aide matérielle et financière continue, tandis que les États-Unis ont exprimé leur volonté de ne pas participer à l'escalade du conflit, qui pourrait mener à un affrontement entre les deux superpuissances. Si la rhétorique du Kremlin semble relever de l'intimidation, des observateurs redoutent l'utilisation d'une arme nucléaire tactique par l'armée russe, dans le but de faire plier les forces ukrainiennes.

    Des « mini » bombes nucléaires

    Il existe deux « types » de bombes nucléaires : les armes stratégiques et les armes tactiques. Ces dernières sont régulièrement évoquées dans de nombreux médias français et anglo-saxons, tels que le Washington Post. Les armes tactiques permettent d'emporter de plus petites têtes nucléaires capables de frapper des cibles militaires (infrastructures, troupes, dépôts) sur des champs de bataille, à courte ou moyenne portée. Une frappe tactique peut s'effectuer avec une bombe à fissionfission (bombe A) ou une bombe à hydrogènehydrogène (bombe H), dont la puissance peut varier jusqu'à 300 kt (kilotonnes), un kt = 1.000 tonnes, de TNT. L'arsenal tactique de la Russie est utilisable par le biais des missilesmissiles Iskander (9M723K1), missiles balistiques dont la portée atteint 500 kilomètres et utilisés par l'armée russe depuis le début de la guerre en Ukraine. 

    Les Iskander sont positionnés sur des tracteurs-érecteurs-lanceurs (TEL), permettant notamment de tirer des missiles sol-air et sol-sol. © Sikaraha, Adobe Stock 
    Les Iskander sont positionnés sur des tracteurs-érecteurs-lanceurs (TEL), permettant notamment de tirer des missiles sol-air et sol-sol. © Sikaraha, Adobe Stock 

    La Russie possède environ 2.000 bombes nucléaires stratégiques, placées en réserve. Le principal de la force nucléaire russe se situe dans son arsenal dit stratégique. Les bombes stratégiques possèdent une puissance bien supérieure aux bombes tactiques et sont destinées à détruire des cibles au-delà d'une zone de conflit. Elles peuvent être envoyées grâce à des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) depuis le sol, les airsairs ou la mer. Actuellement, seuls neuf pays sont en possession de l'arme nucléaire : les États-Unis, la Russie, la France, le Royaume-Uni, la Chine, l'Inde, le Pakistan, l'Israël et la Corée du Nord. La Russie possède 4.500 têtes dont 1.500 actives. Les États-Unis en détiennent 1.600 actives dont 100 bombes tactiques installées sur le territoire européen. La France est aussi un acteur majeur de la dissuasion nucléaire, avec presque 300 têtes à disposition. 

    La force de dissuasion nucléaire française peut opérer grâce aux avions de chasse Rafale, capables de transporter des missiles air-sol. © Dassault Aviation
    La force de dissuasion nucléaire française peut opérer grâce aux avions de chasse Rafale, capables de transporter des missiles air-sol. © Dassault Aviation

    Maîtriser l'escalade

    Si le discours russe peut inquiéter, il est nécessaire de prendre en considération un concept édicté par Vladimir Poutine lui-même en 1999, alors secrétaire du Conseil de sécurité de la Fédération russe. Ce dernier évoquait la stratégie « d'escalader pour engager une désescalade » (escalate to de-escalate). Cette stratégie se voudrait avant tout dissuasive, en employant la menace de la force nucléaire afin d'éviter qu'un adversaire trop important pour la Russie s'engage dans un conflit conventionnel. De l'autre côté de l'Atlantique, Joe Biden et plusieurs membres de l'administration américaine ont indiqué que ni les États-Unis ni l'OTAN ne participeraient directement au conflit. 

    Dmitry Peskov, attaché de presse et porte-parole de Vladimir Poutine. © CNN, Reuters
    Dmitry Peskov, attaché de presse et porte-parole de Vladimir Poutine. © CNN, Reuters

    L'évolution de la guerre russo-ukrainienne est incertaine, alors que l'armée russe semble se positionner à l'est de l'Ukraine. Les actions de la Russie provoquent régulièrement l'indignation de la communauté internationale, par utilisation supposée de phosphore blanc ou le massacre de centaines de civils. Mais le porteporte-parole de Vladimir Poutine, Dmitry Peskov, expliquait au début du mois d'avril que la Russie n'avait pas l'intention d'utiliser d'armes nucléaires, à moins d'une menace directe et « existentielle ».